La petite semaine du professeur Blequin (2)

Je n’ai pas toujours eu le temps de vous dessiner un logo pour cette nouvelle rubrique : c’est que la semaine qui s’achève a été bien remplie ! Voyez plutôt :

LUNDI 28 MARS

Théâtre des Arts VivantsPremière de ma « conférence décalée » au Relecq-Kerhuon ; j’ai ainsi pu constater de visu que la mayonnaise prenait bien entre le public et cette forme de spectacle résolument anti-stand up. Mais j’ai surtout eu le privilège de clôturer le Chapiteau d’hiver du Relecq : je ne remercierai jamais assez l’équipe du Théâtre des Arts Vivants pour son accueil, je suis fier d’avoir pu participer à ces deux semaines de joie, de frissons et de découvertes.

Votre serviteur avec Samuel Rossier, directeur artistique du TAV.
Votre serviteur avec Samuel Rossier, directeur artistique du TAV.

RTL_logo_svg_Entendu à la radio : François Hollande prépare sa candidature. Visiblement, notre président n’a pas oublié cette grande leçon de son maître ès politique (Jacques Chirac) : on n’est jamais élu sur un bilan mais sur une campagne et le mieux à faire pour conserver le pouvoir est de rester les bras croisés jusqu’aux élections. Vous allez voir que nous serons capables de le réélire ! Les sondages ? Bof ! Pour ce que ça vaut à plus d’un an de l’échéance ! J’en profite pour dire que les instituts de sondages feraient mieux de nous laisser voter en paix au lieu de nous dire pour qui on va le faire – c’est ma façon « polie » de dire : « arrêtez de nous casser les couilles ».

05-03-Hollande-2017

11-23-Hollande et les sondages

MARDI 29 MARS

bm_10128_615598Lu Mangez-le si vous voulez de Jean Teulé qui revient sur un sordide fait divers : en 1870, les gens de Hautefaye ont lynché, torturé, brûlé vif et même mangé un jeune homme innocent érigé, par un malheureux concours de circonstance, en bouc émissaire de tous leurs ennuis, à commencer par la débâcle de l’armée française à laquelle ils ne pouvaient se résoudre. Incontestablement, ce n’est pas le meilleur roman de Teulé : l’auteur se laisse envahir par l’indignation (légitime) que lui inspire son sujet et la distanciation qui rend si savoureux ses meilleurs romans fait cruellement défaut. L’ouvrage n’en est pas moins intéressant dans la mesure où le romancier saisit l’occasion pour décomposer, étape par étape, le processus pouvant conduire une foule à de telles extrémités ; de ce fait, et ce n’est pas son moindre mérite, il a, tel un scientifique, « isolé» la structure de ce récit qui se répète en tous lieux et à chaque époque, depuis les cours de récréation, quand les gosses harcèlent un camarade dont la tête ne leur revient pas, jusqu’aux places publiques, où les foules fanatisées lynchent une femme adultère en passant par les villes fraîchement libérées de l’occupant, où les résistants de la dernière heure tondent la femme du voisin…

08-31-Lynchage

En route pour Paris, mon train prend une heure et demie de retard suite à la découverte sur la voie d’un obus de la guerre de 40 qui avait refait surface à la faveur des glissements de terrain provoqués par les pluies tombées sur le Grand Ouest… N’en pouvant plus de ce voyage dont je croyais la fin proche, je fonce au bar pour trouver une peu de réconfort avec les boissons et les sucreries hors de prix que vend la SNCF. Conclusion : même 70 ans après, la guerre fait marcher le commerce !

