Le journal du professeur Blequin (26)

Dimanche 17 novembre

11h : Me revoilà au salon du livre où je donne une conférence. J’avais apporté un projecteur pour illustrer mon propos avec un power point mais, bien sûr, ça ne marche pas : le projecteur marche très bien mais mon PC refuse de le reconnaître, ce qui ne m’étonne pas outre mesure car je n’ai jamais réussi à projeter son image. Comme je suis déjà d’assez mauvaise humeur, ce qui commence d’ailleurs à entamer la patience des organisateurs, et que ma propre patience est carrément inexistante quand il s’agit de technique, je décide donc de faire sans : de toute façon, les spectateurs ne sont pas nombreux et n’ont qu’à s’approcher pour voir l’écran de mon ordinateur. Ma communication est néanmoins appréciée, un des auditeurs était même persuadé que j’improvisais, ce qui veut dire qu’on n’a plus l’impression, comme jadis, que je me borne à lire un texte. On me propose ensuite de redonner ma conférence à l’Avenir, qui est une sorte de ZAD en plein centre de Brest : j’accepte à reculons, non par peur de ce terrain que je connais déjà et que je sais donc peu (et même pas du tout) dangereux, mais simplement parce que je pensais que cette troisième représentation de ma conférence serait la dernière ; toutefois, comme le public ne se presse toujours pas pour venir à ce salon et que je vais donc garder un certain stock d’albums sur les bras, une nouvelle opération de promo, même dans un endroit assez improbable, ne sera peut-être pas de trop !

18h30 : Le salon est fini, la fréquentation n’a pas été meilleure qu’hier. Tout le monde semble satisfait mais je garde un couteau au cœur, je ne peux m’empêcher d’avoir de la peine pour Claire et Harold qui se sont donnés beaucoup de mal et en ont été mal récompensés par une population ingrate ! Je ne suis même pas le plus à plaindre car je ne repars pas complètement bredouille, mais je m’attendais vraiment à mieux. Encore une fois, ce n’est pas la faute aux organisateurs qui ont assuré comme des dieux, mais les gens ne veulent plus faire d’efforts : ils demandent l’ouverture des magasins le dimanche, mais profiter du week-end pour aller rencontrer des auteurs dans une salle éloignée du centre-ville, c’est trop leur demander ! Quand je pense que je vais aux quatre coins de la ville pour prendre des photos qui ne seront pas publiées, que je me casse la tête pour préparer des cours et des conférence qui n’intéresseront que trois personnes, que je me mets la rate au court-bouillon pour des détails que personne d’autre ne remarquera et qu’en plus, c’est moi qu’on traite de fainéant parce que je suis inscrit comme demandeur d’emploi, je suis écœuré… Du côté des satisfactions morales, j’ai pu rencontrer un homme qui a eu l’opportunité de rencontrer en chair et en os quelques-uns de mes maîtres à déconner : j’ai ainsi appris sans surprise que Choron, malgré son titre de professeur, n’était pas un intellectuel et ne jurait que pour les blagues de sous-off. Bah, je peux attester qu’il y a beaucoup de « vrais » professeurs qui ne sont pas plus fins ! N’empêche que les dessinateurs qui l’avaient laissé tomber avaient des excuses, n’en déplaise à Pierre Carles. Gébé, lui, était peu loquace : lors d’une conférence sur la presse écrite, il n’a parlé que pendant trente secondes pour dire simplement que la presse française était pourrie ! Quant à Willem, il parait que son regard fait peur… Voilà ce que j’ai en tête tout en attendant le bus, qui ne doit arriver que dans une demi-heure, sous un pluie battante… Vivement demain. 

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