Au revoir, mademoiselle.

J’aurais bien voulu vous parler du deuxième débat des primaires socialistes qui s’est tenu hier soir, mais je n’ai absolument rien à en dire (même si pour beaucoup de journalistes ça n’est pas un obstacle). A part Manuel Valls qui a répliqué à Arnaud Montebourg qu’il n’avait pas le monopole de la gauche, et le lapsus de François Hollande qui veut « rassembler les solistes » plutôt que les socialistes, l’exercice qui consistait à se montrer unis mais différents était plutôt policé et soporifique. Toutefois, partons de la proposition de Martine Aubry de garantir dès sa prise de fonction l’égalité des salaires entre hommes et femmes pour parler de nos copines féministes.

Sans doutes un peu lasses de courir après DSK, deux associations, Osez le féminisme et les Chiennes de garde pour ne pas les citer, ont lancé une campagne visant à la suppression de la case mademoiselle des registres d’Etat-Civil. Requête tout à fait légitime puisque les hommes restent qualifiés toute leur vie de monsieur, ce qui ne révèle rien de leur statut marital. Les féministes ajoutent qu’il serait de bon ton de remplacer l’expression nom de jeune fille par nom de naissance. On pourrait ajouter que dans un couple marié, l’homme est désigné par le terme mari, l’accent étant porté sur le lien matrimonial, et la femme reste la femme, le caractère biologique étant dans son cas mis en avant, impliquant une sorte d’acte de propriété comme pour un animal (ce n’est pas le fait d’être comparé à un animal que je trouve insultant mais la notion de propriété, et je méprise ceux qui se qualifient de « maître » d’un animal autant que les machos de tout poil). Les deux associations précitées, qui malgré leur utilité publique indéniable ne sont pas des foudres de féminisme libertaire, n’ont toutefois pas osé remettre en cause en bloc l’institution rétrograde du mariage, la seule niche fiscale qui n’a pas grand-chose à craindre de la crise, qui est une incitation passéiste à la monogamie hétérosexuelle et infantiliste pour protéger la propriété et les droits de succession. Par ailleurs, la campagne de démademoisellisation de la société française a paru a beaucoup de commentateurs être un combat dérisoire au regard des multiples chantiers du féminisme de par le monde, chantiers babyloniens dont ils ne parlent pratiquement jamais quand ils  n’ont pas les atours futiles et utiles pour combler deux minutes en fin de JT.

Et en effet, l’actualité bouillonne de sujets d’indignation sur lesquels j’aurais aimé que les féministes soient plus audibles et surtout plus entendues. Tristane Banon va être confrontée à Dominique Strauss-Kahn; les Saoudiennes vont devoir attendre quatre ans pour voter aux municipales et sans doute trente ans pour pouvoir conduire une voiture sans encourir dix coups de fouet; la nomination de David Douillet au ministère des Sports n’a pas soulevé la plus grande indignation alors qu’il affirme dans un élan de poésie printanière que « tous les hommes sont misogynes sauf les tapettes », et que du coup l’équipe gouvernementale compte une femme de moins, même si elle ne brillait pas non plus par sa compétence; pas grand monde ne s’est manifesté pour déplorer que la représentation féminine au Sénat historiquement de gauche soit aussi faible que la puissance de conceptualisation de David Douillet; qui a marqué son soutien aux féministes ukrainiennes de l’association Femen qui luttent pour que les prostituées ne soient plus le loisir numéro un des supporters après un match, avec l’alcoolémie frénétique et la baston? De même, qui marquera son désaccord face à l’obscène retour de la mode des maisons closes dans le cinéma, la télévision et la littérature avant que la Droite Populaire ne demande leur réouverture? Pourquoi trouve t-on que c’est un progrès de voir un nombre croissant de femmes dans les métiers pénibles du bâtiment ou dans les casernes de notre glorieuse armée dont la dernière campagne de pub avoue qu’elle a besoin de plus en plus d’abrutis pour faire voler les avions de M. Dassault? Pourquoi les publicités continuent-elles à confronter des mères de famille à leur machine à laver ou à présenter des femmes comme des consommatrices compulsives, reproduisant à l’infini le cliché de la maman et de la putain? On pourrait continuer ad nauseam, mais il est bientôt midi et le repas ne va pas se faire tout seul, mesdemoiselles.

Dans un prochain épisode, et en attendant que mon vernis soit sec, nous nous demanderons comment le féminisme appréhendera la théorie des genres chère au coeur de M.Vanneste qui permet à tout à chacun de se sentir femme quelle que soit son appartenance biologique.

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