Galerie de portraits (8) : Henri Guaino.

 

Henri Guaino

Devezh mat, Metz, mont a ra ? La question que personne ne se pose en ce moment est la suivante : de quoi Henri Guaino est-il le nom ?

Je compte parmi mes relations des gens de droite qui, sans se reconnaître dans le sarkozisme, n’en saluent pas moins le talent littéraire de Guaino ; si on ne tient compte que du style et si on garde à l’esprit qu’en littérature, comme en musique ou en peinture, il en faut pour tous les goûts, ça peut se comprendre. Dans ce cas, on ne peut que déplorer que Sarkozy n’ait pas eu Guaino avec lui lors d’une tristement célèbre visite au salon de l’agriculture, son fidèle conseiller lui aurait peut-être soufflé une réplique un peu plus élégante que « casse-toi, alors, pôv’ con » ! D’autre part, le talent littéraire, si tant est que Guaino en ait vraiment (je ne me prononcerai pas là-dessus, ce n’est pas l’objet), n’excuse pas tout : de même qu’on ne peut pas pardonner à Louis-Ferdinand Céline d’avoir été le chantre des nazis jusqu’au bout, on peut difficilement pardonner à Guaino d’avoir résolument mis sa plume, aussi belle soit-elle, au service d’une idéologie dégueulasse dont la France paie encore aujourd’hui les conséquences, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur : le tristement fameux discours de Dakar, véritable tartine d’une mauvaise bouillie néo-colonialiste, n’a pas aidé notre pays à redorer son blason souillé de sang en Afrique… Bref, ça n’a pas l’air d’empêcher de dormir Guaino, mais à sa place, je ne serais pas fier d’avoir écrit ce qu’il a écrit pour son seigneur et maître !

On aurait pu espérer que la défaite dudit seigneur le fasse tomber dans un oubli mérité ; malheureusement, contrairement à son ex-collègue Claude Guéant qui a eu moins de chance auprès des électeurs, il a été élu député des Yvelines, lui donnant ainsi une situation privilégiée pour défendre à tout crin l’œuvre de son Nicoléon chéri, ce dont il ne se prive pas : en un an, deux coups d’éclats sont à mettre au compte de ce personnage auparavant assez discret, à commencer par son discours à l’Assemblée où, pour argumenter contre la loi sur le mariage pour tous, il faisait part de sa détresse d’avoir été élevé par deux femmes… J’avais trouvé cette démarche complètement idiote pour une bonne raison : ou bien il part du principe qu’un enfant élevé par deux personnes du même sexes sera forcément déséquilibré et alors il avoue qu’il n’est pas assez sain d’esprit pour être député et s’exprimer à l’Assemblée, ou bien il part du principe qu’il est assez sain d’esprit pour être député et s’exprimer à l’Assemblée et alors il prouve qu’un enfant élevé par deux personnes du même sexe peut parfaitement supporter cette situation, suffisamment en tout cas pour en arriver là où il est ! Dans le premier cas, son discours n’a aucune légitimité puisqu’il est le fait d’un déséquilibré ; dans le second cas, sa personne dément complètement le fond de son propos. Bref, la contradiction était totale : en avait-il conscience ? Peut-être pas, ce qui explique qu’il se soit trompé et ait finalement voté pour cette loi sur laquelle il criait haro !

Le deuxième coup d’éclat m’a fait tomber de ma chaise : je ne parle pas tant de ses attaques acerbes contre le juge qui a mis Sarkozy en examen, la droite n’en est déjà plus à sa première atteinte à l’indépendance de la justice, je me souviendrai longtemps des torrents de récrimination que l’UMP avait déversées en chœur à la suite de la condamnation d’Alain Juppé. M’a davantage fait dresser les cheveux sur la tête son refus de s’expliquer auprès de la police : alors là, c’est fort de café ! Imaginez qu’une « caillera » de banlieue ou, plus simplement, un citoyen de base, se permette d’avoir le même comportement : Guaino serait le premier à monter au créneau, à dénoncer le « laxisme » des socialistes, à réclamer la démission de Valls, à pleurer sur une société qui serait de plus en plus violente, où l’ordre et les valeurs seraient menacées ! Mais lui, non, il a le droit de désobéir à la police, et le pire, c’est que c’est vrai : la caillera de banlieue et le citoyen de base évoqués plus haut auraient déjà eu mille fois le temps, à l’heure qu’il est, de se faire plaquer au mur ou au sol par douze flics armés de tasers et de flash-balls et leur hurlant des gentillesses telles que « Bouge pas, enculé » ou « Un ton en-dessous, fils de pute » ! Mais Guaino, non, pas de danger pour que ça lui arrive !

05-14-Guaino

Conclusion : Guaino est le nom de la grande bourgeoisie dans ce qu’elle a de plus monstrueux, la bourgeoisie pour laquelle le temps s’est arrêté en 1913, celle qui considère tout ce qui ne porte pas une cravate et un col blanc comme un loufiat ou un moins que rien, celle qui s’enrichit sur le dos des colonies et se félicite que les blancs soient là pour aider ces grands enfants que sont les noirs, celle qui ne voit pas d’autre salut pour la société que celui de la répression la plus dure qui soit, celle qui prône l’extermination des « apaches » mais fait mille fois pire dans la catégorie « sales coups » à l’abri des lambris dorés de leurs salons feutrés (il faudrait que je trouve une nouvelle expression, j’ai tendance à me répéter) sans même avoir l’excuse ne pas avoir d’autre choix pour survivre, celle qui sort les crucifix quand une veuve épouse un divorcé, celle qui se croit éternellement au-dessus des lois et de notre mépris… Bref, il est le nom de la bourgeoisie qui refuse la réalité d’un monde qui change : en restant collé à ses principes moraux intangibles comme une moule à son rocher, il croit s’acheter une bonne conscience et rester du « bon côté », mais il ne faut pas grand’ chose pour que sa turpitude éclate au grand jour sous la forme d’une crapulerie et d’un mépris des autorités que ne renierait aucun caïd de banlieue, caïd entre lequel et Guaino il n’y a jamais qu’un portefeuilles bien garni de différence… Kenavo, les aminches !

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