Le journal du professeur Blequin (82)

Dimanche 19 avril

18h : Pour la première fois, je discute avec ma meilleure amie par webcam ; j’ai longtemps été réticent à employer ce procédé, tant j’étais angoissé à l’idée qu’un ordinateur puisse m’adresser la parole. Fort heureusement, l’image que je reçois n’est pas d’une qualité parfaite, ce qui atténue mon malaise en maintenant l’écran dans son statut d’objet. J’avoue cependant que je trouve ça plus plaisant qu’une conversation téléphonique, ne serait-ce que parce que j’ai ainsi l’occasion de constater de visu que cette jeune femme qui m’est très chère reste malgré tout sereine et souriante. Elle me montre son petit garçon de huit mois : un beau bébé joufflu qui rit tout le temps ; ça y est, je me rappelle pourquoi il faut survivre…

Lundi 20 avril

9h30 : Il y avait longtemps que je ne m’était pas levé sous un ciel aussi typique de ma région : gris et pluvieux. Franchement, ça m’apaise : c’est quand même plus facile de rester confiné dans de telles conditions ! Au moins, comme ça, le monde extérieur ne me rappelle plus avec obstination sa présence… Et puis de toute façon, qui songera encore, à l’issue de cette épreuve, à rouspéter parce qu’il pleut ? Je veux dire : à part, bien sûr, des blaireaux qui n’auront rien compris, c’est-à-dire, hélas, presque tout le monde ?

10h45 : Joss Jamon défend le docteur Doxey. Traduction : Bernard Tapie a rendu hommage au docteur Raout ; de deux choses l’une : ou bien l’ancien ministre de la ville est complètement gâteux, ou bien il est lucide et alors Raout est vraiment un charlatan. Dans le premier cas, c’est grave, dans le second, c’est encore pire ; mais quand j’y pense vraiment, ce qui est vraiment grave, c’est qu’on donne encore la parole à ce malfrat ! Je comprends qu’on soit séduit par la forte personnalité de ce bon vivant, mais il restera pour moi un aigrefin manipulateur et malveillant : ses cheveux ont blanchi et le cancer l’a ravagé, mais ça ne m’inspire ni respect ni compassion, il garde malgré tout cette sale gueule de rascasse qui m’effrayait déjà quand j’étais môme ; à tout prendre, son guignol paraissait plus sensé !

Mardi 21 avril

14h : Le soleil est revenu en force. Je rebaisse mon volet pour pouvoir reprendre mon travail sur Hergé. Tout le monde sait que les livres souffrent de la lumière et de la chaleur : je vous prie de croire qu’ils en souffrent déjà quand on les écrit !

Mercredi 22 avril

10h : Si j’ai bien compté, nous en sommes aujourd’hui à la moitié de la sixième semaine de confinement ; ça parait si long et si court à la fois. Il parait que le déconfinement s’amorce en Israël : cela dit, ça n’a pas dû changer grand’ chose pour les Palestiniens qui ont l’habitude de rester enfermés !

Jeudi 23 avril

9h50 : J’ai eu confirmation hier qu’il y aurait une saison 2 de la série animée 50 nuances de Grecs ; enfin une bonne nouvelle ! A une heure où les séries télé ont bouffé le cerveau de mes semblables, je n’ai pas été gagné par le virus, sauf pour les cartoons de Jul qui constituent, à mes yeux, ce qu’on a fait de mieux en matière d’animation à la télévision française depuis les Shadoks. De toute façon, il n’y a guère qu’avec les programmes courts d’Arte qu’on retrouve une créativité au moins aussi soutenue que celle qui caractérisait Canal+ il n’y a pas si longtemps encore… Mais non, je n’écrase pas une larme, puisque je vous dis que je viens d’apprendre une bonne nouvelle !

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