Chers lecteurs et lectrices, permettez-moi d’abord de vous souhaiter une belle année 2013, pleine de petits et grands bonheurs, de choses tendres et surtout pourvue d’une santé de fer!
Pour ce tout premier article de cette année, j’ai choisi de vous présenter quelqu’un que j’ai découvert il y a peu de temps: le photographe Olivier Liévin. Vous qui êtes des fidèles, vous me direz que ce nom ne vous est pas étranger, et pour cause! J’en avais parlé il y a peu dans les 2 articles que j’avais consacré à son ami Dom Colmé. Eh oui!
Alors qu’une exposition de ses oeuvres intitulée « Histoires de concert » s’est ouverte le 15 Janvier à la Médiathèque de Créhange, et ce jusqu’au 23 Février, je me suis entretenue avec Olivier afin d’en savoir un peu plus sur son art. Et sur lui finalement.
Conversation avec un artiste dont la discrétion est aussi grande que son talent…
Bonsoir Olivier! Merci d’avoir accepté de rencontrer le Graoully Déchainé pour nous parler de ton travail. Pour resituer un peu le contexte pour nos lecteurs, je t’ai découvert à l’occasion du concert de Dom Colmé en Décembre, où à cette occasion tu exposais quelques-uns de tes clichés faits avec lui lors de sa première partie de Cali. Alors comme j’ai l’habitude de le faire avec les gens que je rencontre, je vais te demander de te raconter un peu à nos lecteurs!
Eh bien je m’appelle Olivier et je fais de la photo depuis le Bac avec un appareil offert par mes parents à cette occasion. J’ai pratiqué à titre personnel pendant de nombreuses années comme tout un chacun. Et avec le temps je me suis passionné pour cet art dirons-nous…
Mais c’est un art!
Il y a parfois des polémiques à ce sujet.
Oui, mais pour moi c’est un art! Donc tu peux le dire comme ça!Tu as fait des formations?
Non, je suis totalement autodidacte, j’ai appris en lisant des livres, des magazines, en regardant le travail d’autres photographes et en essayant de faire pareil ou mieux.
Et est-ce que tu en as toujours fait ton métier, ou est-ce que c’était au départ une activité connexe?
Au départ c’était vraiment pour mon plaisir. J’ai eu l’opportunité de travailler pour une entreprise qui m’a sollicité et pour laquelle j’ai travaillé régulièrement pendant 4-5 ans. Et ça m’a donné l’idée d’aller un peu plus loin dans ce domaine. Donc maintenant je suis officiellement professionnel depuis Juin dernier.
Ah oui, c’est tout récent!
Oui, en tant que photographe-auteur tu es artiste, tu peux répondre à des demandes mais légalement tu ne peux pas démarcher. Si tu veux en vivre, à moins d’être très connu et voir les commandes pleuvoir toutes seules, il faut faire de la publicité et démarcher. Ce n’est pas compatible avec le statut d’artiste-auteur. D’où la nécessité de créer ton entreprise de photographe. C’est la loi française qui veut ça.
Je suis allée voir ton site Internet où j’y ai trouvé tout type de photos: de la macrophotographie, des animaux, des enfants, des hommes. Tu fais aussi beaucoup de photos pour des restaurants et autres commerces…
Oui, je travaille pour les entreprises, les collectivités et les particuliers. Tout le monde peut faire appel à mes services, bien sûr. En effet, j’ai travaillé pour le restaurant Thierry Saveurs deux fois. Sa confiance est un honneur pour moi. C’est quelqu’un d’exigeant.
Tu as un « monde photographique » très varié. C’est une forme de polyvalence finalement…
Oui, on m’a déjà fait la remarque, dans le bon comme dans le mauvais sens du terme. Mais je réponds toujours que je ne vois pas pourquoi je me limiterai à un seul sujet. Je trouve que tous les sujets sont bons à exploiter, même le plus simple des objets. Je prends beaucoup de plaisir à essayer de faire une belle image avec un objet banal.
Une façon de sublimer l’objet?
Oui, et d’ailleurs la macrophoto m’aide beaucoup dans cette démarche. On voit des choses que les gens ne voient pas dans le « très petit ».
ça exerce l’œil à voir autre chose…
ça me fait penser à certains jeux où il faut deviner l’objet sur une photo. C’est pratiquement tout le temps de la macrophoto qui en est à la base.
Par contre j’aimerai te faire une petite remarque: en regardant ton site je me disais que la femme était assez absente! C’est volontaire?! C’est très vexant pour nous les femmes, tu sais ça?! (Rires)
Tu regarderas sur Internet le nombre de photographes qui font des photos de charmes ou du nu…
Sans forcément parler de ce genre de photos là d’ailleurs! C’est un parti pris?