05-23-SNCF

MERCREDI 30 MARS

Institut Georges PompidouVous comptez dans vos relations une personne âgée qui ne peut s’empêcher de raconter ses souvenirs à qui veut (ou ne veut pas) l’entendre ? Rassurez-vous : vous n’êtes pas le seul, on en trouve dans tous les milieux, même les plus aisés. Ainsi, assistant au colloque « Georges Pompidou et le bonheur : une certaine idée de la France heureuse » organisé par l’institut Pompidou à Paris, j’ai pu entendre les anciens collaborateurs de Pompidou et de Chaban-Delmas (ben oui, ils ne sont pas tous morts, bande de mauvaises langues !) sortir largement du sujet du colloque pour rapporter ce qu’ils avaient constaté de visu concernant la relation entre le président et son premier ministre… Mais, me direz-vous, ce n’est pas pareil : c’est de l’Histoire ! Ben oui, et alors ? Au nom de quoi les souvenirs du vieux pépé dont vous rigolez relèveraient moins de l’Histoire que ceux de ces messieurs fort respectables ? L’Histoire, ce n’est pas que les « grands hommes », hé, bande de potirons ! C’est Jules César, Napoléon et De Gaulle, d’accord, mais c’est aussi toutes les « petites gens » qui ont vécu à la même époque que tous ces grands pontes !

Que du beau linge !
Que du beau linge !

51Z8dxwE1bL__SX318_BO1,204,203,200_Au sein de cette table ronde qui regroupait essentiellement des « grands anciens », l’ancien ministre Hervé Gaymard, invité en tant qu’auteur de Bonheurs et Grandeur, faisait figure, du haut de ces 55 ans, de jeunot. Il ne m’en a pas moins réservé une sacrée surprise ! Je m’explique : monsieur Ésambert, le président de l’institut Pompidou, ancien conseiller industriel du président, avait rangé parmi les signes de la « dualité » de Georges Pompidou l’apparente contradiction entre son goût pour la poésie et sa capacité à venir à bout des affaires financières les plus pointues ; je me suis permis de répliquer qu’il n’y a pas là, à mon sens, contradiction, la poésie n’étant pas le domaine de la douce rêverie que l’on imagine trop souvent mais, bien au contraire, l’école de la rigueur et de l’application, citant pour appuyer mon propos le perfectionnisme exacerbé de Charles Baudelaire ou encore Platon qui faisait de la musique la gymnastique de l’âme… Tout en parlant ainsi, j’ai bien vu que monsieur Gaymard souriait en m’écoutant ! Je ne pense pas trahir un secret d’État en signalant qu’il m’a ensuite avoué être amateur de poésie… Comme quoi, les gens de droite sont des êtres humains comme vous et moi, après tout.

Deux facette apparemment contradictoires de Georges Pompidou : l'amateur de poésie...
Deux facettes apparemment contradictoires de Georges Pompidou : l’amateur de poésie…
...et le banquier.
…et le banquier.

JEUDI 31 MARS

Grandes-armes-de-ParisEn arrivant à Paris, je m’attendais à une ville paralysée par les grèves où l’on se fait contrôler toutes les cinq minutes par des flics qui voient des islamistes partout ; j’ai donc été « déçu en bien » comme disent nos amis Helvètes : concernant les grèves, il était relativement facile d’échapper aux désagréments qu’elles provoquent et la seule fois où j’ai été contrôlé, c’était à l’entrée du centre Pompidou où l’on ma demandé d’ouvrir mon sac, ce qui se faisait déjà à mon dernier passage dans ce bâtiment…il y a douze ans de ça ! Alors, entre les abrutis de droite qui parlent d’usagers « pris en otages » à la moindre ombre de grève et les crétins de gauche qui crient au fascisme face à l’état d’urgence, on peut trouver un dénominateur commun : l’étroitesse d’esprit. Voyez un peu plus loin que le bout de vos idéologies et vous direz moins de bêtises !

11-30-Etat d'urgence

03-09-Loi travail 01

Charlie Hebdo 70Ce n’est pas un secret : j’étais allé à ce colloque organisé par l’institut Pompidou pour faire une communication sur Charlie Hebdo ; mon intervention a été très bien reçue, je vous en remercie, mais le jour même où j’allais la prononcer, j’ai appris que le Landerneau déblatérait sur la « une » de Charlie mettant en scène Stromae pour évoquer les attentats de Bruxelles. Rien à dire sur la réaction, on ne peut plus attendue, des bien-pensants de chez nous qui crient plus facilement « on ne rit pas avec ces choses-là » que « je suis Charlie ». En revanche, je suis très déçu par l’attitude de l’entourage de Stromae : moi qui pensais que la Belgique était le pays de l’humour et du second degré… D’un autre côté, à fréquenter un type qui écrit des chansons si sinistres, il est normal qu’on devienne aigri !

