Le journal du professeur Blequin (63) Une journée en non-Enfer

Mardi 3 mars

11h : Les médias nous rebattent les oreilles avec le Coronavirus : il y avait longtemps qu’ils n’avaient pas eu une bonne grosse pandémie pour effrayer le populo ! En attendant, à Brest, où il y a pourtant eu au moins un cas, il y a encore autant de gens dans les rues qu’il peut y en avoir dehors par ce temps encore incertain voire franchement maussade par moments, et je ne vois personne porter un masque à la con. On est en train de parler des « foyers de contamination » comme si c’étaient des endroits aussi dangereux que la zone contaminée de Fukushima, mais il ne faut pas se leurrer : je vous assure que si on y risquait vraiment sa vie, la plupart des journalistes de la presse régionale ne s’y aventureraient pas ! Au bureau de poste, je surprends la conversation entre une postière et un usager : ils parlent de l’augmentation des tarifs des opérateurs téléphoniques, consécutive à l’avènement de la 5G (c’est quoi, ça, à la fin ?) et déblatèrent sur les satellites qui vont nous fliquer de plus belle… Pour des gens qui, d’après les médias, devraient vivre dans la terreur d’une grave maladie, je trouve que leurs préoccupations n’ont pas trop changé !

12h40 : Nouveau déjeuner à la Fabrik 1801, mais seul, cette fois ; après le « steakhouse » de la dernière fois, j’essaie le « foodcourt »: c’est moins cher mais c’est aussi moins bien. Je retrouve le même système de « bipeur » que dans la friterie où j’ai mes habitudes, mais comme il est défectueux justement ce jour-là, je dois attendre vingt bonnes minutes avant de devoir me lever pour récupérer une « pizza savoyarde » qui me déçoit quelque peu… Grâce à un bon qu’on m’avait offert, il me reste moins de la moitié du prix à payer : heureusement, car ça ne valait pas le montant complet !

13h10 : Je déteste explorer l’espace jeunesse de la médiathèque des Capucins : j’ai toujours peur que quelqu’un m’y surprenne et m’accuse de régresser ! Mais est-ce ma faute si les ânes qui gèrent les collections des bibliothèques publiques s’obstinent à ranger les albums de Goscinny parmi les lives pour enfants ? Le jour où ils auront compris qu’il faut un minimum de maturité pour apprécier pleinement la satire que le grand René faisait de ses contemporains (et qui, plus de quarante ans après sa mort, reste actuelle), l’humanité aura fait un grand pas et les exégètes dont je fais partie ne seront plus obligés de se balader dans des rayonnages bourrés de nunucheries ! Cela dit, parmi ces BD « destinées à la jeunesse », j’ai la surprise d’aviser un album de… Dickie de Pieter de Poortere ! S’ils avaient pris la peine d’ouvrir ce livre, ils se seraient aperçus tout de suite que ce n’est absolument pas pour les gosses ! Mais ça ne m’étonne pas : dans la médiathèque de Guilers, les albums Gai-Luron en slip et Radada la méchante sorcière figuraient eux aussi dans les rayonnages pour enfants… Je n’incrimine pas les bibliothécaires qui font souvent un excellent travail : grâce à l’une d’elles, mes recherches sont d’ailleurs considérablement abrégées. Mais il n’empêche que la connaissance de la BD n’est manifestement pas la chose la mieux partagée du monde…

13h30 : Comme les albums dont j’ai besoin pour parachever un article sont exclus du prêt, je suis bien obligé de faire mon petit travail sur place. Avant de m’y mettre, je risque un coup d’œil sur mes messages et je vois qu’un ami m’a envoyé une coupure de presse : les déclarations que j’avais faites à un journaliste de Ouest France à propos de la police municipale sont parues, avec ma photo et mon prénom, et le rédacteur a plutôt bien restitué l’esprit de ma réponse ! Je ne m’attends pas à des ennuis mais au moins à des réactions de gens qui me reconnaîtront…

15h : Les boules Quiès sont quand même une belle invention. Travailler dans l’espace jeunesse d’une médiathèque, c’est s’exposer à devoir subir les cris de tous jeunes enfants, et bien sûr, ça ne rate pas. J’aurais peut-être pu m’éviter ça, mais je n’allais quand même pas m’installer à l’autre bout du bâtiment, avec mon PC sur le dos, juste pour insérer quelques références bibliographiques auxquelles trois personnes maximum feront attention ! Bref, je supporte pendant une bonne heure et je repars avec soulagement. Dans le tram, personne n’est masqué, pas même les concombres, et quand je me mouche parce que je sens que je m’enrhume un peu, personne ne s’éloigne de moi avec une mine épouvantée… Un peu ratée, l’opération psychose ! Bon rétablissement quand même aux malades, puisqu’il y en a.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *