La crise c’est eux!

« Le capitalisme est un état du monde et un état de l’âme »

Franz Kafka

 

En guise de propos liminaire, je retire les conclusions de cette citation irresponsable et totalement hors-contexte en me retirant définitivement de la vie papale. Faisons plutôt la cuisine. Prenez un président français à l’égo hypertrophié, un président américain qui inspira un jour des espoirs de changement à des citoyens naïfs qui ne connaissent pas le puissant effet corrupteur du pouvoir, et une chancelière allemande près de ses sous et courroucée par le refus d’obtempérer des pays endettés. Saupoudrez le tout d’un dispositif policier digne d’une guerre civile. Découpez une dette grecque en petits dés de créances bancaires pourries. Faites chauffer sur une chaîne info quelconque (elles le sont toutes), et versez le tout sur une petite cité méditerranéenne habituellement vouée à recevoir un festival de cinéma où la consommation de cocaïne, de champagne et de prostituées de luxe est inversement proportionnelle à la qualité des films présentés. Pour la modique somme de vingt-cinq millions d’euros, vous venez de mitonner un indigeste G20 où l’on va décider du sort de la Grèce. Pour être tout à fait précis, ces 25 millions ne correspondent qu’aux frais de sécurité des chefs d’Etat et de gouvernement présents. Si l’on y ajoute les salaires des pandores, et les cadeaux de luxe offerts aux huiles présentes, on monte à 80 millions, mais peut-on raisonnablement chipoter sur les chiffres quand l’avenir du monde se joue sur la Croisette? N’oublions pas la contribution de diverses entreprises publiques qui cherchaient un bon moyen de creuser leur déficit déjà abyssal, et de quelques banques qui versent leur obole en toute innocence, puisque le délit d’initié ne s’applique pas aux amis de Sarkozy.

Il est vrai que le plat est aussi diététique et roboratif qu’une choucroute en conserve. Fort heureusement, la télévision nous a fourni un puissant émétique pour nous aider à vomir encore plus sûrement qu’à l’écoute d’une comédie musicale de Kamel Ouali. Ce matin dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne sous l’effet de l’azote épandé, Sarkozy et Obama se sont livrés à une séance d’autocongratulation alors qu’ils n’avaient encore rien glandé. J’ai vu le moment où ils allaient se faire un soixante-neuf devant les caméras pendant qu’Angela Merkel leur titille la glande à égo. Oserai-je l’avouer, bien sûr que je vais oser car la longueur de cette phrase n’est qu’un subterfuge destiné à entretenir le suspens, et si vous n’en pouvez plus rendez-vous à la fin de cette tirade qui s’achève précisément ici. Oserai-je l’avouer, disais-je avant d’avoir été interrompu par le suspens, mais en les voyant se déclarer leur flamme j’ai eu une envie brutale de voir Cannes disparaître sous les eaux, j’ai senti monter le désir d’un gigantesque tsunami qui ferait disparaître à la fois ces pompeux cornichons et cette cité bourgeoise, vulgaire et gérontocratique, je me suis vu ouvrir les mâchoires de ces tristes Zorros de la finance à l’aide d’un cric pour leur enfoncer dans le gosier des kilos de poudre à canon, bref vous l’aurez compris j’étais légèrement agacé. Sauf erreur de ma part, mais ça m’étonnerait je me trompe si rarement, Sarko a préparé ce G20 avec le Medef et les banques, et à aucun moment les syndicats de travailleurs et les représentants d’entreprises publiques n’ont été consultés, alors qu’ils sont (et partant nous sommes tous) concernés au premier chef par les décisions qui seront prises avec toute la publicité afférente lors de ce sommet de si peu d’altitude.

Le message est donc clair: on s’est mis d’accord pour prélever des miettes à la finance, maintenant les pauvres rentrez chez vous au lieu de salir les trottoirs niçois et cannois, on a un système bancaire à sauver. Mais bougres de fieffés petits marquis empapaoutés, la crise c’est vous! La crise c’est votre obsession pour la croissance alors que vous savez mieux que moi que dépanner une voiture qui vient de s’éclater sur un platane en répartissant les membres de ses occupants sur 300 mètres crée plus de croissance à court terme que la recherche scientifique publique, qu’un stade rempli de bovins et de publicité est plus rentable pour le PIB que la pérennisation de la sécurité sociale, ou qu’une centrale nucléaire rapporte plus de capitaux que l’agriculture biologique et le commerce équitable. Et pis que tout, vous savez que vos guerres absurdes assurent une croissance à deux chiffres à l’industrie des tueurs et au bâtiment, et que les sommes astronomiques engagées pour que vous vidiez le mini-bar du Carlton en méditant sur la félonie de Papandréou seraient mieux placées dans les caisses de l’UNESCO. Et ce qui m’enrage encore plus que tout, c’est que vous trouverez toujours des cons pour voter pour vous, tant vos réserves de démagogie seront toujours mieux alimentées que les budgets alloués à la culture, à l’éducation et à la solidarité nationale. Comme je viens de renoncer à l’infaillibilité papale en début d’article, je n’ai plus besoin de faire semblant d’aimer mon prochain et je vous le dis tout net: j’ai hâte que revienne la mode de placer les têtes de cons sur des piques. après un procès équitable bien sûr, nous ne sommes pas des bêtes.

Dans un prochain épisode, nous recouvrerons notre calme en nous disant que François Hollande nous sortira bientôt de cette fange. Pouf pouf.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *