Le journal du professeur Blequin (125)

La place Guérin

Mardi 15 septembre

10h : J’ai un livre à rendre à la médiathèque de la place Guérin ; je pensais naïvement que dix heures serait un horaire d’ouverture décent pour ce genre d’établissement, mais une fois sur place, je constate que la médiathèque n’ouvre qu’une demi-heure plus tard… J’avoue que la logique présidant à la détermination des horaires d’ouverture des bâtiments publics m’échappe un peu : j’avais déjà fait un constat similaire concernant les bureaux de poste… Quoi qu’il en soit, ce contretemps n’est pas fait pour arranger mon humeur ; en effet, il fait très chaud pour une mi-septembre à Brest et je me suis habillé un peu trop chaudement, dupé par l’humidité qui semblait régner ce matin. Il parait que la vague de chaleur devrait continuer jusqu’à vendredi : j’aimerais être plus vieux d’une semaine, ayant eu ma dose d’ambiance estivale pour cette année.

10h30 : Pour ne pas poireauter devant l’entrée de la médiathèque, je suis descendu jusqu’à Bureau Vallée afin de faire scanner une affiche que j’ai finalisée hier. Une fois arrivé, je tombe sur un os : au lieu de prendre en charge mon dessin comme j’en ai l’habitude, la jeune femme qui assure l’accueil me dirige vers un des postes informatiques mis à la disposition des clients pour y imprimer des documents, lequel ordinateur est relié à une photocopieuse qui peut aussi numériser les images. En clair, je dois faire tout le boulot moi-même, ce qui est d’autant plus déplaisant que face à cette machine, je suis aussi démuni que Depardieu face à une bouteille d’eau ! Bref : non seulement on m’a obligé à m’attarder dans ce magasin, bien entendu avec ce maudit masque sous lequel j’étouffe, mais, par-dessus le marché, j’ai dû payer (pas très cher, encore heureux) pour faire le travail du personnel qualifié, qui plus est sans même bénéficier d’une quelconque formation préalable… Cerise sur le gâteau, quand je fais la queue pour régler ma note, les hauts-parleurs, entre deux rasades de soupe musicale, nous assènent un message de prévention rappelant une énième fois les sacro-saints « gestes barrière » ; je craque et je crie : « je sais » ! Quand je sors du magasin, je remonte vers la médiathèque, mais je suis d’humeur massacrante : à la moindre contrariété supplémentaire, j’explose ! Sincèrement, le monde évolue d’une façon qui me fait beaucoup plus peur que tous les virus du monde !

23h30 : Je rentre tard ; pour me changer les idées, je suis sorti assister à la répétition d’une troupe musicale dont j’étais devenu un compagnon de route, ce qui m’a permis de retrouver pendant quelques instant la vie ouverte et créative que j’apprécie. Les horaires des bus après vingt heures étant ce qu’ils sont, je suis obligé d’attendre une correspondance sur la place de la Liberté, et je constate alors qu’il y a encore du monde sur la terrasse de la Petite poésie ; je me dis que si nos dirigeants comptaient sur l’épidémie pour faire de nous des petits Chinois dociles qui consacrent leurs loisirs exclusivement à reconstituer leurs forces pour mieux travailler, c’est un peu raté.

 

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