Dix signes infaillibles pour reconnaître un humoriste couché ou : La démagogie participative en dix leçons

1-Il enfonce un clou au cercueil de la tête de turc du moment.

L’humoriste couché ne veut pas prendre le risque de se fâcher avec la majorité ; aussi, quand les médias et la vindicte populaire se déchaînent, avec ou sans raison, contre une personnalité quelconque ou une frange de la population, il en rajoute et mêle sa voix à celle du troupeau : sous Hollande, il aurait pratiqué le « Hollande bashing » à fond la caisse et, sous l’occupation, il aurait fait des blagues sur les « youpins »….

2-Il caricature les écologistes, au mieux, comme des illuminés, au pire, comme des hypocrites.

Là encore, il reprend à son compte ce que pensent les bons gros cons broute-paille et mange-merde qui composent la majorité et qui sont donc le « public-cible » de l’humoriste plus soucieux de faire du fric que de passer un message : pas question, par conséquent, de perturber les certitudes des veaux qui ne conçoivent pas la vie sans CX Diesel ni quincaillerie high-tech.

3-Il accuse Gérard Filoche d’antisémitisme.

Dans la même logique, il reprend à son compte, en y ajoutant un nez rouge, ce que débitent à l’envi les éditorialistes qui ne disent jamais la vérité mais répètent ce que les employeurs desdits éditorialistes ont envie d’entendre, le tout dans le but de se faire engager par lesdits employeurs. Ainsi, si les médiacrates décident de « faire tomber » un militant honnête et courageux sous un prétexte infamant, il ne manquera pas d’abonder dans leur sens et de mettre le militant en question dans le même sac à merde que Soral et Dieudonné : en reprenant à son compte cette désinformation, sans la remettre en question d’une façon ou d’une autre, dans ses plaisanteries, il contribue à la transformer en vérité intangible.

4-Il présente les jeunes comme des glands avec trois mots de vocabulaire.

La majorité, dans un pays vieillissant, c’est les seniors : qui veut plaire à la majorité doit donc plaire aux vieux et de préférence aux vieux cons : c’est ce qui avait fait le succès de Sarkozy en 2007. Par conséquent, l’humoriste couché ne manque pas de conforter les seniors dans la conviction que leur génération était cent fois meilleure que celle qui leur succède qui est nécessairement « ramollie du bulbe » puisqu’elle sait se servir d’appareils que les « vieux » ne savent généralement pas utiliser.

5-Il qualifie Johnny Hallyday de « seul star française ».

Une fois passée les frontières françaises, Johnny Hallyday n’est rien : lors de l’épisode Delajoux, les Américains se demandaient pourquoi les frenchies se faisaient tant de souci pour ce rocker dont le nom leur était inconnu ! De surcroît, Jean-Philippe Smet n’a jamais risqué le test de la « traversée du désert » qui permet de confirmer qu’une personnalité est réellement une star : autant Belmondo et Renaud ont réussi ce test, puisque le public ne les a pas oubliés malgré l’éloignement des radars médiatiques, autant Johnny ne l’a jamais tenté. Qualifier ce dernier de « seule star française », c’est donc caresser dans le sens du poil un artiste qui a longtemps fait la pluie et le beau temps dans le show-business et qui, du fait du grand nombre de disques qu’il continue à vendre après sa mort, reste quasiment intouchable pour les carriéristes de tout poil…

6-Il gueule contre le fisc.

Dire que le système fiscal français est parfaitement juste serait stupide ; il serait aussi injuste d’affirmer que l’argent public est parfaitement réparti. Mais quand quelqu’un qui gagne bien sa vie et ne connait jamais les fins de mois difficiles se plaint de payer trop d’impôts,c’est indécent : de surcroît, présenter l’État comme un voleur alors que ce sont surtout les banquiers, les assureurs, les promoteurs immobiliers qui rackettent la classe moyenne, ça trahit un parti pris bien orienté.

7-Il intègre le comité de soutien à un politicien en campagne électorale.

Bien sûr, on a le droit d’avoir des convictions, d’avoir des sympathies : mais à partir du moment où l’on intègre un comité de soutien à un candidat, peut-on encore prétendre avoir la totale liberté que revendiquent ceux qui rient de tout ? Pas sûr : toute forme d’idolâtrie, y compris l’idolâtrie politique, est par définition un frein à la parole libre. Quand les convictions politiques deviennent profession de foi au point de conduire à rejoindre un comité de soutien, elles deviennent du même coup incompatibles avec la liberté de dérision absolue.

8-Il reprend les arguments de la droite sur l’insécurité.

A l’écouter, le pays serait aujourd’hui au bord de la guerre civile du fait d’une violence qui serait apparue du jour au lendemain de nos banlieues, la faute incombant évidemment aux gouvernements de gauche « laxistes » et aux « déferlantes » migratoires : en se réappropriant cette propagande pour en faire la base de son discours à vocation drôlatique, l’humoriste couché donne à cette propagande une valeur d’évidence qui conforte les beaufs dans leurs préjugés. C’est toujours la même logique : plaire au plus grand nombre, de préférence aux plus cons.

9-Il fait des blagues sur Nabila pour cacher sa propre vacuité.

Chercher à faire rire des débilités qui profèrent les Mongoliens de la télé-réalité, quel intérêt ? Aucun, si ce n’est que ça permet de remplir son temps d’antenne à peu de frais avec des plaisanteries d’autant plus faciles qu’il n’est pas nécessaire de se creuser la tête pour rendre la cible encore plus ridicule qu’elle ne l’est déjà réellement ; ça a également l’avantage de rassurer le Dupont moyen en lui faisant croire qu’il y a des gens plus cons que lui.

10-Il fait rire les journalistes du Figaro.

Pour plaire à ce journal de vieux cons, il ne suffit pas d’être un gros beauf raciste : il faut aussi ne pas faire de vagues, proposer un contenu totalement plat, insipide et émasculé. Car le Figaro n’est pas un journal facho mais un journal conservateur et, à ce titre, allergique à l’innovation : ceux qui font profession de secouer les idées reçues n’ont donc aucune chance d’y trouver un éloge de leur travail ; a contrario, y faire l’objet de critiques positives est un signe qui, généralement, ne trompe pas : ce douteux privilège échoit plus souvent qu’à son tour aux humoristes couchés.

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