POULET DE PRESSE n°33

 « Quand les cent bouches de la renommée se taisent, ça fait plus de bruit que lorsqu’elles parlent. » (Pierre Dac)

Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! Qui parle encore, aujourd’hui, de l’incendie criminel (et indéfendable) qui a rayé de la carte les locaux de Charlie hebdo ? Personne… C’est ça, le triomphe du zapping : Vroum ! Roulez, jeunesse ! Ce n’est plus de l’information, qu’on fait, ce de la formule 1 !

Charlie Hebdo, n°1012 (9/11/2011) : L’avantage, c’est qu’à présent, le battage médiatique autour de cet événement étant déjà passé, on peut se permettre de critiquer Charlie sans être ostracisé… Vous savez quelle est la différence entre Siné mensuel et le Charlie hebdo d’aujourd’hui ? Le premier est un journal de prolos indignés, le second est un journal de bobos résignés. J’exagère peut-être, mais j’ai parfois l’impression, en lisant Charlie, d’avoir affaire à un Siné hebdo qui aurait les mêmes dessinateurs (la plupart des caricaturistes de Charlie auraient parfaitement leur place chez Siné, d’ailleurs Willem y est déjà) mais dont les rédacteurs auraient presque tous été remplacés par Michel Onfray ! Exception, évidemment, de Cavanna et aussi de Charb, même si son « apéro » (depuis le départ de l’infâme Philippe Val, plus question d’utiliser l’abominable mot « éditorial ») dans le numéro paru la semaine ayant suivi l’incendie montre qu’il accusait encore le coup. On ne peut pas lui en vouloir, on serait découragé par moins, non ? Ce numéro, en fait, était celui où Charlie pansait ses blessures : en publiant dans ses colonnes une bonne partie des messages de soutien qu’elle avait reçus, la rédaction meurtrie voulait éviter de se sentir seule face à l’adversité. Les messages des politiciens ? Charlie a su séparer le bon grain de l’ivraie et n’en ont publié que trois, dont ceux d’Eva Joly et de Jack Ralite, deux élus dont la réputation les met à l’abri des accusations de calcul électoraliste… Le message de Hollande ? Il est en campagne, oui, mais il avait témoigné en faveur de Charlie lors du procès intenté suite à la publication des caricatures danoises en 2006, il s’était donc personnellement engagé, ce qui plaide en faveur de sa sincérité quand il défend la laïcité et la liberté de la presse. Me font plus tiquer, en revanche, les messages des autres patrons de presse, ces « collègues [qui] attendent le pavé Molotov pour découvrir que nous existons » pour reprendre l’expression de Cavanna dans sa chronique décalée et au-dessus de la mêlée (et donc bienvenue), à commencer par celui du directeur adjoint du Figaro : le soutien d’un journal qui a participé activement à l’entreprise sarkozienne de stigmatisation des musulmans de France risque d’être lourd à porter… En revanche, pas un mot du soutien de Siné mensuel dont la rédaction a publié un message sur la page d’accueil de son site web et a même, si j’en crois la dessinatrice Coco, envoyé un message personnel à Charb ; c’est bien mal remercier « le journal qui fait mal et ça fait du bien » de ranger son remuant fondateur, au motif « qu’il n’aime personne », parmi les coupables potentiels de l’incendie comme l’a fait Wolinski ! Remercions donc Willem d’avoir procédé à un rééquilibrage relatif en signalant le dernier bouquin de Siné, Mon dico illustré, dans sa colonne… Une dernière chose, concernant ce numéro de Charlie : Cabu y signale que les indignés américains du mouvement Occupy Wall Street occupaient un « square privé (…) prêté par un sympathisant. C’est pourquoi les flics ne peuvent pas pénétrer à l’intérieur du square. » La dispersion du campement n’avait évidemment pas encore eu lieu : mais alors, quel prétexte les poulets américains se sont-ils donnés pour pouvoir casser du gauchiste ? Outrage aux forces de l’ordre, peut-être : c’est commode, avec un tel chef d’accusation, la police est à la fois juge et partie ! Ou alors trouble à l’ordre public, c’est bien, ça aussi : personne ne sait ce que c’est exactement, alors la police a le champ libre pour traduire par « on ne veut voir qu’une seule tête » !

