Le journal du professeur Blequin (14)

Vendredi 22 décembre

9h : Je sors prendre le bus et je croise une femme d’âge mûr qui, me reconnaissant, me remercie pour les articles historiques que j’écris dans Côté Brest. Quand on me fait ce genre de compliment, je n’ose jamais dire « merci » de peur d’être ridicule, mais je n’en pense pas moins ! C’est que ça réconforte, surtout après avoir perdu à un concours de fictions humoristiques…

Dessin réalisé suite à un procès intenté par Nadine Morano à Guy Bedos : on peut y voir toute l’estime que j’éprouve pour Kev Adams et Norman (alias Keva et Normy dans les Minikeums)…

11h : J’ai toujours une guerre de retard : je viens à peine d’apprendre que France 4 avait relancé Les Minikeums. Bien entendu, inutile d’espérer revoir les héros de mon enfance, les nouvelles marionnettes ont les traits de Rihanna, Louane, Kev Adams, Paul Pogba et Norman… Je sais bien que les temps changent et qu’il est normal qu’un programme qui s’adresse aux jeunes se réfère à des personnalités connues de ces derniers. Mais n’empêche que quand on sait que les Minikeums des années 1990 s’inspiraient d’Antoine De Caunes, de Josiane Balasko, de MC Solaar et même de Bernard Pivot, on mesure les dégâts engendrés par quinze ans de nivellement par le bas…

14h : Une histoire véridique que m’a racontée une prof d’art ; elle avait emmené ses élèves faire du croquis à la gare, plus précisément dans la salle des ventes, quand, tout à coup, elle entendit dans un haut-parleur retentir ces mots : « les personnes munies de carnets à dessin sont priées de sortir immédiatement de la salle des ventes ». Interloquée, la prof alla à la rencontre de l’employée de la SNCF qui venait de faire cette annonce pour lui demander en quoi sa présence et celle de ses élèves gênait l’activité menée dans cette salle ; pour toute réponse, elle n’eut droit qu’à une deuxième sommation, toujours dans le haut-parleur, l’employée faisant comme si la personne à laquelle elle s’adressait n’était pas juste devant elle ! La prof fit alors remarquer que le fait d’avoir sorti un carnet à dessin dans une gare n’était ni prohibé ni même contradictoire avec l’activité à laquelle la selle des ventes était dédiée, étant donné qu’on peut très bien venir acheter des billets de train tout en portant un carnet à la main. Sourde à ces arguments qui relevaient pourtant du bon sens élémentaire, cette connasse d’employée (car il faut bien l’appeler comme elle le mérite) a prononcé une troisième sommation, toujours dans le micro, menaçant cette fois de prévenir la sécurité en cas de persistance à désobéir ! Un abus de pouvoir ? Si ce n’était que ça ! Non, il s’agit de la manifestation d’une grave dérive de notre société où le citoyen est désormais contraint de n’adopter dans l’espace public que le comportement qu’on attend de lui, sous peine de sanctions : on infantilise les gens en les traitant comme des gosses auxquels on met une fessée au moindre pet de travers et on rend l’individu de plus en superflu, ce qui est l’essence même du totalitarisme telle que l’avait analysée Hannah Arendt… Je comprends mieux pourquoi les Français n’ont pas élu Marine Le Pen : c’est parce qu’ils n’ont pas besoin d’elle pour appliquer ses idées !

« A part dans mon public, en chaque Français sommeille un flic. » (Renaud)

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