Qu’il semble loin le temps où Philippe Val participait aux galas de financement de Libération ou refondait le politiquement incorrect magazine Charlie Hebdo.
Aujourd’hui, Philippe Val a semble-t-il enterré bien profond ses convictions dans le but de servir ses propres intérêts. Certains diront qu’il a poussé le cynisme à son paroxysme, d’autres qu’il va simplement là où le vent souffle.
Il y a tout d’abord ses nombreuses critiques envers l’extrême gauche qu’il accuse de proximité avec les islamistes et même d’une forme d’antisémitisme larvée. Il a encouragé le recours à la force au Kosovo et voter oui au référendum sur le traité européen de 2005.
Au fil des années, le faux gauchiste s’est installé dans le costume d’un patron , et pas du genre paternaliste.
En juillet 2008, il débarque Siné de Charlie Hebdo pour des propos selon lui antisémite :citons « Jean Sarkozy vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée juive et héritière des fondateurs Darty. Siné ajoute cette phrase : Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! ; antisémite ça ? pour Val en tout cas , c’est le cas , et plus soucieux de ne pas froisser Sarko que les musulmans, il prendra la mesure qui s’imposait à sa moutonite aïgue. Dans cette affaire il reçoit le soutien d’éditorialistes du Figaro , de Libé , mais aussi celui de Bernard Henry-Lévy à qui il renverra l’ascenceur : alors qu’en 1998 il disait de BHL qu’il était ’l’Aimé Jacquet de la philosophie » il encensera « ce grand cadavre à la renverse » , le livre paru en 2007 de l’inoubliable coupable du massacre cinématographique qu’a été le film « le Jour et la nuit »
Auparavant , Lefred-Thouron avait claqué la porte du magazine en 2000 parce que l’un de ses dessins avait été censuré par Val. On pourra évoquer également la censure qu’a exercé Philippe Val sur tout ce qui touche à l’affaire Clearstream et pour cause : l’avocat de la société luxembourgeoise était aussi celui du journal.
Le grand dada de Philippe Val , c’est l’islamisme ; il s’est clairement inscrit dans la dichotomie américaine de l’axe du bien et de l’axe du mal.
Ainsi Corcuff, chroniqueur poussé vers la sortie en 2004 disait-il :Recourant à des amalgames répétés entre l’islam comme religion, les différents courants de l’islam politique, l’intégrisme et le terrorisme, Charlie Hebdo – hormis quelques courageux résistants de la nuance et de la complication – s’est inscrit dans une croisade de la Civilisation (“européenne”) contre la Barbarie (“musulmane”). Dans cette perspective, on a été jusqu’à publiciser une fausse rumeur à propos du Forum Social Européen de Londres, où on a fait de ceux qui ne participaient pas à la nouvelle croisade (comme la LDH) des “alliés objectifs” des intégristes islamistes, en remettant ainsi à l’honneur une formule d’origine stalinienne.
Pascal Boniface, directeur de l’IRIS (Institut de Relations internationales et stratégiques) constatait à propos du positionnement de Val :
Sharon et Bush sont ses héros positifs, ceux qui osent les critiquer sont selon lui complaisants avec les terroristes. Dans la grande bataille des idées à laquelle nous assistons, Val constitue un élément important. La tonalité ironique du journal, les dessins humoristiques lui permettent de vendre l’idéologie néo-conservatrice contenue dans ses éditoriaux à un électorat qui n’aurait pas naturellement penché de ce côté.
