Le journal du professeur Blequin (57) Galères…

Vendredi 16 mars

15h : On se sent le roi du monde, quand on a été copieusement applaudi et félicité pour son travail d’artiste ! Mais c’est pour mieux tomber de son trône le lendemain… Aujourd’hui, j’essaie de vendre mes talents graphiques à la patronne d’un pub irlandais et je m’attends au chaleureux accueil que je reçois habituellement quand je me présente dans les bars. Douche froide : elle m’avoue franchement que la caricature que j’ai faite d’elle et de ses filles ne lui plait pas et que, de toute façon, ses filles sont elles-mêmes étudiantes en art et qu’elle a donc tout ce qu’il lui faut…  Saint Patrick ne m’aura pas porté chance, ce qui prouve peut-être que les saints n’existent pas (mais je m’en doutais déjà avant).

17h : Je revois mon directeur de thèse à qui j’avais donné rendez-vous pour une interview à l’occasion de la sorte d’un essai sur Heidegger, écrit à quarte mains en allemand et en italien, et traduit en français par ses soins. Je ressors de l’entretien les larmes aux yeux : cet homme, que j’admire profondément, m’a annoncé qu’il prenait sa retraite à la fin de l’année civile, me confirmant que l’enseignement « usait » (ce que je savais déjà avant) et qu’il comptait passer ses vieux jours au Mexique… Faut-il qu’il ait envie de tourner définitivement la page ! Puisse-t-il connaître, comme dit la chanson, la fin du blues dans le port de Vera Cruz… Pour ne rien arranger, il me propose de récupérer certains livres qu’il ne compte pas emporter là-bas : ça ressemble fort à un passage de relais… Je réalise soudain que je n’avais pas vraiment compris, jusqu’à présent, ce que ressent le « petit scarabée » quand son maître lui annonce qu’il est prêt, et je peux vous assurer d’une chose : quand ça lui arrive, le disciple se sent surestimé.

Photo prise en janvier 2015 dans une galerie d’art. Je portais les cheveux courts à l’époque, ça date…

Samedi 17 mars

19h : Je regagne le doux cocon familial à l’issue d’une journée décevante où j’ai fait un nouveau déplacement pour donner une animation « caricatures » : très franchement, je n’aurais jamais cru les organisateurs, que je connaissais pourtant par ailleurs, capables de me forcer à m’installer dans un nid à courants d’air et même de me rabrouer quand j’essaie d’occuper un coin plus chaud ! C’est tout juste s’ils ne m’ont pas dit « on est déjà bien gentil de vous laisser venir » alors que ce sont quand même eux qui m’avaient appelé… Sept heures à me les geler pour recevoir quatre clients ! Ce n’était pas la peine de m’associer à un événement, je pouvais aussi bien rester dehors à faire la manche, le résultat aurait été le même ! Jeudi soir, j’étais un seigneur, samedi soir, je suis une merde ! On dit que la vie des artistes est une vraie galère : elle le serait un peu moins si ces gens infoutus de tenir un crayon étaient un peu plus respectueux ! En tout cas, j’estime avoir passé l’âge de me laisser traiter comme un clodo auquel on accorde l’aumône et c’est pourquoi j’ai décidé que les conditions auxquelles j’accepterais, à l’avenir, de participer comme caricaturiste à ce genre d’événement, deviendraient sensiblement plus drastiques. ‘Faut pas déconner non plus, après tout ! Pour connaître mes nouvelles conditions, cliquez sur ce lien.

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