POULET DE PRESSE n°28

Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! Vous avez sans doute remarqué, pour vous en réjouir ou pour le déplorer, que j’ai tendance à me faire rare sur votre webzine préféré ; cela ne traduit aucun désamour de ma part vis-à-vis du Graoully ni aucune panne d’inspiration (c’est même exactement le contraire) mais simplement un emploi du temps de plus en plus chargé avec lequel j’ai un peu de mal à jongler…

Libération, n°9441 (20/09/2011) : Aussi, si je vous propose aujourd’hui un vingt-huitième numéro de notre rubrique dédiée à la presse écrite, c’est parce qu’il devenait urgent que je chronique l’un des journaux que j’avais mis au programme, à savoir le numéro de Libération avec Martine Aubry comme invitée spéciale : la semaine prochaine, il sera peut-être trop tard… La rédaction du quotidien a tiré de son entrevue avec la maire de Lille un portrait d’elle qui prend le contre-pied de ce que disent les autres media : à les lire, celle que l’on nous dépeint comme une candidate de substitution velléitaire, molle comme une chique, austère et naïve serait en fait une politicienne déterminée, volontaire, droite dans ses bottes, pleine d’humour et néanmoins sérieuse. On peut discuter de la partialité d’une telle présentation, mais il est plutôt rafraichissant que le discours dominant soit contrecarré, surtout quand cela concerne une personne trainée publiquement dans la boue ; il est vrai que j’étais plutôt bon public pour ce genre de portrait flatteur : je vous ai déjà parlé, dans un précédent article, de ma sympathie, réservée, certes, mais bien réelle, pour Martine Aubry. Cela dit, quand on prend connaissance de certaines de ses idées, on comprend mieux pourquoi la presse pourrie tenue par les puissances d’argent (je sais que Libértotschild n’est pas exemplaire dans ce domaine-là…) s’est tant employée à la démolir : elle refuse de croire les simagrées des banques (« Je ne pense pas, comme Mme Lagarde, qu’elles sont dans une difficulté lourde, mais qu’elles ont les moyens de régler leurs problèmes »), elle veut rétablir la carte scolaire et aller plus loin que l’objectif d’Hollande d’embaucher 60 000 enseignants supplémentaires, recréer une police de quartier, « bloquer les loyers à la première location », reconnaître l’État palestinien, « sortir du nucléaire », « recréer un grand ministère des Droits de la femme » et abolir la loi Hadopi ; il est clair que tout ça ne doit pas être vu d’un très bon œil par les margoulins de la droite caviar et les gros beaufs de la droite cassoulet… Bien sûr, on peut regretter qu’elle ne veuille pas revenir à la retraite à 60 ans à taux plein pour tout le monde (même si elle est contre le recul de l’âge légal à 62 ans), qu’elle qualifie les Pirates de « bobos » et qu’elle persiste à dire qu’elle ignorait tout des magouilles de la famille Guérini… mais il n’empêche. Il n’empêche que je me reconnais dans les valeurs qu’elle défend ; pourquoi je m’en cacherais ? Les membres de la rédaction de Libé ne se privent pas de le montrer, et pourtant, contrairement à moi, leur métier leur demande d’être aussi impartiaux que possible… À part ça ? Et bien comme c’était le numéro du mardi, on y trouvait la chronique de Stéphane Guillon ; je ne vois pas pourquoi Libé l’a engagé, ils avaient déjà un humoriste, le grand Willem, et face à ce dessinateur de génie, le clown de chez Aridsson ne fait vraiment pas le poids….  

