Anticopéiste primaire

 

« Je pense que les coups de pied au derrière font avancer »

Jean François Copé

 

Pendant toute la campagne électorale, on nous a gavé avec « l’antisarkozysme primaire ». Et en ce qui me concerne c’était même de l’antisarkozysme primal. La droite nous enjoignait de rester sur le terrain des idées et d’éviter les attaques personnelles indignes d’un débat démocratique de haute tenue. Sauf que pendant douze ans, on a goûté du Sarkozy à toutes les sauces, et pas que les plus appétissantes. L’ex-président a vraiment tout ramené à sa petite personne pendant son mandat présidentiel, en instrumentalisant sa vie privée, en faisant fi de la séparation des pouvoirs, en s’attribuant des mesures décidées sans lui (dans le cadre européen) ou en s’arrogeant des faits acquis sans qu’il fut besoin de son intervention (l’armistice entre la Russie et la Géorgie), bref on ne va pas refaire le mandat, on a déjà eu notre dose mais quand on navigue entre toutes les lignes politiques avec de l’ego à la place des voiles, il ne faut pas s’étonner si les électeurs rejetent la faute de la tempête sur le capitaine.

Aujourd’hui, le père Sarko goûte des congés qui devraient nous revenir de droit, et on n’est pas pressé de le revoir ailleurs que devant un juge. Mais l’UMP n’est pas encore morte. Par un étrange phénomène de mutation génétique, plusieurs de ses membres envisagent d’en devenir la tête. Pour l’instant, celui qui occupe ce poste, c’est l’ami Jean-François Copé, dont on a souvent parlé et pas qu’en bien dans ces lignes. C’est lui qui va diriger les troupes umpistes dans la bataille des législatives qui s’annonce. Et autant vous le dire, même si c’est très peu probable statistiquement, je n’ai qu’une hantise en ce moment, c’est que la droite remporte la majorité à l’Assemblée et que Copé devienne premier ministre. En fait, j’ai d’autres hantises, le parallélisme, une mauvaise récolte viticole à la rentrée, un nouvel album de Grégoire, une fission nucléaire intempestive à Cattenom, la conjugaison de l’imparfait du subjonctif après une bouteille et demie de vodka, le retour des coupes de cheveux des années 80, mais c’est totalement hors-sujet dans cet article alors faites comme si vous n’aviez pas lu cette phrase.

Aussi, cher lecteur, chère lectrice, te proposé-je de rallier sans attendre 2017 mon nouveau cheval de bataille: l’anticopéisme primaire. Jean François Copé est une sorte de Sarkozy à la chevelure moussue et mal répartie sur son occiput. Ca n’a sans doute aucun impact sur ses orientations politiques, mais il faut que ça se sache, et ça ne peut nuire à notre cause. D’ailleurs, les deux hommes se ressemblent tellement politiquement qu’ils se détestent, dans une manière de syndrome de Narcisse inversé. Notre ami a exercé à peu près toutes les responsabilités possibles dans une carrière politique et est présentement maire de Meaux et secrétaire général de l’UMP, poste qu’il compte bien conserver aux dépens de Fillon et Juppé qui lorgnent également sur l’Elysée dans cinq ans, c’est dire comme ces gens voient loin. A une lointaine époque, Copé avait écrit (ou fait écrire parce qu’il a beaucoup de travail) un opus intitulé « promis j’arrête la langue de bois ». C’est d’une part un bel aveu qui atteste que jusqu’à la sortie de ce livre il pouvait héberger des familles de pic-vert dans son palais, et d’autre part une promesse d’ivrogne qu’il n’a jamais tenue. Attention, je ne dis pas que Jean-François se pinte la ruche, je dis juste qu’il ne faut jamais croire les promesse d’un ivrogne et d’un personnage qui vous demande votre voix aux élections.

Et de fait, Jean-François qui s’est voulu, en coulisses, en opposition avec Sarkozy sur bien des points, marche dans les petits pas de son prédecesseur. C’est sûrement le type le plus accompli de la « droite décomplexée », qui affirme qu’il assume parfaitement de gagner « un peu » plus que les autres (en gardant d’ailleurs une activité de conseil dans son cabinet d’avocat, parce que vraiment la politique ça ne nourrit pas son homme), qui trouve que la Droite Populaire ne raconte pas que des conneries, que la vidéo-surveillance qui a transformé Meaux en plateau de télé-réalité bétonné n’est pas liberticide puisque la sécurité est le pendant de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, et qui ne fera jamais, au grand jamais croix de bois croix de fer si je mens je refonde le RPR, alliance avec le Front National, du moins tant qu’il n’en aura pas besoin.

Les législatives arrivent lentement, et Jean-François n’a pas attendu qu’Hollande se mette au boulot pour lui porter le fer. Et qu’est ce que c’est que cette place de la Bastille où il n’y a pas un drapeau français, et pourquoi Rocard est en Iran (comme si quelqu’un demandait encore à Rocard s’il a un trou dans son planning), et pourquoi Ayrault serait premier ministre avec toutes ses affaires (complètement d’accord, mais quid du précédent gouvernement qui a battu le record de mises en examens pour les motifs les plus variés), et patati et patata. Les journalistes « sérieux » ne disent jamais patati et patata, ils préfèrent les locutions latines prétentieuses comme ad verbatim, ad libitum et ad nauseam, ils ont bien raison, mais je me mettrai à parler comme eux le jour où ils arrêteront de dire « le fief de machin ou machine » pour parler de sa circonscription, les privilèges et la féodalité ont été abolis il y a plus de deux siècles, bandes de cuistres infatués et ignares.

Pour revenir à nos oignons, quoique l’on serait plus inspiré de parler de topinambour dans le cas d’espèce, Copé souhaite donc « choisir la France » pour les législatives. Sentez-vous l’écho de la présidentielle où Sarkozy cambriolait avec allégresse la boutique Le Pen pour revendre sa came (et pas au marché noir vous pensez bien)? Et bien l’ami Jean-François, au sommet de son art et sur les cîmes inaccessibles de l’inspiration divine (il tient Frédéric Lefevre pour l’un des députés les plus créatifs: je n’ai toujours pas compris si c’était de l’ironie ou s’il le pense vraiment), nous la refait en intégralité: oui à la règle d’or budgétaire, oui au nucléaire,non au droit de vote aux étrangers, non à la retraite à 60 ans, non au matraquage fiscal. Bref, toujours la même litanie raciste et néolibérale qui n’a jamais fonctionné nulle part, et dont la plupart des mensonges ont été démontés avant même le scrutin présidentiel. Certes, François Fillon et Alain Juppé, les Oncle Fétide de l’UMP ne proposent guère mieux, mais en plus Copé c’est physique, il me rend le PS sympathique et c’est vraiment intolérable.

Pour finir, chose curieuse, Jean-François Copé organise annuellement un festival de jazz dans sa ville de Meaux. Vous pouvez ricaner en le regardant taquiner le clavier sur YouTube, puisque manifestement ses doigts sont du même matériau que sa langue, mais que des liberticides pareils aiment le jazz, à savoir la musique qui laisse le plus de place à la liberté et à l’improvisation, ben moi ça me laisse toujours sans voix.

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