La photo de nu, je ne sais pas faire. C’est peut-être par pudeur, je ne sais pas. Après, pour les portraits de femme, portrait classique j’entends, c’est un hasard, tout simplement.
Tu ne veux pas poser toi?!
Euh…!!! (Rires)
Tu poses les questions, il faut que tu assumes!
Eh bien écoute… oui, s’il te faut un modèle, oui, pourquoi pas?! Je ne te dirai pas que je n’y ai jamais pensé! J’ai quelques idées pour un projet éventuel… Alors invitation lancée sous les yeux des lecteurs du coup! (Mais je me reprends!)
Et parmi les types de photos que tu réalises, est-ce qu’il y a un style de photos que tu « préfères », pour lequel tu aurais plus de sensibilité, plus de plaisir? Parce que j’imagine que la macro, tu l’envisages peut-être plus sous la forme d’un loisir, alors que la photo promotionnelle sert l’image de quelqu’un d’autre. Donc automatiquement il y a plus d’enjeux…
C’est vrai qu’il faut séparer l’aspect travail personnel et artistique. Donc oui, la macro est un loisir. Mais avec le temps et la pratique, j’ai vraiment envie de les rendre plus artistiques. Je connais quelques photographes, et je vais citer Xavier Coulmier, qui est un très bon exemple, et qui fait de la macro, Son travail est véritablement de l’art. J’aimerai bien avoir le temps de poursuivre ça.
Il y a aussi les photos de concerts que j’ai découvert avec Dom (Colmé, NDLR), ainsi que d’autres spectacles comme le théâtre.
Mais pour tout ça il faut des accès. Pour les concerts, Dom m’a offert ça et surtout l’accès à la scène pendant son tour de chant. Le top !
Privilège maximum!
Oh oui c’est une grande opportunité !
Et tu peux peut-être te permettre une certaine folie sur les prises de vue, non? Explique-nous comment tu fais.
Oui, le choix des angles de prises de vues est plus large, mais l’éclairage est un facteur très important. Parfois l’éclairage ne varie pas beaucoup, d’autres fois il a une dominante pas très esthétique, très rouge comme à Montigny.
Oui mais du coup moi j’ai aimé. ça donnait un style aux photos! Ce rouge un peu passé, c’était vraiment chouette!
Mais parfois c’est trop. Par contre, du coup, le passage en noir et blanc allait très bien.
Ah oui, elles sont magnifiques!
Mais pour revenir au concert, c’est vraiment l’improvisation totale. La position du chanteur, on la connait. Mais au niveau de l’éclairage, tu ne peux rien prévoir. Par exemple, dans une salle comme le Galaxie où les effets sont très étudiés et très changeants, ça laisse l’opportunité de faire de très belles images si tu arrives à t’adapter aux modifications très rapides des conditions lumineuses. Alors on essaie de repérer un peu les cycles des couleurs. Il y beaucoup d’improvisation, c’est assez grisant. Tout comme le temps qui est très court. En une demi-heure du tour de chant de Dom il faut sortir des images, et des bonnes si possible. L’inspiration n’est pas toujours au rendez-vous. Le spectacle commence sans toujours savoir ce que tu vas faire, alors il faut se lancer. Finalement tu prends l’appareil devant les yeux et ça vient. C’est dans l’instant, tu es dans le présent.
Mais c’est marrant, parce que quand j’ai revu tes photos à l’expo lors du concert de Dom, j’ai des bruits, des images qui me sont revenues! ça m’a replongé dans l’ambiance et je n’ai pas ça avec d’autres photographes de concerts!
ça me fait plaisir ça ! Alors j’ai peut-être réussi mon coup ! 🙂
Ce n’est donc pas étudié, ou est-ce que dans ta tête tu as quand même une idée précise?
Il doit y avoir une part d’expérience. J’ai repris mes premières photos et je remarque qu’en un an j’ai beaucoup évolué sans m’en rendre compte. Au niveau du réglage de l’appareil également. Maintenant, selon les situations, je sais tout de suite comment faire tel réglage. C’est parfois très technique dans certaines situations.
On progresse toujours de toute façon, rien n’est figé. C’est ça qui est intéressant. Et comme je te disais, j’essaie de me renouveler à chaque fois avec des photos en contre-plongée, avec téléobjectif, sur scène, avec le public… etc…
J’aime bien mettre le public sur les photos.
