POULET DE PRESSE n°22

Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! Aujourd’hui, un « poulet de presse » un peu spécial puisqu’il doit tout à notre collaboratrice niçoise Carmen qui m’a envoyé assez de coupures de presses pour alimenter une rubrique ; qu’elle en soit mille fois remerciée ! Allez, trêve de salamalecs…  

Le Monde n°20659 (10/05/2011) : Dans cette édition de l’ex-quotidien national de référence, une nouvelle qui a fait peu de bruit mais qui est révélatrice à bien des égards : « la cour d’appel de Nîmes a annulé, vendredi 6 mai, la garde à vue d’un étranger sans titre de séjour et l’a libéré d’un centre rétention. Il s’agit de la première application d’une décision de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), qui avait estimé qu’il n’était pas possible d’incarcérer un étranger au seul motif qu’il était en séjour irrégulier. » Ben voyons ! Vous réalisez ce que ça veut dire ? Cela signifie qu’il est désormais déjà reconnu à l’échelon européen que l’immigré en situation irrégulière n’est pas un délinquant à traiter comme tel ! Le gouvernement français est donc ouvertement en contradiction, avec sa politique migratoire, avec les décisions de la CJUE, autant dire que la France est désormais un État voyou ! Qui plus est, c’est en parfaite connaissance de cause : « Alors que les arrêts de la CJUE s’imposent aux Etats membres, le ministère de l’intérieur français avait considéré, à la surprise générale, que la décision ne concernait pas la France et visait directement une réglementation italienne. » Non, maman, c’est pas moi qui ai chipé de la confiture, c’est lui ! Le message est clair : notre gouvernement, habituellement si prompt à appliquer à la lettre les décisions prises à l’échelle européenne (en les lisant d’une façon orientée, il faut le dire) dès qu’il s’agit de brader les services publics, fait soudain une exception dès que ces décisions concernent l’immigration et n’abondent pas dans le sens de son électorat bidochon pour lequel l’étranger n’est qu’une machine à manger le pain des Français… L’Europe, c’est quand ça vous arrange, hein ? Par ailleurs, la législation française, non contente d’être illégale à cet égard, est parfaitement idiote : « En France, un étranger en situation irrégulière risque un an de prison et 3750 euros d’amende ; un refus de se soumettre à une obligation de quitter le territoire est passible de trois ans d’emprisonnement. » Bon, il faudrait savoir : il n’a pas le droit de résider en France, ou on le force à y rester en l’incarcérant ? Et puis je vous jure, demander 3750 euros à des gens qui, la plupart du temps, viennent en Europe justement parce qu’ils sont fauchés… Et dites : et si c’était justement pour forcer ces immigrés à travailler presque gratuitement, la quasi-totalité de leur salaire passant dans le règlement de l’amende ? Enfin, je dis ça, je dis rien… Cela dit, il ne faudrait pas s’imaginer que la décision de la CJUE ouvre les portes du paradis aux immigrés puisque la cour de Nîmes, en l’appliquant, « estime que l’identité d’un étranger soupçonné de séjour en situation irrégulier peut naturellement être contrôlée, mais que pour ce faire, les services de police ne peuvent le retenir que pendant quatre heures. Ce délai serait suffisant à l’autorité administrative pour prendre toute décision utile à son éloignement. Au-delà de quatre heures, il serait automatiquement placé en garde à vue, qui serait alors illégale. » Vous voyez : la mesure vise plus à normaliser les expulsions qu’à les empêcher ; pour la fin de l’Europe-forteresse, on repassera ! La bonne nouvelle, cependant, c’est que les magistrats ont osé faire de la résistance face à la législation française et à l’arbitraire de la police et que cette décision de CJUE est peut-être une première brèche dans le mur que nos politiques rêvent de maintenir debout entre nous et le reste du monde, qui sait ?

