Petit point sur le Syndrome Ehlers Danlos

Le syndrome Ehlers Danlos est une maladie génétique touchant le tissu conjonctif. Elle entraine de nombreux symptômes : subluxations, luxations, troubles gastro-intestinaux, migraines, troubles respiratoires, la fatigue, une fragilité de la peau, problèmes de vue et d’audition … et surtout, la douleur. Douleurs articulaires, musculaires, osseuses, internes, elle s’insinue partout à la fois, tout le temps … Elle est notre plus fidèle compagne et certains d’entre nous, ne peuvent être soulagés ni par les orthèses, ni par les antalgiques (même les plus puissants comme la morphine ou la kétamine). Il faut juste serrer les dents et espérer que son intensité sera moindre le lendemain.

N’ayant pas de test génétique pour le SED, il faut s’attacher aux symptômes et faire les bons liens pour réussir à mettre un nom sur des problèmes de santé qui peuvent poursuivre les malades des années avant d’obtenir le diagnostique. Pour ma part, j’ai été diagnostiquée à 24 ans alors que les premiers symptômes sont apparus alors que j’étais encore bébé. Pour les médecins, le problème était psychosomatique jusqu’au jour où j’ai rencontré le Professeur Hamonet à l’Hôtel Dieu. Un grand médecin qui appuie encore son diagnostique sur les symptômes.
« Avoir un diagnostic après toutes ces années d’errance médicale a été un soulagement. Malheureusement, je n’ai pas eu les réponses que j’attendais. Bien souvent, les médecins ne prennent même pas la peine d’essayer de me soulager ou de prendre en considération ce qu’entraine cette maladie. Et j’ai régulièrement droit à cette phrase : – C’est votre maladie, c’est comme ça, il faut faire avec.». Emilie.
Il n’y a pas de traitement, on ne guérit pas du syndrome. Il existe simplement des aides techniques pour améliorer les conditions de vie. Coussins à mémoire de forme, fauteuil roulant pour éviter les luxations répétitives et une fatigue articulaire et musculaire excessive, orthèses pour réduire le nombre de luxations et subluxations, kiné pour réapprendre au corps comment se mouvoir … Toutes ces aides techniques ont un coût et obtenir la reconnaissance du syndrome par la sécurité sociale, par la Maison Des Personnes Handicapées, pour être remboursé est une véritable lutte administrative. Et quand enfin nous obtenons cela, il reste encore des sommes monumentales à notre charge. Etre handicapé a un prix.

méca-moueDe plus, il est difficile de trouver un emploi en étant atteint du Syndrome Ehlers Danlos. Maladie invisible, une personne atteinte du SED a l’air en bonne santé. Parfois sur ses jambes, parfois en fauteuil électrique. La douleur et les luxations ne se voient pas. C’est déstabilisant pour un employeur. Et puis, quel chef d’entreprise choisirait d’employer une personne qui sera régulièrement absente et donc moins « productive » qu’une personne en bonne santé. Pour ceux qui ont un emploi, les adaptations sont difficiles et parfois mal perçues.

« La vie d’un collégien avec une maladie rare ; le SED, est parsemée d’embûches  Surtout les jours où l’on peut se déplacer sur ses deux jambes, avec des genouillères qui ne se voient pas. Avoir des amis, c’est primordial. Mais pour le principal du collège, si un ado arrive à marcher, à aller en récré et avoir des amis, il n’a pas de handicap, n’a pas besoin du EVS. Pour lui, le mot handicap= fauteuil. Quand on est debout, entouré d’amis, on n’est plus handicapé, on est comme tout le monde ! Donc, pas d’aide pour certaines tâches de la vie d’un collégien. Pourtant, on peut réussir à marcher tant bien que mal et ne pas pouvoir écrire sans un ordinateur. Mais ça, non, il faut savoir écrire avec un stylo… Donc, la vie d’un collégien SED est un combat permanent. » Christine.

