Je me souviens quand j’étais petite, j’avais des étoiles pleins les yeux quand je regardais mes cousins danser sur le bitume. Ils dansaient tout le temps, ils dansaient partout. Et ils dansent toujours.
La danse hip-hop m’a toujours fascinée. Originaire d’une cité, j’étais constamment plongée dans cette culture que, malgré tout, je ne me suis jamais appropriée. Je n’ai toujours été que spectatrice de tous ces mouvements que j’admirais. Je pense que je n’ai tout simplement pas la fibre. Celle qui permet de danser comme si la vie en dépendait. Alors tout ce que je pouvais faire c’était observer. Et les années ont passé. J’ai voulu recommencer comme une passionnée grisée, comme une droguée à peine sevrée. J’ai replongé.
Rendez-vous au Trèves Dance Center. Rendez-vous en enfance.
Quand je passe les portes de l’école de danse sur le Boulevard de Trèves, la musique résonne déjà et j’ai le sentiment d’être revenue dix ans en arrière. Finalement, c’est Yann Abidi qui m’accueille et me raconte un peu son parcours. Humble, il m’explique qu’il vient de Lyon et qu’il danse depuis une vingtaine d’années. « J’ai appris à danser tout seul avec mes potes. On s’entraînait ensemble. Mais c’était pas comme aujourd’hui avec Internet et les écoles de danse qui proposent de plus en plus de cours de break. Maintenant on peut plus ou moins avoir de l’aide pour apprendre », confie-t-il. Son palmarès n’est pas des moindres : plusieurs fois gagnant de compétitions internationales, Yann a exploré et explore encore tous les aspects artistiques de la danse. Il a d’ailleurs participé à la récente comédie musicale Robin des bois. « La danse c’est ma vie tout simplement. Et quand ma vie déconne, il y a la danse pour me relever. »
Et puis le cours commence. Parmi les gamins, il y a déjà des futurs prodiges et comme toujours, ça m’impressionne. Comme toujours j’observe. Mais cette fois, à travers l’objectif de mon appareil. L’heure passe vite et la fin du cours approche à grands pas. Finalement, c’est quand je m’apprête à partir, estimant avoir assez de photographies, que des danseurs un peu plus âgés entrent en scène. Face aux immenses miroirs, ils commencent à s’échauffer. Et là, forcément, je mitraille. Je me faufile un peu partout pour utiliser tous les angles possibles du studio. Ils jouent le jeu. Quand l’un d’eux s’arrête, un autre prend la relève et m’en met plein la vue. Je ne veux plus lâcher mon appareil de peur de louper une miette de leur talent. Et je me sens un peu comme une gamine le matin de Noël.
Rataclan de leur petit nom. C’est ainsi que les quatre jeunes hommes se présentent. Brandon, Samuel, Roland et Cédric font partie de ce fameux groupe qui compte en tout huit danseurs originaires de Thionville. Tout comme Yann, la danse, ça a commencé dans la rue, sous un porche. « Au début on s’entraînait tout seul. Rataclan ça part d’abord d’un groupe de potes et puis après certains profs nous ont aidés. Maintenant on essaie un peu de se faire connaître », raconte Brandon. « La danse c’est vraiment une passion, c’est pas juste un passe-temps. »
L’adage dit que toute bonne chose a une fin et comme quand j’étais gamine je suis repartie des étoiles pleins les yeux.
Photos © Nadège El Ghomari