D.S.-K. ou l’affaire qui commence déjà à nous les brouter menu…

Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! Une question : qu’est-ce que Dominique Strauss-Khan a fait pour la France, politiquement parlant, depuis quatre ans ? Ne cherchez pas la réponse, elle est toute trouvée : rien. Ou presque : il a juste approuvé, en tant que patron du F.M.I., la réforme scélérate de notre gouvernement sur les retraites… Strauss-Khan ne faisait plus rien en France depuis quatre ans, il n’a même pas joué son rôle d’opposant, et nos media lui ont quand même taillé un costume d’adversaire n°1 de notre demi-conducator ! Cohérence, es-tu là ?

Quatre ans que les journalistes de tous bords suivent comme son ombre l’ancien maire de Sarcelles, guettant le moindre signe de sa candidature ou de sa non-candidature à l’Élysée avec des techniques d’observation souvent dignes des diseurs de bonne aventure, tout en nous rabâchant à tire-larigot des sondages pour nous informer que nous avons envie de D.S.K. comme président, ah bon, et moi qui ne savais pas que j’avais ce désir-là, on en apprend tous les jours, dis donc… Quatre ans qu’ils nous poussent, tels des boomakers, à miser sur le cheval D.S.K., le candidat dont la victoire arrangerait le plus (ou gênerait le moins) les margoulins qui financent leurs journaux pourris, quatre ans qu’ils travaillent à façonner l’opinion publique en fonction des desiderata du grand capital, à grands coups d’analyses lénifiantes produites par des éditorialistes vivant sous vide qui disent aux Français pour qui ils vont voter sans tenir compte des aspirations de ces derniers, dont ils ne savent rien et n’ont sans doute rien à faire, camouflant leur hypnose sous le vernis de rationalité éthérée qui caractérise les branlettes intellectuelles soutenant leur prose aussi crédible que la rédaction d’un collégien de troisième… Le pire dans tout ça ? C’est que ça marche, et pas seulement chez nous, mais aussi, manifestement, chez ceux qui sont censés nous gouverner !

Réfléchissez une seconde : s’ils n’avaient pas réussi à faire croire effectivement que D.S.K. était le seul candidat possible pour la gauche, celui qui allait certainement succéder à Sarkozy, vous croyez que la vie politique française serait à ce point ébranlée par une affaire sordide mettant en cause un homme qui a déménagé de l’autre côté de l’Océan Atlantique il y a quatre ans et qui n’est pratiquement jamais intervenu depuis dans les affaires du pays dont il est ressortissant ? Or, l’affaire est manifestement jugée sérieuse par la majorité, d’une part, au point que Sarkozy ait ordonné à ses troupes de garder le silence sur cette affaire (le mot d’ordre est arrivé trop tard pour Bernard Debré et ses aboiement moralisateurs dignes du Second Empire…) et par l’opposition, d’autre part, au point que le P.S. resserre ses rangs pour ne pas être démunis par la mise hors-jeu de Strauss-Khan : tout cela est le pur produit de quatre ans de battage médiatique ! À part exercer une fascination sur les journaleux, Strauss-Khan n’a rien fait pour mériter le statut qu’il viendrait de perdre en France, il ne s’était même pas déclaré candidat. Et pendant qu’on avait les yeux rivés sur lui, nous sommes passés à côté de plein de choses : des élus politiques en France, on en a plein, dont plusieurs qui faisaient des choses concrètes pour la France, on a aussi des candidats socialistes déclarés qui ne disent pas que des choses inintéressantes, comme Montebourg, mais personne n’y a fait attention parce que nous n’avions d’yeux que pour le patron du F.M.I. ! Et souvenez-vous de cette réunion du G20 (ou du G8, G9, G15, G37, G1, je ne sais plus…) à Paris il n’y a pas si longtemps encore : qui serait capable de dire quel était le but de la réunion et quelles décisions ont été prises ? Personne, et surtout pas moi, vu que personne n’en a parlé, tous les projecteurs étant braqués sur l’ex-ministre des finances !

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Bref, on peut gloser pour savoir à qui profite le scandale, si Sarkozy, Hollande, Aubry ou Borloo va en bénéficier et, si oui, dans quelle mesure, une chose est certaine : l’élévation au rang de coup de tonnerre politique de ce qui aurait pu n’être qu’une anecdote judiciaire sordide sans incidence directe sur le destin du pays est déjà une victoire, celle des éditorialistes politiques de mes deux qui font des pronostics électoraux à la façon des turfistes faisant leur tiercé. Ils ont passé quatre ans à se taper des branlettes intellectuelles sur les futures élections, mais maintenant, ils ont répandu du foutre sur tout le pays : ils ont façonné notre approche des futures élections avec une hypothèse sans fondement réel, et tout le monde est pris au dépourvu par l’effondrement de cette hypothèse. Je ne croyais pas qu’ils y réussiraient vraiment, mais me voilà détrompé : ils ont vraiment remporté une victoire effroyable qui est aussi celle des gros capitalistes qui les paient.  

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Mais restons positifs : c’est aussi une défaite pour eux puisque personne n’avait pu prévoir cette inculpation de Strauss-Khan ; leur semblant d’omniscience en prend un coup puisque leur hypothèse « D.S.K. président », élevée au rang de vérité à venir, ne tenait aucun compte de la possibilité d’un aléa de cette espèce. Ainsi se révèle la grande faiblesse de ces éditoriaux, ils annoncent ce qui va arriver en se basant sur le climat actuel mais sans tenir aucun compte de la formidable richesse de la vie, toujours capable de faire un croche-patte à tout déroulement linéaire s’avançant vers son dénouement avec la mâle assurance que donne l’ignorance de la contingence… Donc, que ceci nous serve de leçon : maintenant que nous avons la preuve qu’ils ne sont pas du tout fiables, n’écoutons plus ses ignares prétentieux qui veulent nous voir penser là où ils nous disent de penser ; quand nous mettrons notre bulletin de vote dans l’enveloppe, ne nous disons plus « je vais voter pour lui parce que c’est lui qui va gagner » ou « je vais voter pour lui parce qu’il présente bien » mais tout simplement « je vais voter pour lui parce que ce qu’il propose s’approche le plus de la société que je veux » ou « je vais voter pour lui parce que je sais qu’il a des qualités pour gouverner ». En changeant notre regard sur la politique, en prenant la peine de la penser par nos propres moyens, nous ferons un grand pas en avant dans le sauvetage, de plus en plus urgent, de la démocratie représentative.

Si je veux être logique avec moi-même, je suis obligé d’admettre que vous n’êtes absolument pas obligé de faire ce que je dis ; vous n’êtes même pas forcés de m’écouter, je ne vous en voudrai pas, c’est promis. Après tout, vous avez sûrement mieux à faire que de vous préoccuper de cette affaire qui ne vous concerne pas directement, vous avez peut-être assez de difficultés quotidiennes pour avoir déjà dépassé le piège du vote esthétique qui se médite avant même que tous les candidats soient connus, ce qui rend ma prose parfaitement inutile. Oui, je suis même persuadé que vos préoccupations n’ont rien à voir avec celles que vous attribuent tous ces gratte-papier, que vous n’en avez rien à foutre de Strauss-Khan, que ce n’est pas cette affaire qui aiguillera votre suffrage l’année prochaine et que vous préféreriez voire les media parler de vos problèmes. Enfin, là encore, je peux me tromper ! Ah,là,là, c’est chiant de parler politique en étant honnête, on peut rien dire de sûr ! Je comprends mieux pourquoi ceux que je dénonce vous prennent pour des cons : c’est plus facile… Allez, kenavo !

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