Incendie à Charlie Hebdo : Renan Apreski fait le point.

« Heureux, les croyants ! Mais je préfère mon angoisse et ses yeux grands ouverts. » (Cavanna)

RENAN APRESKI : Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! L’évènement de la semaine, c’est bien évidemment l’incendie, vraisemblablement criminel, des locaux de Charlie hebdo ; une enquête a été ouverte…

 

CLAUDE GUÉANT : C’est fait, l’enquête ! C’est les bougn…les musul…les islamistes ! On va tous les foutre dehors, ces sales métèques !

R.A. : Doucement, monsieur le ministre, les autorités musulmanes du pays ont quand même condamné cet acte…

C.G. : C’est les bougnoules, j’te dis ! On va tous les foutre dans des charters ! Y aura bien les responsables dans le tas ! Et cette fois, j’aurai la bénédiction de ces torchons gauchistes qui me trainaient dans la merde il y a encore une semaine !

R.A. : Ne vous emballez pas, votre soutien à Charlie hebdo les fait plutôt rigoler…

C.G. : Qu’ils rigolent ! Quand j’en aurai fini avec les métèques, je m’occuperai de leur cas, et j’aurai expulsé assez de monde pour qu’il n’y ait plus personne pour les défendre ! Vive la France blanche et pure !

R.A. : Hum ! Monsieur le président, vous êtes d’accord avec ce que vient de dire Claude Guéant ?

NICOLAS SARKOZY : Sur le fond, oui, mais je l’aurais pas dit comme ça… En attendant, c’est quand même un sale coup pour moi : devoir défendre Charlie hebdo ! J’avais à peine quatorze ans quand ce torchon est sorti, en 1969, et mes parents m’avaient d’emblée dit que c’était le journal de l’Antéchrist ! Symboliquement, c’est dur… J’ai cru que je les enterrerais définitivement en nommant Val à la tête de France Inter, mais cet incendie leur a donné une nouvelle jeunesse inespérée ! Je n’en suis toujours pas débarrassé et je dois, en plus, les soutenir ! Tout va mal, en ce moment…

R.A. : C’est le moins qu’on puisse dire ! David Pujadas, vous êtes choqué, je présume ?

DAVID PUJADAS : Je ne suis pas choqué, je suis écœuré, indigné, épouvanté !

R.A. : Oui, c’est une atteinte intolérable à la liberté de la presse…

D.P. : La quoi ? De la quoi ? Je ne comprends rien à ce que tu dis ! De toute façon, ce qui me fait enrager, c’est que nous n’avons aucune image de l’incendie ! Pas la moindre petite image exclusive bien flippante et spectaculaire qui aurait pu faire trembler le populo dans son fauteuil ! Même pas un document amateur ! À l’époque où tout le monde peut filmer ce qu’il veut où il veut quand il veut avec son portable, c’est le comble ! Ils auraient pu au moins nous prévenir, les lanceurs de cocktails molotov, on aurait envoyé une équipe sur place ! Mais pensez-vous, ils s’en fichent, ces égoïstes, de l’audimat de France 2 ! Comment voulez-vous qu’on fasse de l’audience si les terroristes n’y mettent pas du leur ? Si encore ils avaient brûlé la rédaction d’un journal bien comme y faut, mais non, il a fallu qu’ils choisissent Charlie hebdo, et on ne peut même pas inviter l’équipe du journal témoigner chez nous, Nicolas nous l’a interdit ! Ah, quand ça veut pas…

R.A. : …ça veut pas, oui ! Et vous, Étienne Mougeotte, vous êtes solidaire de votre concurrent ?