Siné mensuel, n°3 (novembre 2011) : La troisième livraison du « journal qui fait mal et ça fait du bien » est arrivée le jour de l’incendie, le numéro avait donc été bouclé avant que la nouvelle de l’incendie ne fût tombée voire même peut-être avant que le feu ne fût allumé. Résultat, les seuls barbus dont il est question sont ceux qui ont la majorité à la chambre en Tunisie, au grand dam de Willis from Tunis qui n’en perd pas pour autant l’envie de lutter, comme en témoigne cet excellent résumé : « La révolution est finie ! L’opposition commence ! » Elle a bien raison, Willis, d’autant que les bonnes raisons de lutter ne manquent malheureusement pas et que les espoirs de réussite ne manquent heureusement pas non plus. Parmi les bonnes raisons de lutter, le dé-tricotage des acquis de 1945 en matière de sécurité sociale, sur lesquels le docteur Grimaldi (sûrement aucun lien de parenté avec la famille régnante de Monaco !) revient dans l’entretien qu’il accorde à Véronique Brocard. Pour vous donner une idée, saviez-vous que les primes aux mutuelles ne sont pas proportionnelles aux revenus et coûtent donc plus cher aux pauves qu’aux riches ? Cela va directement à rebours de l’esprit de ce que doit être la sécurité sociale ! Dans le même ordre d’idées, les associations venant en aide aux démunis sont aujourd’hui contraintes d’adopter des méthodes de management dignes de chez France Télécom (« De brillants gestionnaires ont remplacé les bons vieux bénévoles au sein des conseils d’administration »), laissant le soin d’encadrer les plus pauvres aux seules forces de l’ordre ; signalons aussi que la dette publique, comme le rappelle Ian Hamel, n’a pas pour coupable les méchants pauvres qui abusent des congés maladies mais les gentils riches qui cachent au fisc des sommes monstrueuses dans des banques suisses qui ne savent plus quoi faire de tout ce pognon. Bon, voilà pour les bonnes raisons de lutter, un peu d’optimisme, maintenant ; les caissières du Dia d’Albertville ont manifesté deux ans pour garder leur droit au repos dominical : gagné ! Ensuite, les employés de Goodyear en Picardie luttent depuis cinq ans pour refuser les cadences infernales et les licenciements : gagné aussi pour l’instant ! Les hommes qui ont tenu l’armée en échec sur le plateau du Larzac dans les années 1970 se sont mobilisés récemment contre les compagnies qui voulaient exploiter le gaz du Schiste dans le théâtre de leurs luttes passées : gagné ! Bref, n’écoutez pas les résignés professionnels : la seule existence de Siné mensuel prouve que le combat peut payer. Enfin, faites ce que vous en voulez !

