Auberge espagnole

« Dans le ventre des Espagnoles il y a des armes toutes prêtes, toutes prêtes et qui attendent. » (Léo Ferré)

Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! Je ne voudrais pas jouer une nouvelle fois à l’anti-sport primaire, mais n’empêche : pouvez-vous me rappeler de quel pays l’équipe qui a gagné la dernière coupe du monde de football portait les couleurs ? Pouvez-vous me rappeler la nationalité de Rafael Nadal, multi-vainqueur de Roland Garros ? Pouvez-vous me rappeler quelle est la patrie d’Alberto Contador, qui a pratiquement fait oublier Lance Armstrong sur la route du tour de France ? Bien sûr, vous ne l’avez pas oublié, l’Espagne peut se vanter d’avoir des sportifs dont le talent brille à l’échelle mondiale ; cela a-t-il évité la crise à ce beau pays ? La réponse est si évidente que l’on peut même légitimement se demander si l’argent dépensé dans le domaine sportif par l’État espagnol n’explique pas en partie la triste situation actuelle de nos amis d’Outre-Pyrénées… Il ne s’agit pas de dénoncer le sport comme porteur de tous les maux, mais simplement de se poser la question des bienfaits réels qu’il apporte à l’économie d’un pays : ne serait-il pas plutôt une charge qui viendrait empêcher les États d’investir dans des domaines plus vitaux ? J’ai toujours trouvé curieux que ce manque à gagner dû à un domaine qui n’est pas indispensable ne soit jamais comptabilisé…

Ces considérations n’ayant eu pour but que d’offrir une entrée en matière à cet article, entrons dans le vif du sujet : je ne voudrais pas non plus jouer au pessimiste de service, mais n’empêche : pouvez-vous me rappeler aussi dans quel pays a pris naissance le fameux mouvement des indignés ? En Espagne, bien sûr ; et qu’est-il sorti des urnes la semaine dernière ? Il en est sorti une majorité de droite, qui plus est de la droite la plus réactionnaire qui soit, celle du Partido Popular (Appeler « populaire » un parti pareil ! Ils ont de l’humour, les Ibères !). Bon, d’accord, ils n’allaient pas reconduire Zapatero, mais n’y avait-il vraiment pas d’autre choix que la droite et la fausse gauche ? Je ne suis pas d’assez prêt la vie politique espagnole pour avoir la réponse. On a beau jeu, en Europe, de critiquer la révolution tunisienne qui a abouti sur la victoire des islamistes, c’est oublier bien vite que les Français, après avoir désapprouvé le néo-fascisme en 2002, l’impérialisme américain en 2003, le libéralisme économique sauvage en 2004, l’Europe libérale en 2005 et la précarisation des jeunes en 2006 ont finalement approuvé, en élisant Sarkozy, tout ce qu’ils avaient rejeté auparavant… Par conséquent, la victoire de Mariano Rajoy m’a déçu mais ne m’a pas tellement surpris : j’ai souvent l’impression qu’en politique, les gens ont peur de ce qu’ils pensent vraiment… Bref, que dire quand la nation des Indignés se dote d’un gouvernement de ce type ? Faut-il déjà désespérer de ce mouvement qui prend une ampleur internationale mais qui pourrait finir comme celui de mai 68 ? Faut-il au contraire espérer que la frustration que la politique de Rajoy ne manquera pas de susciter accélérera le processus révolutionnaire ? Une seule chose est sûre : pour les bonnes nouvelles, on attendra.

Cela dit, rappelez-vous des élections de 2004, qui s’étaient conclues sur la victoire de Zapatero après huit ans de gouvernement Aznar : en France, il y avait eu une quasi-unanimité politique pour saluer ce résultat. La gauche se réjouissait de la victoire d’un allié et la droite se félicitait de la défaite d’un adversaire, Aznar ayant été en désaccord flagrant avec Chirac sur la question de la guerre en Irak. Un seul homme politique de premier plan avait osé rendre hommage, dans ce contexte, à José Maria Aznar : un certain Nicolas Sarkozy… Je ne sais plus s’il était encore ministre de l’intérieur ou s’il venait de passer aux finances, toujours est-il qu’il s’était significativement distingué au sein de la Chiraquie en se déclarant solidaire de la droite espagnole même si celle-ci était désavouée par les électeurs et portait la croix de son engagement en faveur de la croisade de Bush junior – comme quoi, chez Sarkozy, même le populisme est à deux vitesses ! Rien d’étonnant par conséquent de le voir saluer la victoire de Rajoy ; puisque cette droite néo-franquiste lui plait tant, je vous fais cette suggestion :

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Allez, kenavo !

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