Le journal du professeur Blequin (130)

Croquis de cactus ramené de mon week-end (le croquis, pas les cactus).

Mercredi 30 septembre

17h : Après un week-end au Faou et dans ses alentours, suivi de deux jours (et demi) de réclusion volontaire, je ressors enfin de mon doux foyer, alors que le soir tombe déjà, pour retourner aux cours publics des Beaux-arts de Brest. Malgré le temps automnal (pluie et vent), je fais quand même la route à pied jusqu’à l’école, plus exactement l’annexe : comme il faudra passer tout le cours avec un masque, autant prendre un bol d’air avant. J’ajoute à la difficulté en portant une chaise pliante dans le but est de m’asseoir à l’entrée de l’école pour pouvoir profiter des visages de la prof et de mes camarades avant le début du cours.

Je connais cette demoiselle, je vous assure qu’elle est très jolie… Ben oui, il n’y a pas de raison que je sois le seul à être frustré !

18h : L’heure du cours a sonné, il est en temps d’entrer. Comme je suis le seul à avoir eu l’idée idiote d’arriver en avance, je n’ai pu profiter d’aucun visage et les retrouvailles, qui se font à l’intérieur, me laissent un goût pour le moins amer d’autant que, pour nous exercer, la prof nous demande de nous dessiner les uns les autres… Dessiner des gens sans visage, c’est très frustrant, je préférerais encore m’exercer sur des légumes !

Jeudi 1er octobre

11h : Alors que je viens de finir mon ménage, je constate que Brest Métropole Habitat fait clouer des plaques de bois sur la porte et les fenêtres du taudis dans lequel vivait la vieille folle qui me jetait des boîtes de conserve : je sais que je ne devrais pas parler comme ça d’une personne qui est plus à plaindre qu’autre chose, mais j’avoue que je suis soulagé d’en être débarrassé ! Est-elle morte ? A-t-elle été placée dans un établissement spécialisé ? A-t-elle été expropriée et prise en charge par sa famille, si elle en a ? Je n’en sais rien et je ne veux pas le savoir ! J’attire suffisamment de cas sociaux qui me prennent pour leur providence, je n’ai pas besoin de prendre en charge AUSSI ceux qui me sont hostiles…

14h40 : Je sors de chez un vieil ami que je n’avais pas revu depuis mon retour de vacances et qui avait besoin de mes services de correspondant de presse. J’avais fait l’aller à pied, je décide de rentrer en bus pour ménager un brin mes muscles : un bus me passe sous le nez, je me dis que j’en serai quitte pour attendre le suivant… Qui ne doit arriver qu’une demi-heure après ! Pour ne rien arranger, je constate que le premier bus avait déjà dix minutes de retard…

15h20 : Toujours pas de bus en vue ; à bout de patience et crispé par le froid, je décide de repartir à pied ; j’en profite pour faire un crochet chez Artéis pour acheter du papier. Au final, je rentrerai chez moi vers seize heures, donc pas beaucoup plus tard que si je m’étais obstiné à attendre le bus. Voilà un argument supplémentaire pour préférer la marche à pied aux transports en commun : mes jambes ne sont jamais en retard, elles ! N’empêche que j’aurais aimé savoir ce qui retardait à ce point les bus de la ligne 6…

Geneviève Gautier vue par votre serviteur.

16h : Avant de partir, j’avais entrepris de déposer un tapuscrit de Geneviève Gautier sur une page du site des éditions Plon, prévue à cet effet. Plus de deux heures après, ce fichu fichier n’a toujours pas fini de charger ! Pire, il en est toujours au même point qu’à mon départ ! C’est alors seulement que je constate qu’il est trop lourd pour cette page : j’entreprends de le comprimer, mais il dépasse toujours le maximum indiqué… Un peu découragé, je laisse tomber et décide de me tourner vers un éditeur qui en est resté à la correspondance papier : il n’empêche qu’imposer de passer par un formulaire en ligne, ça sent fort la politique de l’entonnoir pour ne pas laisser passer les écrivains pauvres et / ou fâchés avec l’informatique…

Vendredi 2 octobre

14h : Je dois faire cours à la fac dans une heure et demie, je décide de me préparer à partir. En réunissant mes affaires, je constate que mon adaptateur HDMI-VGA a disparu ! Comme j’en ai absolument besoin pour projeter des images aux étudiants (essayez de faire un cours sur la BD sans images, pour voir), je n’ai pas d’autre choix : je dois passer à la Fnac sur le chemin de la fac. Me voilà donc contraint de faire ce que je déteste le plus au monde : agir dans l’urgence… Faut-il que j’aime le travail bien fait, quand même !

Kris vu par votre serviteur.

15h25 : Le scénariste Kris, qui vient de finir son heure et demie de cours, me passe le relai. Je suis d’humeur chafouine, la chance n’ayant pas été de mon côté au cours de ce marathon pour un adaptateur : le bus avait cinq minutes de retard, il a été ralenti de plus belle par un bataillon de lycéens monté au niveau de Kerichen (c’est bien la peine d’éviter les heures de pointe), et, bien sûr, il y avait la queue à la Fnac. Pour ne rien arranger, ce malheureux adaptateur m’a coûté trente euros, un prix passablement prohibitif pour ce genre d’accessoire. Je me demande pourquoi il y en a qui dépensent de l’argent pour aller voir des blockbusters au cinéma : la vie quotidienne est déjà assez riche en émotions forte ; d’ailleurs, « Marathon pour un adaptateur » serait un beau titre de film ! ce n’est que mon point de vue d’hypersensible, bien sûr… N’empêche que quand je prends la parole devant les étudiants, je préfère les mettre en garde tout de suite et leur dire qu’il ne leur servira à rien de me critiquer sur mon débit oratoire pour la bonne raison que je fais ce que je peux derrière ce maudit masque et que ce n’est pas de ma faute si mon cerveau va plus vite que ma langue… Je constate qu’ils sont moins nombreux que la dernière fois : tant mieux, seuls les plus motivés viennent !

17h : Fin du cours. Avant de partir, une jeune fille demande à me questionner. M’attendant à un énième interrogatoire angoissé sur les partiels, je lui dis qu’il faut s’adresser au responsable de l’UE : je suis injuste avec cette demoiselle puisqu’elle vient me demander quelle formation elle doit suivre pour devenir professeur d’art. Bien entendu, je ne peux pas lui répondre de façon satisfaisante : je ne suis pas prof d’art et, en tant que dessinateur, je suis autodidacte ; je profite quand même pour lui dire que si enseigner l’art nécessite une formation déterminée, en revanche, pour dessiner, la meilleure école reste l’apprentissage sur le tas. Elle me montre ses dessins : un visage visiblement inspiré de ceux des mangas et un essai de calligraphie inspiré des « graphs » (désolé si ça ne s’écrit pas comme ça) muraux. Il y a du boulot avant de développer un style vraiment personnel, mais c’est normal pour une gamine de son âge ; déjà que je ne suis pas sûr d’en avoir un moi-même…

17h30 : Petite pause au Béaj Kafé histoire de découvrir l’exposition « La Lorgnette » à laquelle j’ai participé, tout en savourant un chocolat chaud : ma contribution, un petit livret imprimé et relié par mes soins est mis en valeur sur le piano de la salle. Au moins cette semaine m’aura-t-elle apporté cette satisfaction !

One thought on “Le journal du professeur Blequin (130)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *