DES ARITHMOÏ ET DES GRAMMAÏ
LÉONIDAS ROMEJKOS : Mesdames et messieurs, kaliméra ! Souhaitons la bienvenue à nos deux candidats, Théophraste et Xénophon ! Théophraste, vous êtes…
THÉOPHRASTE : Chômeur.
L.R. : Et vous, Xénophon, vous êtes…
XÉNOPHON : Chômeur en fin de droits.
L.R. : Aaaah, ça fait plaisir d’avoir deux candidats aussi différents l’un de l’autre ! Mais assez de salamalecs, passons tout de suite aux lettres avec Ariane Boulinpras ! Xénophon, à vous l’honneur de commencer.
X. : Heu…Voyelle.
ARIANE BOULINPRAS : Epsylon. (E)
L.R. : Théophraste ?
T. : Voyelle.
A.B. : Upsylon. (U)
X. : Consonne.
A.B. : Rhô. (R)
T. : Voyelle.
A.B. : Omicron. (O).
X. : Consonne.
A.B. : Désolé, le stock de lettres est épuisé.
L.R. : Bon, et bien nos candidats ont trente secondes…
L.R. : Xénophon ?
X. : Une lettre.
L.R. : Théophraste ?
X. : Ben… Pas mieux.
L.R. : On vous écoute, Xénophon.
X. : O.
A.B. : C’est valable, « O : Article défini. » Mais il y avait aussi quatre lettres, « Eur… » Ah non, il n’est pas dans mon dictionnaire, je n’ai rien dit.
L.R. : Ça vaut peut-être mieux. Théophraste, il vous reste une chance aux chiffres. À vous, Brasidas Alepou.
BRASIDAS ALEPOU : Bon. Avez zéro, zéro, zéro, zéro, zéro, zéro, zéro et zéro, trouvez zéro.
L.R. : Bon, et bien nos concurrents ont une page de publicité pour trouver, on se retrouve tout de suite après.
« Taillefine de Iolcos, le premier yaourt dont les pots sont vides ! L’assurance d’une taille fine pour tout l’été ! Taillefine de Iolcos, ça n’agit pas à l’intérieur mais ça se voit à l’extérieur ! »
L.R. : Retour sur le plateau de « Des arithmoï et des grammaï » ! Théophraste ?
T. : Le compte est bon. Zéro fois zéro fois zéro fois zéro fois zéro fois zéro fois zéro fois zéro égal zéro.
L.R. : Xénophon ?
X. : Il y a plus simple : Zéro plus zéro plus zéro plus zéro plus zéro plus zéro plus zéro plus zéro égal zéro.
T. : Brasidsas ?
B.A. Moui, il y avait plus simple : zéro moins zéro mois zéro mois zéro moins zéro moins zéro moins zéro moins zéro égal zéro. Bien trouvé quand même, Xénophon !
L.R. : Et bien cette émission se termine dons sur la victoire de Xénophon qui gagne… toute notre considération. Bravo à lui ! Géia à tous et pas à demain !
« Appelez-moi le directeur !
– Que puis-je pour votre service, monsieur ?
– J’ai déclaré un sinistre dans mon appartement ! Je présume que vous n’allez pas me rembourser ?
– Ben oui ! On n’est pas con, on ne va quand même pas rembourser tous les dommages dans un pays où il pleut des cocktails Molotov ! Alors tu raques, on ne rembourse pas et tu fermes ta gueule parce que de toute façon, t’es bien obligé d’avoir une assurance pour pouvoir te loger quelque part, et si t’es pas content, je t’envoie ma police privée ! Puis-je… ?
– Oui, oui… Je ne l’aurais jamais, je ne l’aurais jamais ! ‘
– Inefficace et très cher, c’est la Maafos que j’préfère, c’est la Maafos ! »
KALÉNUXTA LES PETITS
GROS ARKOUDA : Alors, les enfants, est-ce que vous avez bien travaillé à l’école, aujourd’hui ?
NIKOS : On a pas pu, Gros arkouda, elle est fermée !
G.A. : Ah oui, c’est vrai… Et qu’est-ce que vous êtes allés faire, alors ?
N. : Ben nos parents nous ont emmenés à la manif vu qu’il y avait personne pour nous garder et que la garderie est fermée elle aussi. C’est pour ça que j’ai un œil au beurre noir !
G.A. : On t’a emmené chez le médecin, j’espère ?
N. : Ben non, le docteur il est trop cher pour nous !
G.A. : Et où est ta sœur Pénélope, Nikos ?
N. : Elle est en garde à vue ! Comme elle a déjà six ans, elle est assez grande pour ça !
G.A. : Hum ! Bon, allez, il est temps d’aller faire dodo. J’éteins la lumière…
N. : C’est pas la peine, Gros arkouda, on n’a plus l’électricité.
G.A. : Bon, ben je ferme les volets, alors…
N. : C’est pas la peine, Gros arkouda, il est cassé depuis qu’un pavé a traversé la fenêtre ; il est retombé sur mon pied, c’est pour ça qu’on m’a coupé la jambe.
G.A. : Bon, ben… Kalénuxta les… le petit ! Fais de beaux rêves, puisqu’il ne reste plus que ça à faire.
LE MARCHAND DE SABLE : Bon, pour le sable, je vais être obligé de n’en envoyer qu’une pincée, les ahuris de « Des arithmoï et des grammaï » ont presque tout utilisé pour leur sablier… Alors, mon gros arkouda, tout s’est bien passé ?
G.A. : Si on veut, patron… Le métier a quand même perdu en poésie, avec la crise…
LE M.D.S. : Bon, il dort, c’est le principal. J’espère qu’il te reste assez d’énergie parce que le nuage n’a plus d’essence, il va donc falloir que tu pousses jusqu’à ce qu’on ait assez d’argent pour racheter du carburant.
G.A. : Oooooh noooon !
LE M.D.S. : Et ne te plains pas ! Il y a plein d’ours au chômage qui aimeraient être à ta place !
G.A. : Pfff… Il y a quand même des jours où on regrette d’être un jouet pour enfants, pour pouvoir donner son avis sincère sur la situation dans laquelle les banquiers nous ont mis ! Allez… Pas à demaiiin…
« Papa, c’est quoi, cette bouteille de lait ?
– …
– Papa ! C’est quoi, cette bouteille de lait ?
– …
– PAPA ! C’EST QUOI, CETTE BOUTEILLE DE LAIT ? !
– …
– Papa, comment on fait les bébés ?
– Heu ! Ben c’est une bouteille vide que je garde en souvenir de l’époque où on pouvait encore s’acheter du lait, mais vu qu’il est hors de prix, maintenant, il vaut mieux traire ta mère ! »
VOTRE SOIRÉE SUR L’ERT
DANAÉ FARRAH : Ce soir, à 20h30, un grand film de science-fiction, « Le jour où les Grecs mangeront à leur faim », déconseillé aux téléspectateurs émotifs. À 22h00, votre série, « Starkos et Hutchos » : nos deux policiers vont à nouveau s’engager dans une folle course-poursuite en trottinette dans les rues d’Athènes pour tenter d’arrêter un dangereux trafiquant de nourriture NON avariée, une marchandise devenue rarissime. Après quoi nous clôturerons cette soirée et notre chaîne par la même occasion avec « On n’est pas couché » où Léandre Rukos recevra Eros Zemmos qui nous expliquera que la crise, c’est la faute aux métèques. Mais voici tout d’abord vos informations.
LE JOURNAL DE 20 HEURES
DÉMOSTHÈNE PUJADOS : Mesdames et messieurs, kaliméra. Rassurez-vous, pour notre dernier journal télévisé, je ne vais pas vous baratiner comme d’habitude, je vais plutôt vous révéler tous les mensonges qu’on vous a seriné depuis des années. Ah ! Ah ! Ah ! On s’est bien foutus de vos gueules ! Non, ce n’est pas une crise que vous êtes en train de subir, c’est juste que les requins de la finance internationale en ont marre de devoir partager avec vous tout le pognon qu’ils gagnent sur votre dos, alors ils ont laissé leur système se planter histoire de vous forcer à payer pour leurs gaffes ! Non, si les caisses sont vides, ce n’est pas la faute de ceux qui profitent des aides sociales ou de ceux qui ne travaillent pas mais bien celle des armateurs, de l’église orthodoxe et de tous les margoulins qui planquent du pognon en Suisse ou dans les paradis fiscaux : avec ce que la fraude fiscale fait perdre à la Grèce, la dette publique serait épongée, mais on préfère vous en faire baver ! Non, les travailleurs grecs ne sont pas des fainéants qui ne créent pas de richesses, c’est juste que les grands patrons n’en ont jamais assez, ils auraient tout l’or du monde que ce serait encore trop cher pour eux si les ouvriers payaient pour travailler à l’usine ! Non, vos politiciens n’ont jamais eu l’intention de vous sortir de ce merdier, ils n’ont pas envie de se fâcher avec les hommes d’affaires qui s’engraissent sur votre dos qu’ils fréquentent dans les soirées mondaines ! Non, « Aube dorée » n’est pas un parti anti-système mais au contraire le chien de garde du système, on compte sur lui pour que le peuple ferme sa gueule ! Et si je vous dis ça ce soir, ce n’est pas par désespoir, bien au contraire, c’est juste que grâce à toutes ces années passées le cul sur ce fauteuil à rabâcher les mensonges qui défilent sur mon prompteur pour vous faire croire qu’il est normal que vous soyez dans la merde, le tout pour le compte des politiciens et des patrons, j’ai largement de quoi me payer une retraite dorée aux Seychelles, alors les salariés de cette chaîne qui vont se retrouver au chômage et vous qui ne me verrez plus, vous pensez si je m’en fous complètement ! Restez donc ici à crever de faim, bande de cons, et merci pour votre crédulité ! AH ! AH ! AH ! AH !