ÉTIENNE MOUGEOTTE : Bien sûr ! C’est le principe de la liberté de la presse qui est en jeu, la question ne se pose même pas ! Si la même chose était arrivée au Figaro, Charlie hebdo nous soutiendrait lui aussi ! À ce sujet, d’ailleurs, j’avoue m’être demandé pourquoi la même chose ne nous est justement pas arrivée alors que nous avons fait des « unes » autrement plus agressives envers les musulmans de France. J’ai réfléchi, et je me suis dit : c’est l’avantage d’être soutenu par un grand groupe industriel ! Les terroristes ne seraient pas des terroristes s’ils n’étaient pas lâches ! Ils n’oseront jamais s’en prendre directement aux puissants ! Cela dit, ceux qui ont brûlé Charlie sont lâches mais pas idiots : ils savent que la stigmatisation des musulmans, telle que nous la pratiquons au Figaro, apporte de la clientèle à l’intégrisme, tandis que l’ironie exercée à l’égard de la religion par Charlie n’indigne que les convertis… En plus, s’ils envisagent d’aller plus loin dans le combat, ils savent que le groupe Dassault serait ravi de les compter parmi ses clients et ils ne vont pas prendre le risque de se fâcher avec lui !

R.A. : Ça me parait clair… Bob Siné, votre sentiment là-dessus ?

BOB SINÉ : Ben ça craint ! J’ai lu le numéro de Charlie incriminé, il faut se lever de bonne heure pour y trouver quelque chose qui soit vraiment offensant pour l’Islam ! Et pourtant, ils auraient pu aller plus loin : une religion, c’est con, et l’Islam n’échappe pas à la règle ! Mais non, ils ont fait leur numéro habituel de boy-scouts qui s’encanaillent ! Ils l’ont d’ailleurs confirmé par la suite : vous croyez que Choron serait allé pleurnicher dans les jupes de Libé ? Il se serait démerdé tout seul et l’aurait envoyé se faire foutre, le Demorand, oui ! Donc, si les intégristes sont prêts à leur bouter le feu pour ça, c’est qu’il faut pas grand’ chose pour les mettre en pétard, aux barbus !

R.A. : Et vous craignez que cela arrive aussi à Siné mensuel ?

B.S. : Oui et non ! Je peux pas espérer une chose pareille, mais j’avoue que ça me fait mal aux seins de voir Charlie gonfler ses ventes grâce aux fanatiques alors que j’avais créé un canard pour essayer de les couler ! Un tel coup de pouce serait presque le bienvenu pour nous s’il n’était pas le signe d’un climat de plus en plus pourrave ! Tiens, d’ailleurs, je sais pas si t’as remarqué, mais chaque fois que les censeurs veulent faire taire quelqu’un, ils lui font de la pub ! C’est exactement ce qui est arrivé à Charlie, en tout cas ! Et c’est pas la première fois que ça arrive : souviens-toi de la poupée vaudou à l’effigie de Sarkozy qui a valu à son éditeur un procès musclé qui a fait exploser ses ventes ! Et moi ? Tu crois que j’aurais autant cassé la baraque avec Siné hebdo en 2008, si Val n’avait pas voulu m’enterrer vivant ? Conclusion : ils sont cons, les censeurs, ou quoi ?

R.A. : Bonne question ! Frank Ribéry, en tant que musulman, ça vous choque, que l’on caricature Mahomet ?

FRANK RIBÉRY : Cariquoi ?

R.A. : Bon, ça vous gène, qu’on représente le prophète ?

F.R. : Ah ben oui, c’est interdit, c’est écrit dans le Coran, c’est l’imam qui l’a dit !

R.A. : Comment ça, c’est l’imam qui vous l’a dit ? Vous ne l’avez pas lu vous-même ?

F.R. : Ah ben non, je comprends pas l’arabe !

R.A. : Mais Frank, il a été traduit en français !

F.R. : Ah ben non, l’imam, il a dit que c’était interdit d’écrire le coran dans une autre langue que le prophète !

R.A. : Mais…il sort ça d’où ?

F.R. : Ah ben du Coran, il a dit que c’était écrit dedans ! Et moi, je fais tout comme l’imam il dit parce que je suis un bon musulman, moi !

R.A. : Heu…dites, Frank, votre imam, vous ne lui avez pas demandé conseil avant d’aller voir une escort-girl ?

F.R. : Ah ben si, pourquoi ?

R.A. : C’est bien ce que je pensais ! Pourquoi ? Je ne sais pas, une intuition…  Charb, le mot de la fin ?

CHARB : Il est tout trouvé : on a réduit nos locaux en cendres, c’est pas comme ça que je vais me réconcilier avec les fumeurs !

R.A. : Tu m’étonnes ! Allez, kenavo !

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