1500726503-23-Je suis Bruxelles03-11-Pompidou-Tout est pardonné-Je suis Charlie

VENDREDI 1er AVRIL

On critique les grévistes mais, en fin de compte, au cours de mon escapade parisienne, ce sont eux qui m’ont le moins emmerdé : mon retour en Bretagne a été encore plus pénible que l’aller puisque mon train a été bloqué à Rennes à cause d’une panne d’un engin d’une compagnie ferroviaire privée qui bloquait la voie et emmerdait tout le monde. Trois heures de retard ! Merci, l’ouverture des chemins de fer à la concurrence ! Comme quoi, Thomas Hobbes n’a pas écrit que des conneries : sa fameuse fiction de l’État de nature où les hommes, poursuivant les mêmes buts avec des forces à peu près égales, en viennent inévitablement à s’affronter faute d’instance régulatrice, dépeint à merveille la situation dans laquelle nous met la sacro-sainte « concurrence libre et non faussée »…

10-28-TGV

superpifHeureusement, pour tenir le coup durant ce voyage désagréable, j’avais mon Super Pif n°3. Et oui, je suis resté un grand enfant fan de Pif, ce journal pour gosses qui a lancé tant de génies de la BD (Tabary, Gotlib, Mattioli, Pratt, Cézard, etc.) et appris aux enfants des valeurs de tolérance et d’humanisme. Aussi, quel plaisir de pouvoir retrouver Supermatou, les Rigolus et les Tristus, Corrine et Jeannot, sans oublier le Concombre masqué, dont le génial créateur, le grand, le très grand, le très, très grand Nikita Mandryka, sera présent le 16 avril au festival de la BD de Perros-Guirec auquel participera aussi votre serviteur en tant que lauréat du prix du scénario du concours Jeunes talents Le Télégramme ! Tout est dans tout et réciproquement… Pour revenir à Super Pif, n’oublions pas Pif et Hercule qui taillent un petit costard bien mérité à un célèbre homme d’affaires français qui reste encore aujourd’hui le symbole vivant de la corruption dans le monde du football…

03-27-Tolérance - Rigolus et Tristus04-06-Les Rigolus et la belle Tristus

SAMEDI 2 AVRIL – DIMANCHE 3 AVRIL

Au Royaume-Uni, le « oui » est donné en tête du referendum sur le « Brexit »… Faut-il que nos décideurs soient cons pour avoir à ce point dégoûté les gens d’une idée aussi formidables que celle de l’Europe unie ! Ce n’est cependant pas une excuse pour les « imbéciles heureux qui sont nés quelque part » qui ont réclamé ce referendum ni pour le gouvernement britannique qui leur a donné gain de cause ! Il ne faudra pas s’étonner, après ça, s’ils se mettent à réclamer encore plus : peut-être demanderont-ils la fin de l’entente cordiale et la déclaration de guerre à la France voire la recolonisation de l’Inde !

David Cameron
David Cameron

J’ai installé mon stand de caricaturiste au premier salon du bien-être animal de Guipavas : j’y ai récolté un bénéfice honorable (sans plus) et appris l’existence de la « médiation animale », c’est-à-dire le recours au contact avec les animaux dans le cadre de thérapies. Ainsi, on a volontiers recours au contact avec le cheval pour venir en aide aux personnes autistes : de fait, n’est-ce pas grâce à sa chère Rossinante que Don Quichotte est enfin sorti de son isolement et s’est mis à combattre activement pour le code d’honneur auquel il croit ? Mais ne le dites pas aux grands labos qui veulent bourrer les autistes de médicaments : ils vous feront des sandales de ciment !

12-27-Mikaël-Don Quichotte

À dimanche prochain si on veut bien !

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