La même édition du Monde propose aussi un entretien avec Laura Boldrini, porte-parole du Haut-Commissariat aux réfugiés en Italie, à propos des réfugiés fuyant la Lybie qui avaient échoué le 8 mai dernier à Lampedusa… Au fait, pourquoi ils sont partis de Lybie ? Parce qu’il y a la guerre ? Ah bon, je ne savais pas : dans les media, on ne parle jamais de « guerre » mais toujours d’ « intervention militaire » ; et puis la guerre, ça tue des gens, non ? Ben on ne nous montre jamais les morts, comme s’il n’y en avait pas ; ça veut bien dire qu’il n’y a pas de guerre ! Mais s’il y en avait une, alors ces réfugiés n’auraient vraiment pas de chance puisque, à croire madame Boldrini, il s’agit de « réfugiés en provenance de Somalie, du Mali, du Niger, de Côte d’Ivoire. Ces gens ont déjà fui une guerre avant d’arriver en Libye, où une autre guerre les chasse. » Ah, quand ça veut pas…En plus, ils ont « pris place à bord de véritables épaves, de chalutiers bons pour la casse et pleins à craquer, confiés à un équipage inexpérimenté dans la plupart des cas. » Décidément ! Sauf que là, c‘est pas vraiment la malchance qui s’en est mêlée, mais plutôt la méchanceté de ceux qui ont organisé cette traversée ; c’est tirer profit de la misère d’autrui ou je ne m’y connais pas ! Madame Boldrini, c’est tout à son honneur, ne remet pas en cause le devoir d’assistance des États européens vis-à-vis de ces malheureux, mais elle pourrait mieux choisir ses mots quand elle dit que « cette vague d’immigration est un dégât collatéral de la guerre ». Le dégât, il y en a un, il est dans les conditions dans lesquelles ils ont été contraints de naviguer : un dégât collatéral autrement plus grave aurait été qu’ils restent là-bas se faire tuer…non ? D’autre part, la dernière réponse de Laura Boldrini me montre qu’elle ne suit pas l’actualité française : « Le ministre de l’intérieur [italien, je présume, NDLR] a reconnu leur statut et prévenu qu’ils n’étaient pas « expulsables ». La chose la plus grave serait de refouler les gens qui arrivent en fuyant la guerre. Cela n’est pas arrivé jusqu’à présent et j’espère que cela ne se produira pas. » Espérons-le aussi puisque notre cher gouvernement français a déjà fait tomber ce tabou avec les Afghans il n’y a pas si longtemps encore…

Il n'y a PAS de "bonne guerre", compris ? (Cliquez pour agrandir)

Le Canard enchaîné (11/05/2011) : Je ne savais pas que Carmen lisait cet illustre hebdomadaire satirique, mais en tant qu’habitante de Nice, je comprends que cet article l’ait interpellée puisqu’il y est question de sa concitoyenne Fatiha Djegaoud, la pharmacienne niçoise qui, le 10 février dernier, dans l’émission d’autocélébration que présente Sarkozy (les « journalistes » de service n’y font que de la figuration, faute de faire joli) sur la chaîne de son grand copain Bouygues Jr, « s’était distinguée, rappelle Christophe Nobili, en interpellant le chef de l’État sur l’insécurité, à la manière décomplexée qu’il affectionne tant. » J’ai bien tenté de trouver les propos exacts qu’elle a tenus pour voir ce qu’ils avaient éventuellement de scandaleux (je commence à avoir l’habitude), mais bernique ! Pour moi, le scénario est clair : les grosses légumes de TF1 l’ont choisie pour participer à cette émission précisément parce qu’elle rencontrait des problèmes qui la rendaient sensible (des gens comme ça existent et ils sont plus à plaindre qu’autre chose, ne serait-ce qu’à cause des malheurs qu’ils essuient) aux discours de notre demi-conducator sur la sécurité. Bref, jusque là, c’est plutôt une victime que d’autre salauds, encore plus salauds que les salauds qui l’ont braquée puis menacée, ont manipulée à des fins de propagande, à commencer par Sarkozy lui-même qui l’a reçue à l’Élysée pour achever d’en faire sa chose ; et c’est donc pour la remercier du service qu’elle lui a rendu (un peu malgré elle, je veux bien le croire) que l’UMP niçoise, incarnée pas le maire « motodidacte » de Nice, Christian Estosi, a embauché la pharmacienne dont la boutique allait être rasée dans le cadre d’un chantier de rénovation. C’est là que ça coince un peu : elle a le courage de dénoncer ceux qui l’ont braquée, mais elle n’est pas téméraire au point de dire leurs quatre vérités aux officiels qui ont validé la destruction de son affaire ! Mieux, elle accepte de leur manger dans la main à la première occasion ! Fatiha, qu’as-tu fait de ta dignité ? Es-tu donc, comme beaucoup de petits chefs, forte avec les faibles et faibles avec les forts ? Ah ben non, même pas, tu es une magouilleuse comme une autre ! En effet, non content de l’embaucher, monsieur le maire, dans la foulée, comme par hasard « débloque le dossier d’indemnisation de sa future collaboratrice », lui permettant de toucher 1 060 000 euros, soit 360 000 de plus que ce que son bailleur lui avait proposé ! Hé, oh, ‘faut pas nous prendre pour des billes, c’est du conflit d’intérêt pur et simple ! C’est là que ça re-va pas : non contente de ne pas oser dénoncer les magouilles des officiels qui l’obligent à fermer boutique, elle y rajoute d’autres magouilles, celles-là encore plus flagrantes! N’en jetez plus, la cour est pleine ! À la limite, elle aurait pu se permettre de tenir des propos vraiment scandaleux à l’antenne, je les lui aurais presque pardonnés, en comparaison avec ça…          

La dernière fois que j'ai dessiné Estrosi, l'année dernière. (Cliquez pour agrandir)