Vivre d’un emploi à temps partiel ou d’une Allocation Adulte Handicapé ne permet pas de vivre dans le luxe ni de financer les aides techniques non prises en charge par la sécu ou la MDPH comme un véhicule adapté au fauteuil roulant électrique … Ce manque d’aide technique peut entrainer un isolement ou une dégradation plus rapide de l’état de santé.

Pour revenir sur l’intermittence des symptômes, cela entraine beaucoup de regards méprisants et de remarques désobligeantes. Lorsque je me gare sur une place handicapée (avec ma carte de stationnement bien évidement) et que je fais le tour de ma voiture pour aller sortir mon fauteuil roulant, il arrive que des gens me lancent des « vous n’avez pas honte, vous êtes sur une place handicapée » ou alors « simulatrice » … A la caisse d’un magasin, les gens ne comprennent pas que si vous possédez une carte de priorité, que vous soyez en fauteuil ou debout, vous êtres prioritaire.

« Depuis toute petite je suis sujette aux luxations, entorses … Mais mon diagnostic ne s’est fait qu’à l’âge de 25 ans. En fait, le SED est une maladie difficile à déceler car ses symptômes sont courants pour la plupart des gens. Qui n’a jamais eu de brûlures d’estomac, les gencives qui saignent, ou même des hématomes sans savoir comment ils sont apparus ? Comment mon médecin aurait pu associer un léger essoufflement lorsque je monte des escaliers à mon entorse de la semaine précédente ? Un jour la maladie s’est accentuée, et c’est suite à cette manifestation bien plus importante que mon médecin a décidé d’approfondir ses recherches. Par chance, j’ai eu le diagnostic assez rapidement après mais la maladie avait progressé. Depuis 5 ans j’ai appris à vivre différemment. J’ai appris à réfléchir pour organiser ma journée afin de limiter des allers-retours inutiles, j’ai adapté autant que possible mes éléments de cuisine car une casserole d’eau est trop lourde pour mon poignet trop fragile. Il n’en reste pas moins que je suis une femme ; j’aime être coquette pour la grande fierté de mon compagnon. J’essaie de profiter de chaque instant de répit ; que ça soit une promenade avec mon chien ou aller flâner dans les boutiques. Le fait d’être handicapé par période fait penser à une simulation de handicap, et pourtant le SED est loin d’être la seule maladie qui nécessite un fauteuil roulant par intermittence. Je pense que le plus difficile dans cette maladie est d’arriver à faire comprendre que notre état est variable. Et ça n’empêche pas moins d’aimer la vie et de garder le sourire. » Ophélie.

Malgré un quotidien difficile, la majorité des personnes atteintes du SED souhaitent avant tout afficher un visage souriant, mettre en avant leurs talents et leurs capacités plutôt que leurs difficultés, profiter au maximum des jours meilleurs que les autres … et attendent que la science puisse un jour les guérir.

« Grandir avec le Syndrome d’Ehlers Danlos, c’est accepter de le faire, tout en armure ; genouillères, corset, lunettes …
Se marier avec le Syndrome d’Ehlers Danlos, c’est accepter d’être contraint(e) de le partager et de vivre de loisirs simples, très terre à terre et peu sévères …
Vieillir avec le Syndrome d’Ehlers Danlos, nous savons faire, car nous avons accepté de vieillir avant même de grandir …
Vivre avec le Syndrome d’Ehlers Danlos, c’est aussi une force car nous passons notre temps à nous dépasser, à Vous dépasser ! C’est être capable de se luxer une clavicule, voire les deux, une heure avant d’aller travailler et d’être fichu(e) d’arriver à l’heure. Raconter sa mésaventure ? Vous n’y pensez pas, mythomane !!
Vivre avec le Syndrome d’Ehlers Danlos, c’est comprendre la différence, même avec ses pairs. C’est survivre à une rupture artérielle non opérable, intouchable … C’est laisser agir les bétabloquants et le temps. Ce que le Syndrome d’Ehlers Danlos défait, le Syndrome d’Ehlers Danlos protège !
Atypique, c’est le mot qui résume et illustre cette maladie du tissu conjonctif.
Relax ! Je ne suis pas contagieuse, juste hyperlaxe ! Cette excentricité n’interdit pas de l’être, ni de rire, ni d’offrir des sourires et d’exploiter sa créativité … »

Vanessa.

Merci à Luna Muller pour cet article

Je vous renvoie également vers cet article publié par Isabelle Perito

4 comments on “Petit point sur le Syndrome Ehlers Danlos

  1. 2 de mes grands enfants sont atteints du SED que je leur ai transmis, mais les symptômes sont différents chez tous les 3. Les symptômes communs sont les douleurs et une fatigue intense : se lever fatigué tous les matins ! Mon fils souffre énormément d’une très forte scoliose, de douleurs abdominales, problèmes respiratoires, et je ne sais pas tout. Pour ma fille de 21 ans qui vit avec moi, c’est bien plus important. On ne sait jamais de quoi sera faite une journée. Fauteuil, pas fauteuil (mais de plus en plus), morphine ou pas. Et perte d’audition très importante, perte totale de la vue d’un oeil, et aux 3/4 env de l’autre, luxations quotidiennes, migraines, problèmes urinaires, respiratoires, gastro-intestinaux, de peau. Mais devant les gens elle garde le sourire malgré tout, elle essaie de profiter des moments de bonheur que la vie lui réserve, même si elle doit le payer après. Elle se heurte aussi à l’incompréhension des gens quand elle se lève de son fauteuil : quoi, cette fille simule le handicap, quelle honte ! Pour beaucoup de gens, fauteuil roulant =paralysie ! mais non, c’est aussi synonyme de maladie qui empêche de marcher sous peine de luxation, ou par épuisement. Sans fauteuil, beaucoup de malades atteints du SED ne pourraient pas sortir de chez eux ! ah j’oubliais : quelle impuissance de voir son enfant se tordre de douleurs et supplier que ça s’arrête, alors qu’il n’y a rien à faire ! quand on a déjà essayé tous les traitements les plus forts et que rien n’est efficace, quand le centre anti-douleurs vous dit : on ne peut plus rien faire pour vous !
    mais quand la crise est passée, on recommence à sourire, jusqu’à la prochaine fois

  2. Description complète et détaillée de ce syndrome qui nous use ,nous épuise, nous ronge, mais ne nous empêche pas de rebondir et de pouvoir VIVRE de bons moments, de partager une sortie, un resto, et de rire. Car nous rions même du SED, bien sûr, il le faut bien ! Je pense que beaucoup de malades se reconnaîtront dans les différents témoignages, et cette publication aidera peut être des personnes en errance thérapeutique, ou en attente de diagnostic à pouvoir mettre un MOT sur leurs MAUX.
    Le regard des autres est pesant, insistant, interrogateur, douloureux, mais je garde l’espoir de changer ce REGARD.

  3. je confirme….nous sommes 10 dans la famille à souffrir de ce syndrome…les signes sont différents pour chacun d’entre nous.Le handicap nous touche de différentes manières, mais nous continuons tous à vivre le plus normalement possible. Nous sortons au restaurant, nous voyageons à travers le monde (New York prochainement pour ma soeur, Jérusalem pour moi en Octobre), ballades, excursion, concerts….Je travaille 35 h par semaine parfois plus, mon poste est aménagé et je peux donc continuer à avoir une vie sociale normale!!!!
    Les hauts, les bas on connaît , mais la bonne humeur reprend vite le dessus…courage à tous et à toutes.

