1er mai maussade…

« Nous avons fait mai 68 pour ne pas devenir ce que nous sommes devenus. » (Wolinski)

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Devezh mat, Metz, mont a ra ? Vous êtes bien rentrés de la manif, tout s’est bien passé ? Il faut reconnaître que fêter le 1er mai et, dans la foulée, le 45ème anniversaire de mai 68, c’est un peu moins déprimant de le faire sous un gouvernement socialiste, ou du moins qui prétend l’être, que sous Sarkozy… Si je sous-entends que ça reste déprimant malgré tout, ce n’est pas à cause du temps (pour entendre maugréer contre ce printemps pourri, prière de vous reporter à votre JT de Jean-Pierre Pernault habituel) mais tout simplement parce que les travailleurs n’ont aujourd’hui guère de raisons autres que purement commémoratives pour faire la fête…

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Bon, d’accord, il y a la loi Florange qui interdit de fermer un site industriel rentable mais, outre le fait que cette loi doit faire bien rire Mittal puisqu’elle n’est pas rétroactive, ce n’est même pas une réforme de gauche, c’est plutôt une mesure de bon sens élémentaire pour qui veut sauvegarder ce qui crée de la richesse dans le pays, et quand bien même, les socialistes auraient dû la faire voter une telle loi dès les années 1980 au lieu d’attendre 2013, ça aurait peut-être évité l’insupportable gâchis dont le bassin anciennement industriel lorrain a été l’objet – je dis « peut-être » parce que je vous parie tout ce que vous voulez que les patrons doivent être déjà en train de mitonner leur plan pour contourner la loi… Vous me direz que si on ne peut plus revenir en arrière, on peut au moins arrêter les bêtises : il n’empêche que ça ressemble fort à un os qu’on donne à ronger aux ouvriers pour faire passer la pilule de l’ANI, cet accord scélérat qui provoque chez Laurence Parisot cette grimace obscène qu’il faut probablement nommer sourire concernant la future ex-guenon en chef de Medef…

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Villepin puis Sarkozy en ont rêvé, le « président normal » l’a fait, mettre à mort le CDI, ou du moins le vider de son sens et donner au patron droit de vie et de mort sur un salarié désormais corvéable à merci ! Je me tue à dire que les vrais changements positifs sont provoqués par ceux qui ont le courage de taper du poing sur la table pour obtenir ce qu’ils veulent et non par les attiédis qui n’ont que le mot « négociation » à la bouche, en voici la preuve éclatante ! Grâce à cette réforme soutenue notamment par des leaders syndicaux apparemment plus soucieux de leur future reconversion dans la politique que des droits des travailleurs qu’ils sont censés défendre, le travailleur moyen vivra désormais dans la peur permanente de se faire virer sans motif (et c’est censé réduire le chômage, ça ?) ou d’être muté à l’autre bout de la France sans pouvoir s’y opposer, victime de l’application de la sacro-sainte « flexibilité » dont les patrons nous rabattent les oreilles, prenant soin d’oublier au passage qu’il est plus facile de changer de logement du jour au lendemain quand on a un jet privé et trois résidence secondaires que quand on n’a que son pavillon de banlieue et sa kangoo d’occasion pour lesquels on s’est endettés quasiment à vie, comme la plupart des salariés… Non seulement c’est injuste mais c’est idiot : seul le travail bien fait crée de la richesse, et le travail bien fait, c’est un travail fait par des employés bien formés, assez bien implantés dans l’entreprise pour en connaître tous les rouages et, surtout, travaillant dans de bonnes conditions ! Aucune entreprise ne peut rationnellement se permettre d’ignorer cette vérité et on n’y changera rien en créant des « espaces wellness », en embauchant des « coachs » ou en faisant d’autres sornettes du même acabit dont les bobos sont friands : toutes ces initiatives ne seront qu’un pansement sur une jambe de bois si on s’obstine à précariser les employés, pas besoin d’avoir une chaire de psychologie sociale pour comprendre ça. Bref, l’ANI ne permettra ni la baisse du chômage ni la relance de l’économie, bien au contraire ! Mais ça, les patrons s’en foutent, tout ce qui les intéresse, manifestement, c’est leur profit maximal à court terme : ces imbéciles aux poches trop pleines foncent droit dans le mur et nous y entraînent avec entrain, j’aurais presque hâte de voir ça s’il n’y avait pas autant de dommages collatéraux à craindre…

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La loi Florange n’est donc qu’un petit pas en faveur des salariés pour faire semblant d’en compenser un grand en faveur des seuls patrons, mais c’est encore trop pour ces derniers qui réclament un autre gros cadeau pour compenser le petit qui est fait aux ouvriers, ce qu’ils obtiennent évidemment aussitôt, d’où la batterie de mesures en faveur des entreprises annoncée par notre président qui est manifestement au courage politique ce que notre ministre de l’intérieur est à l’humanisme… Vous pourriez croire, en lisant ses lignes, que je suis déçu par le gouvernement socialiste ? Et bien pas du tout. En 2012, je n’ai pas voté POUR François Hollande, j’ai voté CONTRE Nicolas Sarkozy et je ne regrette rien, plutôt crever que d’en arriver à être nostalgique du règne de ce demi-tyran surexcité : vous me direz qu’administrativement, c’était du pareil au même, il reste que je n’attendais rien des socialistes. Tout ce que j’attendais de cette victoire du PS, c’est qu’elle crée un appel d’air après dix ans de chape de plomb reagano-pétainiste et donne aux gens la motivation nécessaire pour défendre leurs droits grièvement bafoués, comme ce fut le cas en 1936 après la victoire du Front populaire. Il n’en fut rien : le peuple de France s’est contenté de regarder, d’attendre que ça se passe, il est resté bouche béante devant la télévision à attendre que les mesures de gauche lui tombent toute cuites dans le bec. Il aurait fallu profiter du changement de majorité pour sortir dans la rue et crier « à bas les patrons », on n’a entendu que « à bas les pédés » ! Je suis moins déçu par le gouvernement que par mes concitoyens ! À la limite, celui qui trahit l’esprit de mai 68, ce n’est pas tant le pouvoir, qui reste fidèle à lui-même, que le peuple qui se montre incapable de suivre l’exemple d’audace dont avaient fait preuve ceux qui avaient jadis cherché la plage sous les pavés ; le bon peuple n’a retenu de mai 68 que « jouissez sans entraves », et encore, il traduit « jouissez » par « endettez-vous pour pouvoir vivre comme le voisin », espérant que le pouvoir va de lui-même lui donner de quoi satisfaire cette soif de jouissance bassement matérialiste… Ceux qui croyaient inaugurer une nouvelle ère avec « Sous les pavés la plage » sont gros-jean comme devant, la devise reste Panem et circenses, comme à l’époque de Juvénal (Ier et IIe siècle de notre ère) !

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Je pourrais aussi vous dire que malgré les apparences, le mariage pour tous n’est pas vraiment une victoire de l’esprit soixante-huitard vu que les hommes de mai 68 espéraient plutôt abattre la tradition bourgeoise du mariage plutôt que lui donner plus de poids en l’ouvrant aux couples homosexuels, mais je ne voudrais pas prendre le risque d’amoindrir l’enthousiasme légitimement suscité par cette législation qui consacre un long et tortueux combat en faveur de l’égalité entre les citoyens ; déjà que ce que je viens d’écrire n’est vraiment pas marrant… Kenavo, les aminches !

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