J’ai vu Ségolène Royal en vrai

Ce fut l’événement de la semaine à Brest : notre ambassadrice des Pôles est venue signer son livre Ce que je peux enfin vous dire dans la plus grande librairie de la ville. Il n’y avait pas autant de monde que pour François Hollande mais la salle était quand même pleine à bloc, tout le gratin local était présent, même notre bon vieux Pierre Maille (maire de Brest de 1989 à 2001) était sorti de sa retraite pour la saluer.

Croyez-le ou non, mais l’assistance l’a acclamée à son arrivée ; il fait dire qu’elle est toujours aussi belle : port altier, silhouette grâcieuse, elle a gardé ce physique à mi-chemin entre Gisèle Bündchen et François Mitterrand qui avait tant enthousiasmé les militants socialistes après sa victoire en Poitou-Charentes en 2004. Mais si on en croit ce qu’elle nous a raconté ce soir-là, être une femme trop belle peut être un handicap dans le milieu politique français où dominent encore les mâles blancs primaires (pour être poli).

Si vous lisez son livre, vous saurez, entre autres dans quelles circonstances, alors qu’elle était députée des Deux-Sèvres, elle a été traitée de « vache folle » par un autre élu –  il s’est bien trouvé un importun dans la salle pour lui dire « maintenant, vous ruminez », il s’est fait huer, bien fait pour lui. Que dire d’Alain Duhamel qui, pour se justifier de ne pas l’avoir incluse dans sa liste des présidentiables, a osé dire « je ne m’intéresse pas aux histoires d’alcôves » ? Quant à ses « alliés » socialistes, ils ont été absolument abjects : alors même qu’ils se gargarisaient de beaux discours sur la parité, ils n’ont jamais accepté de la soutenir en 2007 et ont d’ailleurs préféré aller faire joujou avec Sarkozy à la première occasion. Le soir même du dépôt de sa candidature au Conseil constitutionnel, Michel Rocard lui-même (décidément, personne n’est parfait) était allé la trouver pour lui ordonner de se désister en sa faveur – l’anecdote a été corroborée par la veuve de l’ancien premier ministre… Malgré tout, elle s’est accrochée jusqu’au bout ; il faut donc lui laisser ça : elle est tenace.

Il fut donc en grande partie question du statut de la femme et de l’égalité mais le deuxième grand sujet traité ce soir-là fut celui de l’écologie : elle s’honore d’avoir été l’une des premières à prendre cette question au sérieux, ce qui est assez vrai ; cela dit, il est un fait dont la presse locale ne s’est pas fait l’écho : avant son arrivée, une libraire avait détaillé le timing au public et souligné qu’il était serré pour la bonne raison que madame Royal avait… Un avion à prendre. Voyager en avion, voilà qui n’est pas très écologique, ou je me trompe ? Bon, on peut lui accorder le bénéfice du doute : dans l’absolu, il n’y a rien d’anormal à ce qu’une personnalité politique de premier plan, qui occupe encore aujourd’hui des fonctions importantes, ait un emploi du temps chargé qui l’oblige à employer des moyens de transport rapides ; ce n’est pas comme si, à l’image de certains, elle allait passer le week-end à Tokyo.

Bref, à mon avis, Ségolène Royal mérite d’être caricaturée, comme n’importe quelle autre politicienne, mais certainement pas en gourdasse comme le font ses adversaires et les comiques couchés – c’est tellement facile, dans ce pays de talibans, de mettre les rieurs des son côté en traitant une femme plus bas que terre ! Je peux me tromper, mais je ne pense pas qu’elle mérite d’être haïe ou méprisée. Quoi qu’il en soit, je n’ai pas acheté son livre, mais je n’allais pas rater cette occasion de la dessiner sur le vif et de lui montrer le résultat : mon dessin semble l’avoir suffisamment enthousiasmée pour qu’elle le signe spontanément (je vous jure que je ne l’ai pas demandé) entre deux livres que lui tendaient les chasseurs de dédicaces ; je ne pense pas qu’on puisse faire ça avec n’importe quel ancien ministre…

Mon dessin signé par Ségolène Royal.

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