Oui, ça donne d’ailleurs une réelle impression d’une « triangulaire » entre Dom, son public et toi. Presque une forme d’intimité… ça représente bien la générosité que vous avez tout les deux aussi…
Généralement on se voit plusieurs heures avant le concert, on mange ensemble, Dom fait ses gammes dans la loges, on discute… Oui, c’est très intime. Je prends beaucoup de photos dans ces moments…
Tout à l’heure tu parlais et tu m’as gentiment amené ma prochaine question, je t’en remercie! Tu parlais de ce photographe que tu as pour modèle. Quels sont justement les modèles que tu pourrais avoir, autres que lui? Par exemple dans des photographes que les gens pourraient connaitre.
Disons que j’aime beaucoup les reporters. Doisneau aussi, évidemment. C’est presque banal de dire ça. Mais en allant voir l’expo Doisneau à Malbrouck, j’ai vraiment découvert d’autres images, c’était quelqu’un qui avait beaucoup d’humour.
Eh oui! Doisneau ne se résume donc pas qu’au « Baiser de l’Hôtel de Ville »!
Oh non! Il a même fait des photos dans l’industrie et les mines. De très beaux reportages sur ces thèmes.
C’est un aspect qu’on ne lui connait pas forcément puisque finalement, le fameux « baiser » surpasse tout.
Oui, ça et les photos d’enfants. Alors qu’il a fait beaucoup d’autres choses très intéressantes. Sinon, les reporters de guerres m’ont toujours impressionné. Sans avoir envie de le faire. Je trouve que ce sont des aventuriers. Comme Rémy Ochlik, qui faisait un travail formidable.
J’ai pu voir quelques photos, effectivement, c’est un sacré boulot qu’il a fait.
Rémy nous a quittés l’année dernière dans un bombardement en Syrie. Son site est encore actif pour voir ses photos…
Et au niveau du matériel que tu utilises, j’imagine que ce n’est que du numérique?
Oui. J’ai commencé avec l’argentique.
J’allais juste te le demander! Est-ce que c’est aussi un parti pris de ne faire que du numérique? Ou est-ce que tu vas doucement basculer vers l’argentique? Ce qui a aussi un certain charme d’ailleurs…
Non, parce qu’honnêtement je n’ai pas le temps pour l’argentique. Le numérique fait gagner énormément de temps. Tu peux faire beaucoup plus d’images pour un budget plus serré. C’est un progrès. Et puis je suis un peu un geek!!! C’est vrai que l’argentique avait son charme, mais personnellement je n’y vois plus d’intérêt, à part artistique peut-être. Beaucoup de gens aiment l’argentique parce que ça donne un grain tout particulier à la photo. J’aime beaucoup également. D’ailleurs, dans les photos faites avec Dom, je monte en sensibilité exprès pour retrouver ce grain, ça donne un certain cachet. C’est mon héritage de l’argentique. J’aimais bien utiliser les pellicules Kodak T-Max 400, très connues, qui faisaient vraiment un joli grain.
En parlant d’argentique, ça m’amène tout droit à parler du fait que n’importe qui puisse maintenant prendre une photo avec un smartphone et la remanier avec des applications type Instagram. Quel est ton avis de professionnel sur cette démocratisation de la photo? On entend beaucoup de photographes dire que quelque part c’est un peu du vol artistique, de leur travail, de leur talent.
Je trouve que c’est très bien. Je fais aussi des photos avec mon smartphone. On peut faire de belles photos avec n’importe quel appareil. Ce n’est pas l’appareil qui fait une bonne image. C’est clair, ça simplifie les choses quand les conditions de lumière sont compliquées, quand il n’y a pas beaucoup de lumière. Avec un smartphone, ça reste difficile, voire impossible.
Malgré tout il peut être intéressant de se plier aux contraintes de l’appareil. Je me rappelle il y a quelques années, lors d’un passage du Tour de France à Metz, j’avais pris plein de photos avec un appareil jetable du village du Tour. J’étais assez content du résultat. Même si avec ce genre d’appareil la profondeur de champs est totale, tu n’as pas de flou en arrière plan, prendre un sujet en mouvement est compliqué.
De la même manière faire des photos une focale fixe. Tu dois t’adapter à la contrainte technique.
Ah oui! Quand on regarde, notamment sur Instagram, le produit de ces photos, certaines sont très belles.
Je ne pense pas que ça fasse concurrence aux photographes. Peut-être aux journalistes ou à certains reporters sur des événements spéciaux sur des images « faciles ». Alors là n’importe quelle personne présente peut prendre les mêmes photos qu’eux et là oui, ça leur fait de la concurrence.