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Le canard enchaîné, n°4750 (9/11/2011) : Revenons à l’incendie dont Charlie fut la victime ; Le Canard enchaîné ne pouvait évidemment pas passer à côté, mais l’article de Louis-Marie Horeau à ce sujet me laisse perplexe ; une fois passée la réaffirmation du soutien inconditionnel apporté à Charlie dans cette épreuve, le journaliste réaffirme « le droit pour les musulmans, par exemple, de critiquer le blasphème ». Blasphème ? Dans une république laïque, ce mot ne devrait même pas avoir d’existence juridique. Il est plus juste de dire qu’une confession a valeur d’opinion et a donc le droit de se défendre par des moyens pacifiques comme elle a le devoir d’accepter la critique. Bon, il ne s’agit encore là que d’un terme mal choisi, mais il est autrement plus gênant d’invoquer le « retard historique pris par l’islam pour faire sa nécessaire révolution laïque » : c’est faire peu de cas de l’attitude de la majeure partie des musulmans de France si l’on en croit les études d’opinion sérieuses relayées en ces termes par Vincent Tiberj dans l’ouvrage collectif Pour changer de civilisation : « Repli sur soi et communautarisme ? Avec Sylvain Brouard, nous avons estimé à moins de 5% la population des Français d’origine maghrébine, africaine et turque rejetant l’identité française au profit d’une identité communautaire ou religieuse. On peut bien entendu s’inquiéter de ce comportement minoritaire, mais cela implique que 95% de cette population n’est pas touchée. Islamisation et remise en cause des valeurs républicaines ? (…) Pourtant être musulman n’induit pas de rejet de la laïcité : pour plus de 80% des musulmans, elle évoque « quelque chose de positif » et une proportion similaire est d’accord pour dire qu’ « en France, seule la laïcité permet à des gens de convictions différentes de vivre en ensemble.. » De même, Horeau aurait dû être plus précis ensuite : « La majorité des chrétiens a fini par admettre que leur dieu, pas plus qu’un autre, n’a vocation à gouverner la cité. Les musulmans, pas encore, pas tous. » La majorité des chrétiens ? Mais de QUELS chrétiens ? Pas des chrétiens espagnols, polonais ou américains, en tous cas ! Si on se limite aux chrétiens de France, c’est vrai, mais là encore, ce n’est QUE la majorité : tous les musulmans n’ont pas encore admis la séparation entre le temporel et le spirituel, mais l’attaque du théâtre de la Ville a prouvé que tous les chrétiens n’ont pas encore viré leur cuti théocratique ; en France, musulmans et chrétiens en sont au même stade, ils sont des milliers à vivre sans emmerder personne, mais il y en a quelques-uns qui en sont encore au moyen-âge et qui font assez de bruit pour discréditer tous les autres : parler d’un retard de l’islam (d’autant que l’islam est loin d’être monolithique !) à cet égard par rapport au christianisme est injustifié. Enfin, Horeau va un peu vite en besogne dans sa conclusion : « Le blasphème, la représentation grotesque ou humiliante du Prophète ne peut être interdite sous prétexte de loi divine. Mais elle touche indistinctement les [croyants pacifiques] et les intégristes. » Ah bon ? TOUS les croyants, sans exception, sont incapables de comprendre l’humour ? Se foutre de la gueule des religions, c’es prendre le risque « de pousser quelques musulmans choqués dans les bras des ultras » ? On dirait du Michel Droit ! Au final, pour rester dans cette affaire, plus intéressant était le petit texte de Didier Hassoux révélant que la police antiterroriste connaissait les risques d’attentat contre la rédaction de Charlie mais n’a rien fait pour protéger leurs locaux, tous les effectifs étant retenus à Cannes pour le G20 ! Sans commentaire…

Avant-Garde, n°11 (octobre-novembre-décembre 2011) : Ça existe encore, les jeunes communistes ? Apparemment, oui, puisqu’ils produisent une revue de huit pages (dont deux de publicité) qui paraît tous les trois mois : le parti n’a vraiment plus beaucoup de finances… Bon, leur revue a la vertu d’expliquer pédagogiquement d’où vient la crise actuelle : « l’obligation a été faite aux États d’emprunter aux marchés pour leur financement plutôt que directement à la banque centrale (qui peut prêter sans taux d’intérêt). Donc il faut non seulement rembourser ma dette mais aussi les intérêts de celle-ci qui peuvent être très élevés. » En clair, petit travailleur laborieux, cesse de culpabiliser, tu n’y es pour rien ! Tu avais raison de travailler sans te poser de questions, c’est toi qui as produit les richesses, les seuls responsables du merdier actuel sont tes patrons et tes dirigeants politiques qui ont gâché ce que tu as produit en jouant à un jeu couillon dont les règles sont déjà un attrape-nigaud ! Maintenant, cesse de travailler, fais-leur plutôt savoir que tu n’as plus envie…pardon, que tu n’as jamais eu envie de jouer à ce jeu où tu perds à tous les coups ! À part ça, sur le fond, comme tous les journaux ouvertement militants, Avant-garde risque fort de ne convaincre que les convertis : un moindre mal car lesdits convertis ne sont pas tous convaincus de la légitimité du combat, et Avant-garde a beau jeu de glorifier à chaque page la jeunesse en lutte contre l’injustice, il n’en reste pas moins que la jeunesse peut aussi être ce que Siné mensuel (comment ça, « encore » ?) dépeint dans son reportage sur la lutte des caissières d’Albertville : « Et les jeunes, ils ne se sentent pas concernés ? Dimanche, à l’heure de l’apéro, ils étaient assis par dizaines à la Brasserie de la gare d’Albertville. Certains n’étaient même pas au courant du combat des caissières de Dia… » Et oui, la jeunesse, ça peut être aussi bien la fougue révolutionnaire que l’égoïsme consumériste. Choisis ton camp, camarade !