En 2000, Val avait viré Mona Chollet ; son crime : s’être insurgé contre un édito du grand chef où celui-ci qualifiait les palestiniens de « non-civilisés » ; et elle disait suite à son renvoi : Il est tellement ignorant des autres cultures qu’il n’imagine pas qu’on puisse être “civilisé” autrement qu’en lisant Spinoza avec ses chats sur les genoux et de continuer :Quelques jours après, il m’a convoquée, et il m’a annoncé qu’il arrêtait mon CDI après le mois d’essai, alors que j’étais pigiste depuis un an. Ça m’a sidérée. Il ne m’a pas dit pourquoi, mais ça crevait les yeux. Finalement il m’a dit : “je ne suis pas sûr que tu sois en accord avec la ligne que je veux donner au journal”. Je suis encore restée à Charlie quelque temps, mais en tant que pigiste, c’est-à-dire moins en position d’ouvrir ma gueule.
Olivier Cyran , qui a travaillé de nombreuses années à Charlie Hebdo nous raconte également qu’un maquettiste que Val pensait digne de confiance avait été missionné pour lui rapporter les propos des dissidents au sein de la rédaction ; mais lui aussi finira viré…
Aujourd’hui , Val est devenu directeur de France Inter , une belle prise du sarkozysme selon Luc Chatel ; il faut dire que le poisson est prêt à mordre à n’importe quel hameçon pourvu qu’un peu de pouvoir soit à la clé.
Qui sera sa prochaine victime ? on mettrait bien une petite pièce sur la tête de Guillon , Val s’interrogeant dernièrement « Le problème n’est pas Stéphane Guillon en soi, c’est sa place. Il n’est écrit nulle part que l’humour doive intervenir à 7h55 .Jusqu’où peut-on aller dans ce mélange sans nuire à l’information ? Le chantier est en cours, mais c’est une vraie interrogation ». On croit connaitre la réponse : ce mélange ne peut aller plus loin que ne le veulent Sarko , Besson and co…
Laissons le dernier mot à Olivier Cyran :
La liberté d’expression n’est pas négociable », bonimente Val à la télé. C’est vrai, à quoi bon négocier avec ses contradicteurs quand il suffit de s’en débarrasser ?
P.-S.
Siné hebdo n’est plus…Denis Robert s’exprime à ce sujet :
» Siné Hebdo, last chronique. »
Pour cette dernière tournée, je voudrais remercier mes deux amis Philippe Val et Richard Malka. Sans eux, l’aventure Siné Hebdo n’aurait jamais vu le jour. Un édito de Charlie Hebdo a mis le feu aux poudres voici deux ans. Une page où Val recrachait les inepties débitées par l’avocat de Char…lie (et de Clearstream)- avec un supplément Chantilly : il comparait mon travail au « protocole des Sages de Sion ». C’était super classe d’autant qu’à l’époque, j’étais écrasé par les frais de procédure et mis en examen pour recel de vol sur plainte de ce même Malka. A Charlie, une partie de la rédaction rasait les murs. Seul un vieux pirate l’a ouvert en grattant quelques lignes pour dénoncer cette bassesse. Elles sont restées au travers de la gorge des deux despotes qui ont sauté sur l’occasion pour chercher des noises à Siné. Mais on ne dégage pas un vieux pirate si facilement. Sans nous concerter, Bob et moi avons eu la même idée. Créer un journal. J’ai vendu l’idée à quelques amis. En appelant l’imprimerie, j’ai découvert que le vieux pirate avait eu la même. Et avait les mêmes amis que moi. Mon projet s’appelait Bonzaï. Le sien, Siné Hebdo. Respectueux de mes aînés, je me suis incliné. Nous arrivons au dernier numéro de la série. La situation est plus joyeuse que deux ans plus tôt. Charlie s’est débarrassé de Val. Malka n’a pas réussi me faire condamner. Je reste un sujet d’embarras pour lui, plus qu’il ne l’est pour moi. Au final ces duettistes peuvent parader dans les salons, faire illusion dans les prétoires, nous sommes de plus en plus nombreux à savoir qui ils sont. Mao Tsetoung disait L’arbre veut le calme mais le vent n’en continue pas moins de souffler. Nous sommes le vent quoiqu’il advienne. Eux sont dans le vent, quoiqu’ils entreprennent.