Nice-Matin (11/05/2011) : Étant donnée la caricature de république bananière UMP que semble constituer la municipalité de Nice, je suis étonné d’apprendre que s’y sont tenues, du 10 au 28 mai, les « journées du mieux vivre ensemble ». Je note que la déléguée municipale à l’intégration et à la lutte contre les discriminations, qui a inauguré ces journées s’appelle Maty Diouf : renseignements pris, elle est d’origine sénégalaise, très belle et elle est la seule noire du conseil municipal de Nice. Je me disais aussi… Le but de cette sauterie ? Commémorer l’abolition de l’esclavage et fêter la fraternité entre les peuples, histoire de rappeler que 117 nationalités différentes ont cohabité ou cohabitent dans l’actuelle préfecture des Alpes-Maritimes et que la ville est aussi la patrie de René Cassin, rédacteur de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Pas si mal pour une cité qui n’en a pas moins élu un maire qui fut notamment membre d’un gouvernement ayant donné vie à ce monstre de Frankenstein que fut le « ministère de l’immigration et de l’identité nationale » et appliqué la politique que comportait un tel rapprochement. Ajoutez à cela les gros scores enregistrés par le FN dans la région aux dernières cantonales… Entendons-nous bien : je ne doute pas que Nice soit une très belle ville, j’ai en Bretagne une amie originaire de cette ville qui m’a montré des images du vieux Nice et m’en parle avec enthousiasme. Je sais aussi que les clichés, dans un sens ou dans un autre, ne doivent jamais être pris au sérieux, et je ne crois pas une seconde que Nice ne soit peuplée que de vieux fachos pleins aux as ! Mais n’empêche. N’empêche que, quand on connait Estrosi, la présence dans le conseil municipal de Maty Diouf ressemble fort à un alibi et que, quand on connait les couleurs politique dominantes à Nice, où le bleu tire parfois sur le brun, les « journées du mieux vivre ensemble » (d’un strict point de vue esthétique, je ne trouve pas le nom très bien choisi, soit dit en passant) à une tentative pour la cité d’expier ses propres errements sans avoir à les avouer… Enfin, j’espère que toutes ces considérations n’ont quand même pas empêché les Niçois non-racistes (qui sont sûrement nombreux) de s’amuser.

Une carte postale du vieux Nice que j'ai reçue l'été dernier ; c'est vrai que c'est joli ! Ce n'est pas très net, je sais, mais j'avais la flemme d'aller la scanner...

Libération (19/05/2011) : Deux pages « piqûres de rappel » dans la quotidien de la gauche caviar, histoire de démontrer une fois pour toute qu’on peut très bien être passionné de football et ne pas être pour autant tolérant et fraternel. L’Europe à beau jeu de se moquer des Bokassa 1er (et dernier), des Amin Dada et autres pitres sanguinaires qui ont ensanglanté l’Afrique dans les années 1970 avec leurs délires mégalomanes : le vieux continent en lui aussi un autocrate qui n’est pas mal dans le genre criminel et grotesque, le président tchétchène Ramzan Kadyrov (vous vous attendiez à qui ?), imposé aux Tchétchènes par le pouvoir russe et qui a des rêves de grandeur pharaonique pour son tout petit pays et compte bien sur le football, la Russie accueillant le mondial 2018, pour y parvenir, bien que la république ne produise pas de richesses et ait un taux de chômage proche des 75% ; ainsi arrose-t-il copieusement en argent et en bibelots de luxe les grandes figures du foot et même celles du show-biz pour qu’elles viennent faire les pitres sur la pelouse du stade qui porte son nom (modestie, quand tu nous tiens…), dans l’espoir même pas secret d’accueillir quelques matches de la coupe du monde. Il est vrai que depuis l’édition 1978, qui eut lieu dans la dictature argentine, on sait que la FIFA n’est pas exigeante sur le respect des droits de l’Homme ; Kadyrov peut avoir confiance, il ne sera pas pénalisé par l’islamisation médiévale et l’état de siège permanent qu’il impose à ses loyaux sujets qui vivent dans la terreur de chaque instant, ni par sa récupération des « traditions caucasiennes telles que le crime d’honneur, la punition collective ou la réconciliation des ennemis de sang » qu’on imagine aisément détournées par Sa Grandeur pour pouvoir éliminer ceux qui le gênent, ni par son implication possible dans « l’assassinat en 2009 de Natalia Estremirova, membre active de Memorial Grozny, spécialisée dans les enquêtes sur les enlèvements ». Avec un tel palmarès, on se dit : si c’est délibérément, afin de faire oublier ses crimes, que Kadyrov est aussi « Grand-Guignol », c’est grave ; s’il est comme ça par nature, c’est encore pire. Je traitais tout à l’heure la municipalité de Nice de caricature de république bananière, mais reconnaissons honnêtement, quand même, que cette caricature n’égalera jamais en horreur un original de l’ampleur de l’État tchétchène…

Ce que je dis ici de Kim-Jiong-Il est valable pour tout dictateur, et donc aussi pour Kadyrov. (Cliquez pour agrandir)

Voilà, c’est fini ; je peux envoyer un message perso avant de conclure ? Oui ? Merci ; Carmen, merci pour les coupures de presse, mais la prochaine fois, sois un amour : donne-moi non seulement la date mais aussi le NUMÉRO de l’édition du journal dont l’article est tiré. Allez, kenavo !

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