Le journal du professeur Blequin (143)

Mardi 26 janvier

13h : Toujours chez mes parents, la vie s’écoule sans histoires. C’est même presque trop calme, ma vie d’hyperactif me manque terriblement. Papa et Maman ont beau être adorables, je me lève chaque matin avec la larme à l’œil et l’angoisse au ventre : même si j’ai eu des satisfactions la veille et, dans la foulée, passé une bonne nuit, j’en perds tout le bénéfice dès que je rouvre les paupières et réalise que le cauchemar continue… Il y a pourtant de bonnes nouvelles : Moderna a annoncé que son vaccin était efficace contre le variant sud-africain qui suscitait tant d’inquiétudes, et la vaccination a fait baisser de 60% les hospitalisations de personnes âgées en Israël. Malgré ça, je prends une décision radicale : pour une durée indéterminée, je ne me connecterai à Internet qu’une fois par semaine, pour être sûr de ne plus tomber sur des articles traitant d’hypothèses glaçantes qui sont finalement démenties un mois plus tard… Inutile d’alimenter inutilement mon angoisse.

Tous les marins sont des chanteurs…

20h : Globalement, C a vous est une bonne émission, c’est même ce qu’il y a de mieux en matière de talk-show télévisé en ce moment. Mais l’intérêt varie forcément en fonction des invités. Ce soir, Anne-Elisabeth Lemoine a le bon goût de recevoir un de mes artistes préférés, François Morel et j’ai le plaisir de le retrouver fidèle à lui-même : tendrement caustique et incapable de se prendre au sérieux malgré un talent de comédien et de chanteur largement au-dessus de la moyenne nationale dont il fournir une nouvelle fois la preuve en interprétant « Tous les marins sont des chanteurs »… J’ai beau être effroyablement malheureux, monsieur Morel arrive  à me faire esquisser un sourire. Puisse-t-il remonter sur scène très vite, ne serait-ce que pour revenir nous voir à Brest où il venait chaque année…

Mercredi 27 janvier

19h30 : Quand il est annoncé, à l’ouverture du journal de France 3, que le reconfinement parait désormais inévitable, je ne peux m’empêcher de dire « on est foutus », ce qui agace quelque peu les auteurs de mes jours… Je m’en veux de leur donner l’impression que leurs efforts pour atténuer mon chagrin sont mal récompensés, car si j’étais seul chez moi en ce moment, mon désespoir serait indescriptible.

Jeudi 28 janvier

19h30 : J’ai fini de dîner ; j’ai vraiment bien mangé, alors pour ne pas gâcher ma digestion, je décide de me retirer directement dans ma chambre sans regarder la télé avec mes parents. Ils le comprennent très bien : puisque je ne peux pas regarder les infos sans être un peu plus désespéré, inutile de tenter le diable…

Vendredi 29 janvier

21h30 : Quand vient le week-end, mes parents prennent l’apéro le soir et font un dîner un peu plus élaboré. Nous n’avons pas dérogé à la règle et, au moment du fromage, ma mère, inspirée comme on peut l’être à cette heure déjà tardive, fait une remarque sur la situation actuelle : selon elle, on est en train d’empêcher les jeunes de vivre pour préserver des vieux qui auraient clamsé de toute façon… Je vous défie de trouver un meilleur résumé de l’absurdité de la situation !

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