Ouest France, n°20445 (14/11/2011) : En moins d’un siècle, nous sommes passés d’un extrême à l’autre : de l’enfant synonyme de « tuile », de « bouche à nourrir supplémentaire », de « charge nouvelle pour un couple » et donc mal-aimé, mal encouragé, traité comme un rien du tout, à l’enfant désiré, attendu, espéré et donc sur-couvé, surprotégé, traité comme un roi. Ouest France donne un exemple éloquent de cette évolution avec le petit article de Samuel Nohra, « De plus en plus de parents croient avoir un surdoué ». Notez que Nohra ne fait pas explicitement le lien entre ce changement de statut de l’enfant dans la société et la prégnance de cette croyance nouvelle, mais il est évident, même si ce n’est pas la seule explication : « La « surdouance » occupe autant les discussions familiales que le domaine médical. Et le sujet donne lieu à encore plus d’idées reçues. La plus évidente : l’enfant surdoué réussit toujours à l’école. En fait, un sue trois est en échec. Cette révélation, diffusée depuis quelques années, mieux connue du public, active désormais un fantasme contraire : les enfants qui ont du mal en classe sont donc des surdoués, empêtrés dans leur pensée complexe. Et cette idée-là séduit de plus en plus. » La recette est la suivante : prenez un fait reconnu, l’échec scolaire des surdoués, répandez-le dans l’esprit du grand public qui se chargera de le comprendre de travers en traduisant « certains surdoués sont mauvais élèves » par « les mauvais élèves sont des surdoués », laissez se développer le tout sous l’action de l’amour démesuré des parents d’aujourd’hui pour leurs enfants, et vous verrez élevés au statut de surdoués des petits branleurs qui n’en rament pas une en classe ! Chaunu, auquel on doit déjà l’excellent dessin, devenu une référence pour certains enseignants, où les parents disent « c’est quoi, ces notes ? » d’abord à l’enfant en 1981 puis au professeur en 2011, représente assez bien la bêtise de cette croyance en la « surdouance » de la progéniture avec son illustration de l’article : le père prend acte, effaré, des notes catastrophiques de son fils tandis que la mère s’extasie en clamant « notre fils et un sourdoué ! » Toujours dans Ouest France, la page culture propose trois choses alléchantes : premièrement, le retour des Pieds nickelés ! Non, il ne s’agit pas des pâles copies aseptisées de Riche et Oiry (envers lesquels Laurent Beauvallet est un peu trop indulgent à mon goût) mais de vrais pieds nickelés modernes animés par Luz, Ptiluc et Malka. Je n’ai pas encore lu l’album, mais la case qui en a été extraite pour illustrer le texte de Beauvallet a de quoi séduire, Luz et Ptliuc ayant su retrouver la vivacité et la nervosité de Pellos et Malka faisant tenir à Croquignol des paroles dignes de la morale cynique des antihéros créés par Forton, « Réclamer le RSA ? Jamais ! L’argent ne se réclame pas, il se vole ! » Beauvallet, notez bien, se trompe en affirmant qu’il s’agit de la première B.D. de Luz à qui l’on doit déjà, entre autres, Un turc est entré dans l’Europe (Charlie hebdo, 2005, en collaboration avec Bernard Maris), Claudiquant sur le Dancefloor (Hoëbeke, 2005), Robokozy (Les Échappés, 2010) et quelques histoires courtes parues dans Fluide Glacial période Albert Algoud : il est plus exact de dire qu’il s’agit de sa première B.D. proche, dans la forme, des canons classiques du genre et qu’on ne peut résumer à une continuation de son travail de dessinateur de presse. Deuxièmement, toujours dans les hommages aux héros légendaire du 9ème art, l’excellent Larcenet nous offre sa vision de Valérian et Laureline de Christin et Mézières ; ça promet… Troisièmement, enfin, le musée des arts décoratifs offre à Jean-Paul Goude une exposition à la hauteur de sa douce folie – pour que je dise du bien d’un mec qui a fait de la pub, il faut qu’il ait vraiment beaucoup de talent !