Courrier international, n°1089 (15/09/2011) : Il y a déjà un mois, le Courrier consacrait un dossier de 25 pages à toutes les révoltes et révolutions (non, sire, ce n’est pas la même chose) qui agitent notre satanée planète depuis le début de l’année 2011. Si on essaie de faire la synthèse de tous ces mouvements, il apparait qu’il n’est pas possible (pour l’instant ?) de leur trouver une homogénéité réelle, chacun d’entre eux ayant des causes spécifiques liées à la situation socio-économique et à la culture du pays où ils ont vu le jour ; néanmoins, ils ont quelques points communs : premièrement, les contestataires sont rares à porter le drapeau d’une idéologie déterminée, leur colère étant plutôt la conséquence logique d’un ras-le-bol général. Deuxièmement, comme le fait observer à juste titre Philippe Thureau-Dangin dans son éditorial, ledit ras-le-bol est motivé non seulement par les injustices économiques et sociales patentes que les classe moyennes paient au prix fort mais aussi par un sentiment de privation de liberté de s’exprimer : dès lors, la contestation prendrait des proportions inédites justement parce qu’elle se doit d’être à la hauteur des interdits nouveaux, propres aux société hyper-sécurisées dans lesquelles on nous force à vivre, qu’il faut désormais transgresser pour pouvoir s’exprimer publiquement. En fait, paradoxalement, et c’est peut-être une manifestation de cette « ruse de la raison dans l’Histoire » chère à Hegel, le recul de la liberté aurait engendré la réaffirmation éclatante de cette dernière sur un terrain qui aurait pu être parcouru d’une façon beaucoup plus feutrée : je veux dire que la colère contre l’injustice sociale n’aurait peut-être pas été aussi violente si les protestataires avaient eu au moins le sentiment d’être écoutés… Troisièmement, enfin, les contestataires, quelles que soient leurs raisons d’agir, et sans que cela n’amoindrisse leur détermination, n’ont pas d’idées précises concernant ce sur quoi leur mouvement va déboucher : cela signifie qu’il y a vraiment un trop-plein de colère mais aussi qu’il faudra rester vigilent jusqu’au bout, tant il est vrai qu’une situation postrévolutionnaire est toujours plus ou moins directement à la merci des récupérateurs professionnels et dictateurs amateurs… Cela dit, deux points précis ont retenu mon attention : pour commencer, en Grèce, l’État n’a soi-disant plus assez d’argent pour payer les fonctionnaires et garantir un service public de qualité, mais il y a encore assez de fric pour offrir à la police des joujoux qui serviront à casser du rouge ! Éternelle saloperie…tout pouvoir est maudit ! Et enfin, je découvre, sans grande surprise, que les États-Unis ont leur Figaro magazine à eux : il s’appelle Human Events et a publié dans une de ses éditions un chronique d’une certaine Rachel Marsden qui tire à boulets rouges sur les anti-Wall Street ; j’aime bien lire la prose conservatrice quand elle est aussi folklo, ça me fait rire ! Pour vous donner une idée, cette dame a le culot de dire, à propos de ces protestataires américains : « Auraient-ils oublié que c’est leur candidat, Barack Obama, qui est au pouvoir ? » On peut traduire la citation ainsi « Sale bande de rouge, on vous a laissé élire un président noir, et vous voudriez EN PLUS qu’il serve à quelque chose ? Jamais contents ! »

Le Télégramme de Brest, n°20.598 (22/09/2011) : Bon, là, on va faire dans le facile. Je sais, taper sur Jean-François Copé, c’est enfoncer une porte ouverte, c’est montrer ses nichons pour réussir, tant le secrétaire général de l’UMP a réussi l’exploit d’être encore plus puant que notre mini-président, aussi bien sur le plan des idées que sur celui de l’ambition personnelle. Mais il n’empêche que je suis tombé des nues quand, feuilletant le Télégramme d’un doigt distrait, je suis tombé sur un article revenant sur sa proposition d’imposer aux jeunes Français un serment d’ « allégeance aux armes » ! Et puis quoi encore ? Je n’aime pas les armes, j’en ai une horreur absolue, je ne peux pas en approcher une sans avoir envie de gerber mes trois derniers repas, alors leur jurer allégeance, que dalle ! Déjà, rien que l’expression avait de quoi me hérisser, et Copé a lui-même fini par reconnaître qu’elle était choquante, mais sa défense, qui précise l’idée générale de sa proposition, ne m’a nullement rasséréné : « Sur la forme, le secrétaire général de l’UMP a toutefois fait marche arrière, hier, en proposant de parler de « loyauté » ou d’ « engagement à défendre son pays en cas de conflit armé ». Mais pas sur le fond, car il a jugé « scandaleux et indigne » que « le seul fait de parler de l’amour de la patrie » conduise certaines à « faire le parallèle avec Vichy ». Bon. Posément, sans m’énerver, laisse-moi t’expliquer deux-trois trucs, Jean-François : tu fais partie des dirigeants d’un parti qui, il y a six ans, faisait campagne pour le « oui » à la constitution européenne, censée consolider la construction de l’Europe unie ; il faut savoir ce que tu veux : je croyais que faire l’Europe devait avoir pour but que nous n’ayons plus de guerre avec nos voisins, alors pourquoi encore s’encombrer d’un patriotisme va-t-en guerre et poussiéreux ? Ensuite, tu parles d’amour de la patrie, mais c’est un peu facile pour toi qui as passé ta scolarité dans le 15ème arrondissement de Paris et a un train de vie confortable : le jeune qui n’a droit qu’a une scolarité bâclée dans l’école laissée à l’abandon d’une banlieue pourrie et qui passera sa « carrière professionnelle » dans la précarité, je ne lui en veux pas de n’avoir qu’une affection mitigée pour son pays… De surcroît, ce que tu proposes, ce n’est même pas simplement d’aimer son pays, mais carrément d’aller faire la guerre, donc de prendre le risque de mourir ! Là encore, c’est un peu facile quand le pouvoir vous permet de déclarer la guerre sans être obligé d’aller la faire… Depuis quelques temps, on n’entend plus parler de cette proposition de Copé : y a-t-il renoncé ? L’avait-il faite uniquement pour faire parler de lui ? Ou, plus simplement, attend-il son heure pour la ressortir ? Faisons en sorte que cette heure ne vienne jamais…           

 

Nice-Matin (19/09/2011) : Puisqu’on est dans la presse locale, restons-y avec cet article qui m’avait été envoyé par notre poétesse maison, Carmen : il y est question de Jacques Cesarino, un bailleur niçois condamné par la justice. Voilà l’histoire : ce monsieur est propriétaire de l’hôtel Le Cyrano et voulait absolument expulser les occupants du garni vétuste qu’il leur louait ; il voulait bien faire rénover les taudis qu’il louait, mais pour les louer désormais à des « personnes de bonne tenue, ma chère ! », comme il l’avoue lui-même en clamant « Je ne suis pas un marchand de sommeil », rappelant malgré lui que le « standing » est un nom parmi d’autres du prétexte de bon goût que se donnent les riches pour gagner toujours plus d’argent sur le dos des pauvres et ainsi étaler toujours plus de richesses sous le nez de ces derniers. Ainsi, ce triste sire a tenté de murer les appartements des locateurs, a mis à la porte sans ménagement l’un d’entre eux, ce qui lui vaudra d’être poursuivi pour violences en réunion, violation de domicile et non-respect du règlement sanitaire ; il aurait même menacé de mort Sandhra Gharibian et Dara Sun (comme par hasard, ils n’ont pas des noms de Bidochons…), deux locataires qui soutiennent : « Il a dit qu’il nous apprendrait à voler du deuxième étage ! » La rapacité et la brutalité de ce fesse-mathieu digne d’un roman de Charles Dickens ne lui ont pas porté chance, puisqu’il a écopé de trois mois avec sursis pour violation de domicile, d’une amende de 600 euros pour violences simples et doit payer des dommages et intérêts à ses locataires ; il a même été obligé de financer une solution de relogement à ces derniers. Comme quoi, il arrive que les méchants soient punis…il faut vraiment avoir plein d’argent pour pouvoir être aussi con, aussi mauvais et aussi égocentrique ! L’attitude, finalement ridicule, de ce gaillard, serait presque rigolote si elle n’avait pas directement hypothéqué l’avenir d’êtres humains innocents qu’il aurait, si on l’avait laissé faire, probablement condamnés, sans scrupule aucun, à coucher sous les ponts…

Puisqu'on parle de mal-logement...

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais dans cette revue de presse, il n’y avait QUE des journaux « sérieux », c’est-à-dire non satiriques. Je me rattraperai la prochaine fois avec un « poulet de presse » (un peu) plus allègre. D’autre part, vous n’êtes pas sans savoir que bientôt, cette chronique se fera sans France-soir…et ce ne sera pas une grosse perte ! Allez, kenavo !    

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