L’édito du rabat-joie : Papa, Maman, j’peux avoir un chien ?

« Avant de prendre chez soi un animal, il faut y réfléchir à deux fois, se dire que c’est pis qu’un mariage. » (Cavanna)

Vous l’avez sans doute vue si vous essayez parfois de tromper votre ennui devant la télé. C’est une campagne de la SPA : on y voit un jolie petite fille (blonde) adopter un charmant jeune chien, vraisemblablement un labrador ; la gamine passe de bons moments avec son toutou adoré : par la suite, elle grandit, devient une adolescente, puis une jeune femme, elle découvre l’amour (avec un homme, bien sûr…), le mariage puis la maternité (surtout pas l’inverse…) et, à chacun de ces « grands tournants dans la vie », le brave chien-chien à sa mé-mère est toujours là, indéracinablement fidèle jusqu’au triste jour où il ferme l’œil pour la dernière fois… Apparait alors, en lettres blanches sur fond noir, cette phrase : « Quand un chien abandonne son maître, ce n’est pas pour partir en vacances. »

Passons sur le parfum de conformisme catho-franchouillard, sur lequel j’ai déjà lourdement insisté avec perfidie, qui se dégage de ce clip. Dans l’absolu, on ne peut évidemment qu’approuver une campagne destinée à lutter contre cette pratique, aussi courante que méprisable, qu’est l’abandon des animaux domestiques au moment des départs en vacances. Pourtant, il reste quelque chose qui « coince » dans ce film.

Voilà : des enfants qui réclament un chien à leurs parents, il y en a beaucoup. Des enfants qui obtiennent un chien de leurs parents, il y en a encore beaucoup. Mais des enfants qui finissent par refiler le chien à leurs parents, il y en aussi beaucoup. C’est classique : le gamin promet au début qu’il s’en occupera, lui fera faire sa promenade et tout le tralala… Et au bout d’un mois (maximum, n’oublions pas que le temps parait long quand on en enfant), le gosse s’en lasse comme il se lasse de ses jouets : toutes les corvées retombent alors sur le dos des parents qui l’ont mauvaise vu qu’ils n’avaient pas particulièrement envie de devoir s’occuper d’un chien, et quand vient la date fatidique du départ pour la location-sur-la-côte-d’Azur-où-ils-n’acceptent-pas-les-animaux… Ai-je besoin d’écrire la suite ?

Tout ceci pour dire une bonne fois pour toute : adopter un animal, ça n’a l’air de rien, mais c’est une responsabilité gigantesque. A partir du moment où on prend un chien, un chat ou même un cochon d’inde sous sa protection, on devient un dieu vivant pour lui. Ce n’est pas que la reconnaissance du ventre : on est l’être qui lui offre toit, chaleur, santé, amour ! Une telle responsabilité ne peut PAS être confiée à un enfant ! Si on prend ce risque, ça se termine, dans au moins 95% des cas, de la manière tragique que j’ai essayé d’expliquer précédemment : même à supposer que je ne sois pas exagérément optimiste en tablant sur 5% de cas à l’issue heureuse, ça n’enlève rien au fait que l’adoption d’un animal doit relever d’une décision mûrement réfléchie, qu’il faut d’abord se demander si on est en mesure de l’accueillir et non pas l’offrir à son enfant comme on lui offrirait une voiture téléguidée.

Conclusion : cette campagne me pose problème car elle prétend lutter contre les abandons d’animaux en mettant en scène un phénomène qui est à lui seul une cause d’abandons. Elle a pourtant été commanditée par un organisme qui connait bien le problème. Alors qui se trompe dans l’histoire ? C’est peut-être moi, mais il faudra me le prouver.

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