Un autre exemple d'enfant surdoué...dans son domaine, of course !

Bikini, n°4 (novembre-décembre 2011) : Je me demande si ce journal gratuit que l’on voit partout sur le campus brestois marche vraiment ; c’est la question que je me pose chaque fois que je vois un journal consacrer un dossier à un sujet passablement racoleur, ici, en l’occurrence, le marché de la pornographie… Remarquez, je m’en fous, je me suis surtout intéressé aux deux autres dossiers : l’un parle des sosies et nous révèle qu’il n’y a que trois sosies reconnus en Bretagne ! Et encore…le premier est un sosie d’Elvis, et Dieu sait s’il n’est pas difficile pour n’importe quel rondouillard, sous le costard à paillettes, les verres fumés et la banane, de ressembler physiquement au king ! Notez, si Jessy Morgan (c’est son nom) réussit à être convaincant auprès des soudards de l’IUT de Lannion, c’est qu’il a su capter le jeu scénique de son idole. Le deuxième, Johnny Junior, ne ressemble même pas à Johnny Halliday et n’en est que le sosie…vocal ! Le troisième, enfin, est un sosie de Pierre Bachelet ; la classe, ça fait peut… Le deuxième dossier est consacré au squat de Groix ; attention, il ne s’agit pas d’un repère pour clochards et sans-papiers, même si le confort est assez spartiate, mais de la « maison commune » qu’occupent illégalement quelques libertaires qui disent merde à la propriété privée et disent oui à la vie, non sans se priver d’en mettre, de la vie, sur l’île ! Pour combien de temps encore ? Bonne question, en partie suspendue au bon vouloir de la mairie de Groix qui a donné son aval l’année dernière pour la destruction de cette maison, qui a appartenu jadis à une ancienne résistance (chapeau, le devoir de mémoire et le respect du patrimoine !), en vue de revégétaliser le vallon ; en clair, les élus, non content d’avoir fait de l’écologie un gadget électoral en font un prétexte pour poursuivre la chasse aux ceusses qui ne rentrent pas dans le moule… Encore deux choses qui m’ont marqué en lisant Bikini : en un, le petit texte d’Isabelle Jaffré sur l’application de la loi interdisant les open-bars donne l’occasion à deux grandes gueules de la planète étudiante de recracher ce dont leurs aînés leur ont bourré le crâne : « Les soirées étudiantes, organisées par les assos, doivent aussi être signalées en préfecture. De quoi mettre un terme aux Smirnoff offertes. « Il y a une prise de conscience face à l’alcool » constate Mathias Causeur de la LMDE. » J’aime le mot « prise de conscience » : il en parle comme d’un problème aussi grave que l’effet de serre ou les ravages du capitalisme ! Mais laissez-nous nous enivrer, à la fin, c’est un de nos rares luxes ici-bas ! Vous en voulez un peu plus ? « On essaie aussi de proposer des alternatives : soirées sports ou culturelles, ajoute Antoine Pierchon, président de la FédéB de l’Université de Bretagne occidentale ». Culturelle, ça peut aller, mais sport, ça va pas la tête ou quoi ? Le soir, entre suer sang et eau comme si la vie quotidienne n’était pas assez difficile et me bourrer la gueule, mon choix est vite fait ! Encore un héraut de l’idéologie hygiéniste qui veut aseptiser nos vies ! En deux, je me souviendrai longtemps de ce sketch des Grolandais mettant en scène un groupe punk « pour enfants sages » : on y voit le leader du groupe répondre aux questions du journaliste pendant son goûter, qu’il prend sous l’œil attentif de maman, précisant que lui et ses copains répétaient après avoir fait leurs devoirs… Cette caricature m’est revenue à l’esprit en lisant la réponse qu’Enguérand (Ouah, le prénom ! Pauvre gosse…), du duo électro Carbon Airways, a faite à Julien Marchand : « On bosse sur nos compos le soir, après les devoirs, et le wwek-end. » Je suis parfaitement injuste de faire le rapprochement car les deux musiciens n’ont que 14 et 15 ans et ne revendiquent aucune rebellitude de supermarché : mais que voulez-vous, mauvais esprit, quand tu nous tiens !