Olivier, on va pouvoir admirer tes photos…
(Il me coupe!) Admirer?! Je te laisse le mot, je ne peux pas dire ça!
Alors moi je le dis parce qu’elles sont vraiment très belles!
Merci, j’en profite pour parler de Valérie ma compagne qui m’aide beaucoup. J’ai beaucoup avancé grâce à son regard sur mon travail et son investissement.
Mais oui, je suis très dur avec mon travail. Je jette beaucoup d’images.
Tu es très exigeant sur ton travail…
Oui, si je veux faire monter le niveau, je n’ai pas le choix.
Donc tu es dans le perfectionnisme extrême!
Extrême, je ne sais pas. J’essaye. Mais je crois qu’il faut l’être. Le niveau des images qu’on trouve maintenant sur Internet est impressionnant. On peut se mesurer à des photographes du monde entier, c’est très motivant.
Avant cette grande digression, je disais qu’on allait pouvoir admirer ton travail du 15 Janvier au 23 Février, à la Médiathèque de Créhange…
Oui! Et Dom viendra chanter le 25 Janvier, lors du vernissage de l’expo.
Donc si on veut rencontrer l’artiste, c’est ce jour là qu’il faut être présent!
Oui, il ne viendra que ce jour!
Désolée pour Dom, mais je parlais de toi, là!!! C’est excellent! (fou rire)
Ah!!! Tu vois, j’ai du mal à me définir comme un artiste! Je n’ai pas la prétention d’être un génie de la photo. Ça me gène un peu, il y a tellement de très bon photographes.
Mais bon, ok, sur cette expo je veux bien admettre que mes photos soient artistiques !
Ce sera la même configuration que l’expo lors du concert de Dom?
Tout à fait.
Et j’imagine que pour avoir ces photos, c’est un tirage spécial, sur toiles…
Il s’agit de tirages numériques réalisés par un laboratoire professionnel, et contre-collées sur des plaques d’aluminium (dibond). C’est un matériau spécial qui évite à la photo de gondoler à cause des changements de températures qu’elle pourrait subir.
Ces œuvres que tu exposes: elles sont destinées à la vente ou tu les gardes?
Elles sont destinées à la vente. Celles présentées en expo ne sont pas directement à vendre. Il faut passer commande. La personne aura comme ça un tirage unique et neuf. Donc on peut acheter Dom Colmé en 3m sur 2 pour mettre dans sa chambre!
Mais je tiens à préciser qu’il n’y a pas que Dom en photo !
Avis aux fans! Attention!… Et où peut-on te suivre sur le web? Je crois savoir qu’il y a plusieurs pages, outre ton site…
Oui, j’ai mon site Internet: http://www.olivier-lievin.fr/
Il y a un blog aussi, qui est plus un journal photographique. Il y a également ma page Facebook à mon nom.
En ce qui concerne les expos, si les gens veulent te voir encore ailleurs qu’à Créhange, il y a des choses de prévues par la suite?
Oui d’autres lieux d’expo suivront bientôt. J’exposerai aussi les 24, 25 et 26 mai 2013 à Scy Chazelles au Festival de photo nature « Natur’emotions », à retrouver sur ce site : http://www.natureetcie.com/
Ce sera de la macrophotographie. Ma compagne aussi y exposera.
Mais la dynamique concert-expo marche très bien, je t’assure.
C’est très sympa en effet, mais il faut que nous soyons disponibles tous les deux. Dom a du succès maintenant, il est très demandé.
Il y a toujours moyen de se renouveler en plus. Les gens ne sont pas les mêmes, l’endroit non plus. Et puis je pense que tu te nourris aussi de l’ambiance, non? ça porte quand même…
C’est indispensable, vraiment. C’est important d’arriver à l’avance, de s’imprégner de l’ambiance. Je ne ferai pas les mêmes photos si j’arrivais tout juste au dernier moment, c’est certain. D’autant que j’adore faire des photos backstage aussi. J’en fais parfois tout autant avant que pendant le concert.
Olivier, on arrive déjà à la fin de cet entretien… Si tu as envie de dire quelque chose, je te laisse carte blanche. C’est devenu une habitude pour moi de fonctionner comme ça avec tous ceux qui se retrouvent devant moi, alors c’est à toi maintenant!
Merci Dom pour m’avoir fait découvrir ce monde. J’ai rencontré des gens sympas. Pour ne pas les citer: Stéphane, le bassiste de Dom, Gonzo le batteur, que j’adore d’ailleurs prendre en photos. J’espère en rencontrer beaucoup d’autres comme eux.
Merci beaucoup Olivier!
Merci à toi!