  4. Le SED …..J avais bien fait quelques recherches pour expliquer mes nombreux symptômes sans lien apparent mais il y avait toujours un truc important pour un diagnostic qui ne collait pas ….en fait je suis encore très souple surtout aux extrémités mais certains mouvements me sont difficiles comme me pencher à cause d un syndrome de Cyriax que j ai depuis l âge de 8 ans ..une brique lancée par un gamin …les côtes flottantes droites bougent ,s entrecroisent ,touchent ou pincent un nerf ça peut durer deux minutes ou deux jours ou deux semaines ou …j évite donc ce mouvement par anticipation de la douleur pas bien je sais car je me crispe davantage …et ça coince aussi ailleurs ! à mon âge je devrais pourtant pouvoir me raisonner ..mais non !
    Etre souple n est pas un cadeau quand cela s accompagne de douleurs, d instabilité à la marche , d arrachements osseux , un jour les membres lâchent ,le lendemain pour compenser les muscles se contractent …….tout ça n est pas bien visible sauf pour un médecin de rééducation qui connait bien la mécanique du corps humain et les points gâchettes …
    Le collagène est partout , il y a la partie invisible du SED ,la pire :ce qu il provoque à l intérieur …il titille les nerfs,nous empêche de respirer ,de manger ,il peut rendre anorexique ou boulimique ,un jour hypertension la semaine suivante hypotension ……difficile de vivre avec ce corps versatile .
    Le SED ne se voit pas sur une prise de sang mais il y a quand même eu des examens et des manifestations qui auraient pu mettre les médecins sur la piste s ils ne s étaient pas chacun cantonnés à leur spécialités et avait fait l anamnèse complète et documentée ..aucun médecin ne s est préoccupé du fait que j ai eu deux grossesses avec fissure de la poche des eaux et donc deux prématurées, pas plus qu on ne m a demandé si il y avait des antécédents familiaux …mon père est mort sans connaître son mal ,rupture d anévrisme sans signe avant coureur, il avait pourtant beaucoup des symtômes .
    Quand on me demandait de décrire mes bizarreries et mes douleurs on me disait « pas possible « et si je donnais la version courte, c est à dire l endroit le plus douloureux sur le moment cela seul était pris en compte .
    Certaines anomalies sont quand même visibles à l œil nu et sur mes scintigraphies ,échographie ,scanner et IRM (télangiectasies, nodosités d heberden,kystes de bouchard,kyste poplité , synoviaux et en tous genres ,algodystrophies,calcification des enthèses,hémangiome caverneux cérébral ,ostéophytose trochitérienne,emphysème pulmonaire,…..)
    Le SED cet inconnu méconnu qui a pourtant ponctué toute ma vie ….j étais » pas comme une autre » je tombais tout le temps et c était la grande époque du mercurochrome ….la chanson « j aime tes genoux » ne m est pas dédiée …et personne dans la famille n a pensé à prendre d actions dans les pansements .
    Si je témoigne ce n est pas pour me plaindre , l humour et la dérision sont mes meilleurs remèdes non si je témoigne c est parce que peut être ,il y en a parmi vous qui ont ce syndrome et risquent d avoir des traitements inadaptés qui majorent les symptômes voire des opérations ….une opération du canal carpien a tout chamboulé .
    la tentation est de rester couché à attendre des jours meilleurs , il ne faut pas d une part l amélioration est hypothétique , en plus nous sommes hyperactifs et hyperlaxe …..les douleurs sont alors majorées .
    j aurais préféré savoir que j avais le SED cela m aurait permis de moins galérer lors des grosses crises on appréhende mieux un mal que l on connait et puis c est vrai même si c est contraignant je respire mieux,je m épuise moins ,je suis plus stable avec tous les traitements mis en place ….pour les douleurs c est mitigé .

    et puis et là c est dur à encaisser ma fille cadette est atteinte ….je me pose des questions dont je n aurais jamais la réponse …aurais je eu des enfants si ……mais la vie continue il faut la vivre au mieux même si c est en pointillé .

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