Sept jours à Brest, n°1 (9/11/2011) : Et hop, encore un nouveau journal gratuit ! Sept jours à Brest vient occuper un créneau libéré par feu Bretagne plus, avec un objectif néanmoins plus modeste car il n’y est plus question de l’actualité de toute la Bretagne mais uniquement de celle de la région brestoise. Je mentirais si je disais qu’il y a beaucoup d’articles qui m’ont marqué, mais comme le propre des journaux gratuits est de vivre uniquement grâce à la publicité, tout ce qui peut surprendre le lecteur est évidemment banni… Notez, j’ai quand même sursauté en ayant vent, par le biais de ce journal, de deux nouvelles idées comme savent en trouver les grands pontes de Brest : premièrement, implanter dans la cité du Ponant un service de location de vélos… électriques ! Argument : la topographie brestoise, avec ses rues en pente, rend l’usage du vélo classique utopique. Contre-argument : qu’est-ce qu’on a besoin de rouler à vélo ? – Ben c’est plus écologique… – Si ton vélo est électrique, il ne peut pas être écologique, hé, banane ! Ton argument sera recevable quand toute l’électricité de France viendra des énergies renouvelables, et on en est loin ! Deuxièmement, installer un téléphérique au-dessus de la Penfeld reliant le bas de la rue de Siam et le plateau des Capucins ! Déjà que j’ai la trouille sur les ponts, alors là, vous pensez ! Tenez, tout cela me rappelle ce passage d’une chanson des Goristes sur le tramway : « Pourquoi pas un téléphérique de la route de Paris à celle du Conquet, / avec pleins d’ascenseurs hydrauliques comme stations pour les passagers, / boulevard Jean Moulin, des tire-fesses, et dans la Penfeld des ferry-boats, / circuler uniquement en Solex entre le Guelmeur et Kergoat. » Une fois encore, la caricature a dépassé la réalité… Allez, kenavo !

BONUS : J’ai dit du bien de Jean-Paul Goude, tout à l’heure. Pour mémoire, je vous repasse donc cet extrait, qui lui est consacré, du « poulet de presse » que j’avais pondu pour notre journée spéciale eighties :

Première n°111 (juin 1986) : Est également au programme du magazine ce mois-ci une interview de Jean-Paul Goude, ce génial créateur d’images qui a vraiment su renouveler considérablement la façon de tourner un clip ou une pub ; je l’apprécie encore plus maintenant que j’ai conscience du fait qu’il ne se prend ni pour un artiste ni pour un tâcheron : il a suffisamment d’estime pour son savoir-faire pour ne pas accepter n’importe quelle concession – c’est pourquoi ses créations restent profondément extraterrestres – mais pas assez pour se complaire, comme d’autres réalisateurs, dans la branlette intellectuelle qui n’intéresse que lui et quelques curieux (« Je suis un grand adepte du cinéma-spectacle. Or un spectacle qui n’a pas de public est un spectacle raté. ») et se lancer dans le long-métrage alors qu’il n’a pas encore de sujet…

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